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Ajustements rendus nécessaires par la lutte contre le COVID-19 sur le continent africain

Unités spéciales créées sur décision présidentielle, limitation des déplacements, soutien aux plus démunis et innovations locales, tels sont les ajustements opérés par l’Afrique en réponse à la pandémie du nouveau coronavirus.


A nurse in Niger returning from her shift screening patients

Infirmière après son service au sein d’une équipe de dépistage. (Photo : Anna Psiaki) COVID-19 Response

L’Afrique est confrontée à l’une des crises de santé publique les plus graves au monde sur une même année, compte tenu de sa lutte constante face aux maladies infectieuses et chroniques. L’apparition de la pandémie du COVID-19 et la pression qu’elle a exercée sur certains des systèmes de santé les plus sophistiqués au monde n’ont pu qu’être abordées avec gravité par les acteurs de la santé publique en Afrique. De par son niveau de pauvreté élevé, sa densité urbaine, son exposition aux maladies infectieuses, son accès limité aux soins de santé et ses campements de fortune surpeuplés, l’Afrique présente de nombreux facteurs de risque susceptibles d’exacerber la pandémie.

Étant donné ces défis, de nombreux pays africains ont suivi la tendance mondiale en imposant la fermeture des entreprises et la limitation des déplacements. Toutefois, 70 % de la population de certains pays étant tributaires de moyens leur permettant de subsister, il était entendu que cette solution ne s’appliquerait que temporairement. La réponse de l’Afrique face à la pandémie doit être adaptée à ses spécificités, ses difficultés, ses ressources et ses atouts. Elle a suscité de nombreuses innovations et adaptations, et les initiatives continuent à se multiplier.

Unités spéciales créées sur décision présidentielle

De nombreux présidents africains ont décidé de mettre en place des « task forces » chargées d’organiser la lutte contre le COVID-19 et composées de professionnels de santé et d’experts sectoriels. Cette innovation institutionnelle vise à orienter les réponses à apporter à la pandémie. Le rôle central des professionnels au sein de ces équipes a accru l’importance donnée à la science et aux procédures de planification fondées sur des données probantes. En Ouganda, un Comité consultatif scientifique et stratégique créé par le président rassemble des économistes, des anthropologistes, des épidémiologistes, des experts en santé publique, des virologues et des juristes. Il a vocation à élaborer et proposer une approche pouvant répondre efficacement aux différents aspects de la crise.

Researchers take a sample swab at C.H. Rennie Hospital in Kakata, Liberia

Prélèvement d’échantillon réalisé par des chercheurs au centre hospitalier de Kakata, au Liberia. (Photo : World Bank/Dominic Chavez)

Le caractère émérite des membres de ces unités a autorisé la diffusion de leurs enseignements et expériences à d’autres parties du monde. Les pays africains ont aujourd’hui une meilleure connaissance de la nature de la pandémie, de ses défis et de ses mythes. Les stratégies mises en place en réponse au COVID-19 ont également profité des conseils professionnels et scientifiques d’experts africains éminents issus d’organes reconnus (notamment l’African Epidemiology Association et le Royal College of Pathologists).

Le résultat : un effort dynamique pour mettre en place des mesures de santé publique adaptées et valables sur un plan scientifique et culturel, les interventions préventives étant privilégiées par rapport aux approches thérapeutiques afin de ne pas submerger des hôpitaux africains dont les capacités de prise en charge sont limitées.

Ces « task forces » présidentielles s’appuient également sur la longue expérience de l’Afrique en matière d’épidémies. Le Nigeria constitue un bon exemple. Ce pays, tirant les leçons de l’épidémie Ebola survenue en 2014 en Afrique de l’Ouest, a rapidement instauré des unités de soins isolées du reste du système de santé habituel pour le traitement des patients atteints du coronavirus, afin d’éviter d’inonder le système de santé en place. Ce dernier doit en effet pouvoir continuer à répondre à d’autres besoins urgents liés notamment aux autres maladies qui frappent la population (malaria, tuberculose, VIH et Sida). Une vingtaine de pays a opté pour ce modèle.

« La qualité des équipes chargées de lutter contre le COVID-19 a facilité l’échange d’informations entre les pays africains sur les enseignements du passé et les meilleures pratiques »

La coordination entre institutions suscitée par ces équipes a permis d’aborder la question du rôle des forces de l’ordre dans la création d’un environnement propice à répondre au mieux à la pandémie. En Ouganda, la police militaire a été chargée de surveiller l’armée afin de s’assurer que les ordres de confinement étaient mis en œuvre avec bienveillance. Cette mesure a été décidée après que des personnes se soient plaintes d’être harcelées par des unités locales chargées de faire appliquer le confinement. Le tollé ainsi provoqué a amené le chef d’État-Major des armées à présenter des excuses publiques aux trois victimes de violence. Le président Yoweri Museveni a instauré un numéro d’appel d’urgence permettant aux citoyens de signaler les cas de violence, ce qui a eu pour effet de réduire les interventions policières à domicile pendant les couvre-feux. En Afrique du Sud, le comportement des forces de l’ordre pendant l’état d’urgence est surveillé par la Direction indépendante des enquêtes de police.

La qualité des équipes chargées de lutter contre le COVID-19 a facilité l’échange d’informations entre les pays africains sur les enseignements du passé et les meilleures pratiques. Une partie de cette coordination est assurée par les Communautés Économiques Régionales, qui ont accéléré le partage de ces enseignements. Par exemple, la task force du COVID-19 en Afrique du Sud échange des informations via un comité technique régional mis en place par la Communauté de développement de l’Afrique australe (CDAA), laquelle se compose des directeurs des établissements de santé des États membres.

Autorisation de déplacements limités afin de ne pas entraver les sources de revenus et l’accès aux marchés alimentaires

An electronic sign in Western Cape, South Africa

Panneau d’affichage dans la région du Cap occidental, Afrique du Sud. (Photo: Brandon Gregory)

Compte tenu du niveau de pauvreté élevé en Afrique, tout confinement non accompagné de mesures de protection sociale pourrait avoir de graves conséquences en termes de famine et d’épuisement des capacités de résistance, notamment parmi les plus vulnérables. Les affrontements entre des citoyens bravant les interdits liés aux déplacements et les forces de l’ordre ont fait des morts et des blessés au Nigeria, au Rwanda, en Afrique du Sud et en Ouganda. Certains pays ont fini par opter pour une stratégie basée sur des couvre-feux et un contrôle strict des déplacements, au motif que le secteur informel est pourvoyeur d’emplois pour la grande majorité des habitants qui doivent travailler pour nourrir leur famille.

Les pays africains se sont adaptés de différentes façons à ces réalités. Le Ghana s’est prononcé contre un confinement total, pour lui préférer un confinement partiel prévoyant des mesures strictes de contrôle et de recherche de contacts, des messages forts en faveur d’un changement de comportement, mais aussi la fourniture d’installations sanitaires et un accès gratuit à l’eau pour les habitants défavorisés. Dans le cadre de ces mesures, 1 300 personnes ont été chargées de désinfecter 137 marchés alimentaires autour de l’agglomération d’Accra afin de garantir à tout un chacun un accès aux denrées alimentaires dans le respect des nouvelles exigences sanitaires. Le Rwanda a également procédé à une désinfection et à un décongestionnement de ses marchés alimentaires, placé des installations sanitaires le long des routes principales  entre zones urbaines et zones rurales et fourni des produits alimentaires et non-alimentaires aux plus vulnérables.

En Ouganda, les vendeurs sur les marchés ont dû prendre eux-mêmes des mesures afin de garantir le respect des règles sanitaires applicables en situation d’urgence, sous peine de fermeture. Le plan de réponse économique du Botswana au COVID-19 impose au gouvernement de fournir des repas à ses habitants, de réacheminer les quantités excédentaires de légumes vers les économies rurales et de favoriser l’implantation de centres de collecte de lait dans les espaces publics. Ces mesures visent à accroître les moyens de subsistance des ménages pendant cette période d’urgence sanitaire.

L’unité spéciale de lutte contre le COVID-19 mise en place par le président sénégalais a créé un grand nombre d’équipes itinérantes capables de réagir sans tarder et de procéder à des prélèvements si des cas de maladie sont signalés.

« Les populations africaines ont développé au fil des années des mécanismes culturellement pertinents pour faire face aux épisodes épidémiques, de sorte qu’elles sont plus enclines à accepter les changements comportementaux qu’ils impliquent ».

Il est courant, en période de stress, que les familles résidant en zone urbaine retournent dans leur village afin d’y trouver des moyens de subsistance économique. Autoriser ces déplacements peut contribuer à réduire le risque de transmission rapide observé dans les zones urbaines à forte densité tout en répondant aux défis de la sécurité alimentaire. Ces déplacements sont toutefois susceptibles d’accroître le risque de propagation du virus vers des régions rurales qui pourraient être davantage épargnées. Par conséquent, un certain nombre de pays, parmi lesquels le Botswana, le Ghana, le Nigeria et l’Afrique du Sud, a mis au point des capacités itinérantes de dépistage sur les routes principales afin d’identifier le cas échéant les personnes porteuses du virus et de leur procurer un traitement adapté. Le Burundi, le Kenya, le Rwanda, le Soudan du Sud et la Tanzanie ont mis en place des unités de dépistage et des laboratoires itinérants afin d’augmenter les opérations mobiles de dépistage sur les routes frontalières, une idée adoptée par la CDAA (Communauté de développement d’Afrique australe), organisation comptant 16 membres.

Le groupe spécial de lutte contre le COVID-19 créé par le président nigérian est assorti d’un levier culturel qui renforce les interventions en faveur d’un changement des comportements et qui passe par des messages culturels et du théâtre. Compte tenu de leur exposition constante aux maladies infectieuses, les populations africaines ont développé au fil des années des mécanismes culturellement pertinents pour faire face aux épisodes épidémiques, de sorte qu’elles sont plus enclines à accepter les changements comportementaux qu’ils impliquent. Les systèmes de santé publique africains se sont nettement améliorés dans leur façon d’exiger des comportements sanitaires appropriés favorables à la prévention et de permettre aux personnes en soins intensifs de trouver une issue favorable. Les systèmes de santé publique africains recèlent une large gamme de tactiques adaptées à des contextes précis, qu’ils ont utilisées pendant les campagnes massives d’immunisation contre la polio. Ils ont notamment organisé la distribution de moustiquaires pour combattre la malaria et mis en place des tests de dépistage de la fièvre jaune, toutes ces méthodes étant le résultat du travail réalisé par les professionnels de santé africains depuis des décennies.

Accorder la priorité aux populations vulnérables

Des innovations ont également été mises en place afin de soutenir les ménages les plus vulnérables face aux restrictions sur la mobilité et aux difficultés économiques qu’elles entraînent. En les aidant à se procurer les moyens de subsistance élémentaires (notamment l’accès à l’alimentation), il sera possible de réduire la menace d’une propagation dans les nombreux bidonvilles tentaculaires du continent où le COVID-19 pourrait se répandre comme une traînée de poudre en raison de la concentration, du manque d’hygiène et des conditions sanitaires préexistantes caractéristique de ces implantations. Le fonds américain de la diaspora éthiopienne (U.S.-based Ethiopia Diaspora Trust Fund) a mis en place un fonds de lancement de 1 million de dollars afin de contribuer aux efforts de lutte contre le COVID-19 en Éthiopie, notamment en ce qui concerne l’accès à la nourriture et les transferts directs en espèces au bénéfice des familles les plus vulnérables.

Au Kenya, dans les zones d’habitation de fortune de Kawangware, Mathare et Majjengo, les organisations locales telles que Mutual Aid Kenya, Sarafu Credit, la Croix-Rouge kényane et Zakat Kenya viennent apporter leur concours à la stratégie retenue par le gouvernement en identifiant les familles à risque et en procurant une aide ciblée par des transferts directs en espèces, des colis alimentaires et des chaînes d’approvisionnement alternatives dont le but est de garantir l’accès aux produits élémentaires. Sarafu Credit utilise un système de devises locales basé sur des chaînes de blocs (titres de crédit) que les habitants des bidonvilles peuvent utiliser pour se procurer de la nourriture ainsi que d’autres produits essentiels.

Local COVID-19 response: A Shofco handwashing station in Kibera, Nairobi

Des équipements mis en place par l’association Shofco à Kibera, au sud de Nairobi, pour le lavage des mains. (Photo: Shofco.org)

À Kibera, l’un des plus grands bidonvilles d’Afrique, une association locale baptisée Shofco a mis à disposition des équipements de lavage des mains, des toilettes publiques et des kiosques d’eau potable dans l’ensemble des points d’accès, lesquels sont dotés de bénévoles et d’un réseau de professionnels de la santé. Bien plus de la moitié des habitants du bidonville (139 000 personnes) se sont inscrites sur une plateforme WhatsApp donnant des informations sur le virus, sur les modes d’infection à Kibera et les règles à suivre pour se protéger et protéger leur communauté. Trois mille familles parmi les plus défavorisées de cette zone bénéficient d’un transfert direct en espèces de 24 dollars par mois pendant trois mois afin de couvrir leurs besoins élémentaires, le financement étant assuré par le secteur local privé et la diaspora kenyane d’Amérique du Nord.

Ces efforts ont été calqués sur ceux de l’initiative pilote du gouvernement kényan mise en œuvre pendant l’épisode de sécheresse de 2009-2010 qui a permis d’offrir 20 dollars par mois à 40 000 familles résidant dans des bidonvilles pendant 9 mois afin de couvrir leurs besoins alimentaires essentiels.

Au Botswana, un système de couverture des coûts salariaux d’un montant de 1 milliard de pulas (84 millions de dollars) a été mis en place en faveur des petites entreprises afin de les encourager à ne pas licencier leurs salariés pendant la période de mise à l’arrêt. Le gouvernement contribuera en outre à hauteur de 50 % au salaire de base de chaque citoyen congédié ou résident permanent pendant 3 mois et versera une subvention comprise entre 1 000 et 2 000 pulas (80-168 dollars) par mois afin de couvrir les besoins élémentaires.

Lutter contre la désinformation

Alors que le COVID-19 continue à se répandre aux quatre coins du monde, on assiste également à une recrudescence des rumeurs, fausses informations et nouvelles mensongères à propos de la pandémie. Vidéos, messages vocaux, textes et récits se sont multipliés, véhiculant des informations contradictoires sur des traitements n’ayant pas fait leurs preuves ou d’étranges allégations indiquant que les Africains seraient en quelque sorte à l’abri du COVID-19 et ce, en dépit des éléments nombreux attestant du contraire.

Les Africains réagissent de différentes façons au défi de cette pandémie. En Afrique du Sud, une société privée, Praekelt.org, a créé un numéro d’aide d’urgence sur WhatsApp permettant de fournir des données en temps réel et des réponses automatisées dans de nombreuses langues, dans un but d’éducation et de sensibilisation. L’application a enregistré 3,5 millions d’abonnés dans les dix premiers jours de son lancement. Praekelt.org a désormais noué un lien avec l’Organisation mondiale de la santé afin de créer un service similaire mais avec une visibilité internationale.

« De nombreux présidents et chefs de file du milieu de la santé utilisent leur point de situation quotidien pour dissiper les rumeurs et les fausses informations qui circulent sur le COVID-19 ».

Africa Check, une association africaine pionnière dans la vérification des informations diffusées, offre un service spécifique autour du COVID-19 en partenariat avec Facebook. Facebook travaille également de concert avec des médias nigérians pour lutter contre la désinformation sur les réseaux sociaux. Les unités spéciales de lutte contre le COVID-19 créées par le président nigérian ont également mis en place un numéro d’appel d’urgence disponible 24h/24 qui permet de donner des informations actualisées et d’ainsi informer et protéger le public contre la désinformation et les rumeurs. De nombreux présidents et chefs de file du milieu de la santé utilisent leur point de situation quotidien pour dissiper les rumeurs et les fausses informations qui circulent sur le COVID-19.

Partenariats publics-privés

En Afrique du Sud, un fonds de solidarité a été créé dans le cadre d’un partenariat public-privé dont les ressources servent à empêcher la transmission du virus, à comprendre l’ampleur de la pandémie, à prendre soin des patients et à soutenir les plus démunis. Plus de 50 millions de dollars ont été recueillis dans le cadre de contributions volontaires.

La Croix rouge ougandaise propose la distribution de denrées alimentaires dans des bidonvilles autour de Kampala, ce projet étant alimenté par un fonds national de lutte contre le COVID-19 créé par le cabinet du Premier ministre. Le plus vieil établissement d’enseignement du pays, l’Université de Makéréré, a mis au point un prototype de ventilateur à bas coût dont la conception revient au Massachusetts Institute of Technology.

Au Kenya, une usine locale spécialisée dans la fabrication de textiles a rapidement réorienté sa production et produit désormais 30 000 masques chirurgicaux par jour. À Kibera, une entreprise locale fabrique des gels hydroalcooliques, des masques et des vêtements de protection pour les habitants des bidonvilles et pour reconstituer les réserves nationales kényanes. Le produit de ces ventes est réinjecté dans ce domaine pour soutenir la recherche de contacts mais aussi l’isolement et le traitement de patients en partenariat avec le Ministère de la santé. Les universités du Zimbabwe fabriquent des gants, des gels hydroalcooliques et des masques en dépit du confinement, de l’inflation croissante et de la situation économiquement morose.

Leçons apprises à ce stade de la pandémie

L’Afrique est toujours confrontée à un combat difficile contre le COVID-19, compte tenu de ses ressources limitées, de la fragilité de ses systèmes de santé, du poids des maladies déjà existantes, de la densité urbaine, des conflits et des niveaux records de déplacements de population. Les gouvernements africains et la population ont toutefois déjà eu l’occasion de prouver de manière remarquable leur capacité à réagir promptement, à nouer des coopérations et à s’adapter face à la pandémie.

« Les précédentes vagues épidémiques ont permis de dégager des enseignements essentiels et d’accroître les connaissances et l’expertise locales ».

De nombreux enseignements ont pu être tirés du passé. L’un d’entre eux est la nécessité de faire entendre la voix des experts quant aux solutions possibles. La mise en place d’unités spéciales présidentielles intersectorielles composées de scientifiques et de praticiens de premier plan a permis de doter l’Afrique d’une plateforme de haut niveau alimentée par une expertise durement acquise dans la lutte contre les crises de santé publique. Le fait que ces équipes spéciales soient placées sous la houlette présidentielle a accéléré la prise de décisions de nombreux gouvernements et de réduire les querelles entre organismes.

Autre acquis : les précédentes épidémies ont permis de dégager des enseignements essentiels et d’accroître les connaissances et l’expertise locales nécessaires pour orienter la lutte contre la pandémie du coronavirus. Dès l’apparition du virus en Afrique, de nombreux pays touchés par Ebola en 2014 en Afrique de l’Ouest et par l’épidémie actuelle (notamment en République démocratique du Congo) ont remis sur le terrain des centres spéciaux de prise en charge, une stratégie visant à traiter le COVID-19 dans des lieux différents des établissements de santé habituels. Cette expérience a également souligné la nécessité pour le continent de se concentrer sur les actions de prévention plutôt que sur les stratégies thérapeutiques dans la lutte contre la propagation du virus.

Il est également apparu important de donner des moyens d’action aux franges de la population les plus touchées afin de concevoir des réponses adaptées aux complexités de leur contexte local dans ce qu’il a d’unique. C’est ce qui s’est produit à Kibera mais aussi dans d’autres bidonvilles. Il est important d’être réactif et de pouvoir se fier aux institutions existantes, c’est pourquoi ces efforts d’adaptation aux réalités locales sont cruciaux.

Disease detectives conducting testing out in the field during the 2014 Ebola outbreak in Liberia.

Professionnels chargés de « traquer » la maladie menant des essais en extérieur, sur le terrain, pendant l’épidémie Ebola de 2014 au Liberia. (Photo: CDC Global)

On a également pu conclure des événements passés que l’efficacité des solutions aux pandémies dépend d’un niveau élevé de confiance entre le gouvernement, les professionnels de santé et les scientifiques, le public et le secteur privé. Il peut prendre de nombreuses formes différentes. Le respect des droits de l’homme dans la réponse apportée à la pandémie est un facteur clé du ralliement populaire pendant une période prolongée où la coopération s’avère essentielle. L’expérience montre que la mise en œuvre de méthodes musclées pour faire appliquer les ordres de confinement nuit à la confiance publique et incite à la méfiance, ce qui met en échec l’objectif précisément poursuivi par ces efforts de limiter les déplacements.

La confiance est également indispensable pour obtenir un changement de comportement, ce dont dépend l’Afrique pour surmonter la crise. Selon Gyude Moore, qui a contribué à orienter la riposte du pays face à la pandémie, ce facteur a été essentiel pour contenir l’épidémie d’Ebola survenue en 2014. D’après lui, « la chute rapide des infections a été imputable à cette époque à un changement de comportement du public en général, et ce changement n’a pu advenir que parce que l’engagement et la confiance des citoyens avaient été placés au premier plan de la réponse apportée à la pandémie ».


Ressources complémentaires