Rapport d'analyse N° 7 : Évaluation des attitudes de la prochaine génération de professionnels du secteur de la sécurité en Afrique

Analyse

Par Kwesi Aning et Joseph Siegle

19 août 2019


Les résultats du sondage révèlent un certain nombre de points clés qui permettent de mieux comprendre les attitudes, les défis et les perceptions actuels des professionnels de la sécurité en Afrique et leur évolution.

Âge et éducation

Une première observation frappante issue des données du sondage est que les jeunes recrues rejoignent les services de sécurité avec des niveaux d’enseignement plus avancés que leurs ainés. En effet, seulement 26 % des répondants de la tranche la plus jeune ont rejoint le service avec seulement un baccalauréat. Ce chiffre est à comparer avec 47% pour la tranche des répondants les plus âgés, ce qui constitue un changement important en termes de diplômes dans les services au cours des dernières décennies [1]. Parmi les jeunes recrues, 41% ont rejoint le service avec une licence. En revanche, seulement 30 % de la tranche la plus âgée avait obtenu une licence au début de leur carrière.

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Des différences de niveau d’éducation sont également apparues entre les services. Les recrues les plus jeunes qui ont rejoint la gendarmerie et l’armée ont commencé dans le service de sécurité avec des niveaux d’éducation considérablement supérieurs à ceux de la police (voir figure 1). Plus précisément, 56 % des recrues de la gendarmerie et de l’armée étaient titulaires d’une license, contre 35 % pour la police.

Cette divergence est particulièrement remarquable pour les militaires, car elle montre une amélioration spectaculaire du niveau d’instruction par rapport aux générations précédentes. Parmi les recrues militaires de la tranche la plus âgée, 26% seulement étaient titulaires d’une licence. Par conséquent, sur une période de plusieurs décennies, le pourcentage de recrues militaires titulaires d’une licence a augmenté de 30 points. De même, le pourcentage avec seulement un baccalauréat et appartenant à la tranche la plus jeune (22 %) représente environ le tiers des 59 % la tranche la plus âgée (voir figure 2). En revanche, les niveaux d’éducation de départ de la police n’ont pas connu une telle amélioration. Le pourcentage de ceux qui commencent avec une licence est resté constant entre 32 et 35 % dans toutes les tranches d’âge.

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La nouvelle génération de professionnels de la sécurité en Afrique a également tendance à rejoindre les services de sécurité à un âge plus avancé. Alors que près de 28 % des répondants les plus âgés avaient rejoint le service à l’âge de 20 ans, ce taux est tombé à 20 % dans la tranche la plus jeune (voir figure 3). Inversement, 65 % des professionnels de la sécurité de la tranche la plus jeune n’ont rejoint leur service respectif qu’après 20 ans. Cela représente une augmentation de 10 % par rapport à la tranche la plus âgée.

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Les gendarmes et les policiers ont tendance à rejoindre leur service à un âge plus avancé que les militaires de l’armée. Environ 78 % des gendarmes et 53 % des policiers, contre 35 % des militaires, se sont engagés entre 21 et 30 ans.

Motivations

La motivation peut être définie comme le degré de volonté d’un individu d’exercer et de maintenir un effort visant à atteindre les objectifs d’une organisation. La motivation est étroitement liée à la satisfaction au travail puisqu’elle entraîne des taux de rétention plus élevés au fil du temps. La motivation est influencée par un ensemble complexe de facteurs professionnels, sociaux et économiques. Ceux-ci incluent une évolution de carrière importante, une rémunération adéquate et des conditions de vie et de travail satisfaisantes. La présence de mécanismes de ressources humaines solides au sein d’une institution de sécurité peut permettre d’assurer la mise en place des facteurs de motivation appropriés pour satisfaire les membres du service.

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Inversement, les problèmes liés à l’évolution de carrière, au salaire et aux conditions de travail sont des raisons pour lesquelles les professionnels du secteur de la sécurité ne sont plus motivés. L’insatisfaction peut découler d’un seul ou d’une combinaison de ces facteurs. L’évolution de carrière est généralement définie comme la possibilité de se spécialiser dans un domaine particulier ou de gravir les échelons. Un manque d’opportunités de promotion peut être vu comme démotivant.

Comme indiqué dans la section Résultats du sondage, la grande majorité (92 %) des membres du service interrogés indiquent être d’accord ou tout à fait d’accord pour dire que leurs attentes concernant l’entrée dans le service de sécurité sont satisfaites. La force de ce sentiment varie toutefois selon l’âge. Avec un taux de 69 %, la tranche la plus âgée déclare être tout à fait d’accord pour dire que ses attentes sont satisfaites (voir figure 4). Ce pourcentage contraste avec un niveau de 38 % pour la tranche d’âge la plus jeune.

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La motivation la plus forte pour rejoindre un service de sécurité citée par les répondants est le désir de servir leur pays, avec 61 % des répondants la citant (parmi 6 options). Cette motivation est la plus citée par les répondants quel que soit le service de sécurité dont ils font partie. Cette motivation à servir le pays est la plus élevée chez les gendarmes (70 %), suivie par les policiers et les militaires.

La motivation de servir son pays est notamment la plus forte chez la tranche la plus jeune avec 65 % indiquant que cette motivation est leur principale dans leur entrée dans un service (voir figure 5). Un tel résultat contraste avec le quartile le plus âgé, où 57 % des répondants citent le fait de servir leur pays comme leur motivation pour rejoindre un service de sécurité. Cette observation est remarquable car elle suggère un sentiment plus fort de loyauté envers la nation chez les plus jeunes. Par extension, il peut s’agir d’une plus grande volonté de respecter l’autorité civile et de ne pas menacer l’état constitutionnel.

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Même si les tranches plus âgées conviennent que le service pour le pays est important, elles indiquent également que les questions d’héritage, de famille et d’amis ayant servi jouent une part importante dans leur motivation. Parmi les six options de réponse, 19 % des répondants appartenant à la tranche la plus âgée indiquent en effet que les liens familiaux avec les services de sécurité ont constitué une motivation essentielle pour leur adhésion (voir la figure 6). Cette influence est la plus forte au sein de l’armée : 25 % des répondants de la tranche la plus âgée la citent comme motivation.

En revanche, parmi tous les services de sécurité (dont l’armée) seuls 11 % des membres de la tranche la plus jeune disent qu’un facteur comme l’héritage familial a joué un rôle dans leur engagement dans un service de sécurité. Cette tendance peut avoir de l’importance, notamment dans le développement historique des armées africaines. Un tel résultat reflète sans doute que les relations familiales très étroites qui caractérisaient l’engagement dans l’armée au cours de la période qui a immédiatement suivi l’indépendance ont donné la place à une armée différente, plus diversifiée et plus motivée à servir le public chez le quartile le plus jeune.

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Une hypothèse courante est que les professionnels du secteur de la sécurité en Afrique ont pour principale motivation le besoin d’avoir un travail. En effet, plusieurs participants aux entretiens ont indiqué qu’il s’agissait d’une considération clé pour eux et leurs pairs. Cependant, seulement 6,6% des répondants ont cité le besoin d’avoir un emploi comme la raison principale de leur entrée dans un service de sécurité (voir figure 7). Ce taux variait d’un maximum de 8,2 % pour la tranche la plus âgée à seulement 3.1 % pour la plus jeune.

Ces résultats suggèrent que les raisons pour rejoindre le secteur de la sécurité ont changé au cours du temps. Il faut par ailleurs noter la tendance inverse dans les réponses sur le service public  comme facteur de motivation de la tranche la plus âgée et les niveaux d’éducation à l’entrée dans un service nettement plus élevés pour les jeunes recrues. Celles-ci semblent aujourd’hui avoir plus de compétences et de possibilités d’emploi, mais choisissent volontiers de rejoindre le secteur de la sécurité comme moyen de rendre service et de faire carrière.

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Le maintien de la paix est un autre facteur de motivation qui ressort du sondage. Avec 15 missions de maintien de la paix internationales et régionales déployées en Afrique, le maintien de la paix représente une composante de plus en plus importante de la mission de nombreuses armées africaines. Le plus jeune quartile semble ainsi être de plus en plus motivé par la possibilité de servir dans de telles des missions, 17 % étant motivés une telle possibilité, contre 7 % pour le quartile le plus âgé (voir figure 8). Ce résultat suggère que les jeunes membres des services de sécurité considèrent le maintien de la paix comme une opportunité d’acquérir de l’expérience, de progresser dans leur carrière professionnelle et de connaître d’autres pays.

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Des différences entre les tranches d’âge apparaissent également dans les facteurs ayant une influence sur le recrutement (voir figure 9). Les jeunes générations sont plus influencées par des recruteurs dynamiques que les tranches les plus âgées. Plus précisément, 25% des deux quartiles les plus jeunes ont indiqué avoir été convaincus par des recruteurs dynamiques, contre 17 % pour les deux quartiles les plus âgés. En revanche, les générations plus jeunes étaient nettement moins motivées par les traditions des services de sécurité (14 %) que les plus âgées (28 %). Par ailleurs,  les traditions d’un service de sécurité restent nettement plus attrayantes pour l’armée (34 %) que pour la police et la gendarmerie (18 % en moyenne). Néanmoins, même dans l’armée, l’importance accordée aux traditions du service a fortement diminué chez la tranche la plus jeune (12 %). La découverte d’une diminution de l’importance des traditions d’un service de sécurité chez les jeunes générations pourrait avoir des implications institutionnelles à long terme pour tous les services de sécurité.

Formation des valeurs et de l’identité

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Les résultats du sondage révèlent une forte affinité entre les participants militaires et les valeurs positives de leur institution. Plus précisément, les répondants des armées indiquent à des taux compris entre 55 % et 75 % que les valeurs du devoir, de la responsabilité, de l’honnêteté, du respect des citoyens et du professionnalisme décrivent leurs institutions. Ces valeurs n’ont été validées que par les répondants militaires. La figure 10 résume la disparité des réponses des services de sécurité respectifs en ce qui concerne le professionnalisme. Il en ressort que 64 % des militaires interrogés estiment que cette valeur caractérise leur service. En revanche, seule une minorité de répondants (généralement entre 38 et 44 %) de la gendarmerie ou de la police indiquent que cette même valeur s’applique à leur service.

Il existe une certaine dissonance dans la façon dont les valeurs sont identifiées. Ainsi les valeurs du mérite et du service ne semblent pas trouver autant écho dans les services de sécurité. Seuls 48 % des militaires interrogés et uniquement 25 et 38 % des policiers et des gendarmes ont indiqué que leurs services étaient fondés sur le mérite. De même, une minorité de répondants de la police et de la gendarmerie (38 % chacun) et des militaires (47 %) disent que leurs institutions incarnent la valeur du service au public.

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Il est intéressant de constater qu’il existe un lien étroit avec l’âge dans toutes les réponses concernant les valeurs (voir la figure 11). Plus précisément, les identifications les plus étroites à des valeurs proviennent des quartiles les plus âgés (généralement entre 55 et 70 %). Cependant, l’identification à de telles valeurs institutionnelles diminue régulièrement chez les tranches les plus jeunes. Par exemple, à peine 37 % des répondants de la tranche la plus jeune disent que la valeur du devoir identifie leur service (voir la figure 11). Dans la tranche la plus âgée, le pourcentage atteint 69 %.

Pour les deux valeurs (service au public et mérite) qui ont enregistré le moins de soutien, la tranche la plus jeune obtient le score le plus faible. Seulement 17 % des répondants de la tranche la  plus jeune ont indiqué que la valeur du mérite reflétait leur service de sécurité (voir figure 12). En d’autres termes, à 3 contre 1, la tranche la plus jeune ne ressent pas que les valeurs du mérite et du service au public identifient leurs services.

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Cette tendance à la baisse de l’adhésion aux valeurs institutionnelles selon la tranche d’âge – une tendance qui s’applique à toutes les valeurs étudiées – est potentiellement très pertinente en termes d’ancrage de ces valeurs. Elle peut également suggérer une érosion du soutien à de telles valeurs positives institutionnelles. Si les membres des services de sécurité ne croient pas que leurs institutions défendent de valeurs positives, cela est de très mauvais augure pour leur moral. Sinon, il peut s’agir d’un moyen de déterminer de manière plus nuancée et constructive l’état de ces institutions par rapport à leurs sociétés. Cela vaut la peine d’être noté d’autant plus que la tranche la plus jeune a indiqué que le service au public était sa principale motivation pour rejoindre le secteur de la sécurité. Ceci montre un fort décalage entre les attentes et les perceptions de la plus jeune tranche d’âge.

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Des différences importantes sont également à noter dans l’identification des valeurs institutionnelles en fonction du genre. Plus spécifiquement, les femmes interrogées, à un taux compris entre 55 et 75 %, ne s’identifient à aucune des valeurs représentatives de leurs institutions. Par exemple, comme le montre la figure 13, seules 31 % des femmes interrogées, contre 51 % des hommes, ont indiqué que le  devoir était une valeur commune décrivant leur service de sécurité. Les femmes dans l’armée, cependant, s’identifient généralement de manière plus positive avec toutes les valeurs institutionnelles étudiées que les femmes des autres services de sécurité. Bien que les taux de réponse positifs parmi les femmes dans l’armée ne soient généralement pas aussi élevés que ceux des hommes interrogés, ils sont généralement supérieurs à 50%.

Ces différences entre les genres sont remarquables pour leur cohérence quelle que soit la valeur en question. De même que pour le groupe de répondants plus jeune, ces perceptions différentes de la part des femmes peuvent refléter une réticence saine à souscrire aux valeurs qui, à leur avis, ne sont pas bien incarnées par leurs institutions. Il peut aussi s’agir d’un sentiment généralisé que les femmes et les groupes les plus jeunes sont aujourd’hui marginalisés dans leurs institutions. Ils sont donc moins enclins à souscrire à l’idée selon laquelle ces valeurs institutionnelles sont partagées.

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Le sondage a également révélé certaines différences notables en fonction du type de régime dont les répondants sont issus. Plus précisément, les répondants des démocraties ont tendance à s’identifier plus fortement à toutes les valeurs institutionnelles (par exemple, le devoir, la responsabilité, l’honnêteté, le respect des citoyens, le service au public) que les répondants des autres régimes. En effet, 63 % des répondants des démocraties ont identifié l’honnêteté comme une valeur caractérisant leur service de sécurité, même si seulement 46 % des répondants des autres régimes tous types confondus partagent cet avis (voir figure 14). La seule exception notable concerne  le mérite pour lequel les réponses des démocraties (37 %) étaient du même ordre que celles des autres types de régimes.

Il convient de noter que les répondants issus d’autocraties constituent le deuxième groupe s’identifiant le plus à des valeurs, notamment celles du professionnalisme, du devoir, de la responsabilité, du respect des citoyens et de l’honnêteté. Il en ressort qu’il est possible de créer des liens forts en matière d’héritage institutionnel au sein de ces régimes (vraisemblablement les plus stables).

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Fait également intéressant, le taux de réponses positives de la part des répondants des régimes mixtes (pays en voie de démocratisation et pays semi-autoritaires) à propos de l’identification aux valeurs du professionnalisme, de service au public et de l’honnêteté est faible. Seule une minorité de répondants trouvent que ces valeurs caractérisent l’éthique de leurs organisations. Cela présente un intérêt politique important pour les institutions de défense cherchant à se renforcer dans les sociétés en transition. L’approfondissement des valeurs partagées et l’identification de ce que représente un service de sécurité pour les citoyens est un domaine qui requiert de l’attention. Ceci peut ensuite aider à soutenir et à faire avancer les processus de démocratisation au sein de ces sociétés.

Il existe également des différences entre ces régimes concernant les menaces auxquelles ils sont confrontés. Par exemple, 11 % seulement des répondants de régimes démocratiques estiment que le risque de crise politique constitue un problème sérieux (voir figure 15). De même, 58 % de ces répondants trouvent le risque de crise politique comme faible. Les perceptions sont inversées pour les répondants issus d’autocraties. Dans ce groupe, 41% des répondants trouvent le risque de crise politique comme une préoccupation sérieuse. Seulement 27 % qualifient ce risque de faible.

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Les réponses au sondage ont également révélé que, dans l’ensemble, les professionnels du secteur de la sécurité en Afrique estiment que leur service bénéficie d’un large soutien du public. Globalement, 88 % des répondants pensent qu’il existe un niveau de soutien positif ou très positif du public. Ce sentiment était nettement plus fort au sein de l’armée : 94 % d’entre eux ont déclaré un soutien favorable du public, dont 47 % ont déclaré qu’il était très positif. Pour les services plus directement engagés auprès du public, comme la police et la gendarmerie, la perception d’un soutien très positif était nettement plus modeste, respectivement de 22 % et 33 %. Chez les policiers, 17 % ont répondu que le public avait une perception négative de leurs services. Les tranches plus âgées ont signalé des niveaux de soutien du public plus élevés que les plus jeunes (voir figure 16). Plus précisément, 41 % des deux tranches  les plus âgées estiment que le soutien était très positif, contre seulement 23 % pour les deux tranches les plus jeunes.

Formation et partenaires internationaux

L’un des résultats les plus probants du sondage est la haute considération accordée à la formation internationale. Quelque 97% des répondants considèrent la formation internationale comme une option positive. La valeur de la formation internationale en tant qu’expérience formatrice a été fortement confirmée au cours des entretiens qualitatifs, pendant lesquels les personnes interrogées en ont vanté les avantages suivants :

  • Élargissement de l’expérience et des réseaux intellectuels, y compris l’accès aux dernières connaissances et tendances
  • Établissement de relations durables à partir de leur formation militaire professionnelle, notamment par une exposition à de nouvelles idées, valeurs, pensée critique et l’évolution des tendances, tout en élargissant les rapports avec d’autres cultures
  • Rapports étroits avec des hauts dirigeants qui font preuve d’un leadership moral et d’une vision solide, valeurs identifiées comme ayant une grande influence dans les expériences formatrices des jeunes officiers
  • Meilleure compréhension des officiers issus de milieux divers
  • Création des normes, visions, valeurs communes avec des partenaires internationaux
  • Élaboration de perspectives régionales et globales sur les défis de sécurité et autres moyens pour aider à résoudre ces défis
  • Découverte de nouvelles technologies

La plupart des répondants notent l’importance de la formation internationale comme une valeur en elle-même, plus que la participation d’un partenaire international particulier. En effet, 83 % des répondants rapportent qu’il était préférable d’avoir une diversité de partenaires internationaux en matière de formation plutôt qu’un ou deux. Parmi les répondants ayant manifesté leur intérêt pour des partenaires de formation d’une certaine origine, leurs préférés étaient les États-Unis (24 %), l’Union africaine (20 %), les Nations Unies (20 %), le Canada (11 %) et l’Union européenne (9 %). L’accueil favorable des institutions internationales multilatérales doit être remarqué.

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Si un consensus général s’est dégagé sur l’importance de la formation internationale, il existe des différences d’opinion selon l’âge et le service de sécurité. La formation internationale est perçue comme nettement plus formatrice que la formation nationale chez les trois tranches les plus âgées (voir figure 17), alors que c’est l’inverse pour la tranche la plus jeune–ce qui apparaît comme une aberration. Cette tranche évalue l’influence de la formation nationale comme plus influente. Elle est suivie de la formation internationale, puis de la formation sur le maintien de la paix. (Remarque : la tranche la plus jeune avait indiqué que la possibilité d’être déployé dans des missions de maintien de la paix était une motivation essentielle pour rejoindre un service de sécurité.) Cette divergence entre les générations les plus jeunes peut simplement refléter leurs possibilités limitées, jusqu’à présent, en matière de déploiements dans des missions de maintien de la paix ou de formation internationale.

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En ce qui concerne les services de sécurité, les militaires interrogés se sont distingués en citant la formation internationale comme l’expérience formatrice la plus importante pour la définition de l’identité de leur service. Dans une proportion de 2 à 1, les expériences de formation internationales sont considérées comme plus influentes que la formation nationale (voir figure 18). Cette tendance ne s’applique pas à la police et à la gendarmerie qui déclarent que la formation dans le pays avait la même valeur que la formation internationale.

Même si cela peut sembler paradoxal en raison de leur rôle principal axé sur l’intérieur de leur pays, les missions de maintien de la paix semblent avoir la plus grande influence pour la police. Cela semble souligner le rôle croissant joué par les forces de police dans les opérations de paix en Afrique, notamment en Afrique de l’Ouest. Pour les militaires interrogés, les déploiements dans les missions de maintien de la paix se plaçent après les formations internationales en termes d’influence sur l’identité du service de sécurité d’un membre, suivis de la formation au niveau national. L’importance croissante des expériences de maintien de la paix dans la formation de l’identité des services de sécurité africains est une tendance intéressante à suivre dès lors qu’ils assument ce rôle de plus en plus.

Les entretiens ont mis l’accent sur l’importance accordée à la connaissance de l’anglais qui crée des opportunités de formation internationale et d’avancement de carrière supplémentaires pour le personnel des services de sécurité. Le revers de la médaille est qu’il existe un grand nombre de jeunes leaders remarquables dont la carrière est limitée car ils n’ont pas la possibilité de développer leurs compétences en anglais.

Variations régionales

De fortes variations régionales apparaissent dans les attitudes et les perceptions des secteurs de la sécurité africains en raison de leurs racines historiques, leurs traditions et leurs menaces. Le tableau 2 présente un certain nombre des variations régionales notables. En voici la liste :

Éducation. Les niveaux d’éducation des recrues en Afrique de l’Ouest sont sensiblement plus élevés que ceux d’autres régions. 68 % environ des jeunes professionnels du secteur de la sécurité interrogés en Afrique de l’Ouest détenaient au moins une licence au début de leur service. 15 % ont commencé à servir avec baccalauréat comme plus haut niveau de scolarité atteint. En revanche, 40 % des nouveaux membres des services de sécurité d’Afrique centrale et d’Afrique de l’Est ont commencé avec un baccalauréat comme plus haut diplôme scolaire.

Maintien de la paix. De même, les Africains de l’Ouest sont les plus influencés par les expériences de maintien de la paix en tant que facteur d’identité de leur service de sécurité. 29 % d’entre eux considèrent le maintien de la paix comme l’expérience la plus importante, contre 16 % en moyenne dans les autres régions.

Corruption. Les répondants d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe se distinguent par leur préoccupation face à la corruption. 95 % d’entre eux estiment qu’il s’agit d’un problème de sécurité de niveau « moyen » ou « élevé ». Cette réponse n’indique pas qu’il existe des niveaux de corruption plus élevés dans ces régions mais plutôt que les membres des services de sécurité en sont particulièrement inquiets et qu’ils perçoivent les implications pour la sécurité de niveaux de corruption élevés. Bien que les préoccupations concernant la corruption soient également élevées, elles sont relativement moins importantes en Afrique centrale et en Afrique de l’Ouest (75 % et 85 % respectivement). Dans l’ensemble, les résultats soulignent la reconnaissance généralisée de la menace que fait peser la corruption sur la sécurité.

Groupes extrémistes violents. Les membres des services de sécurité d’Afrique de l’Est et d’Afrique centrale considèrent les groupes extrémistes violents comme une source d’inquiétude. En effet, 73 % des répondants trouvent que cette menace est  moyenne ou élevée. En revanche, seuls 2 % des répondants d’Afrique australe considèrent la menace des groupes extrémistes violents comme élevée avec 16 % la considérant comme moyenne. Les perceptions en Afrique de l’Ouest se situent entre les deux avec 60 % des personnes interrogées qui considèrent les groupes extrémistes violents comme une menace moyenne ou élevée.

Trafic illicite. Les répondants de l’Afrique centrale indiquent que le trafic illicite est leur principale préoccupation, près de 80 % d’entre eux estimant qu’il s’agit d’une menace élevée ou moyenne. Reflétant un degré de préoccupation modéré, 65 % des membres des services de sécurité d’Afrique de l’Ouest et australe ont déclaré que le trafic illicite constituait une  menace faible. L’Afrique de l’Est se distingue par le fait qu’elle est beaucoup moins susceptible de considérer le trafic illicite comme une menace élevée (9 %), par rapport à un taux de 29 % pour tous les répondants.

Soutien du public. En Afrique de l’Est, les répondants ont une perception particulièrement positive quant à l’appui du public, 49 % des personnes interrogées l’ayant qualifiée de très élevée, contre 32 % au total. De manière plus générale, environ 90 % des membres des services de sécurité d’Afrique centrale, de l’Est et de l’Ouest estiment qu’il existe un niveau de soutien élevé  à très élevé de la part du public pour leurs services de sécurité. Les répondants d’Afrique australe, en revanche, ont indiqué un niveau de soutien du public plus prudent envers leurs services, avec 29 % d’entre eux indiquant une perception négative et 21 % seulement estimant que ce soutien était très élevé.

Formation internationale. Les répondants d’Afrique de l’Est accordent la plus grande importance à la formation internationale avec 46 % qui la citent comme le facteur le plus influent pour façonner l’identité de leur service (un niveau trois fois supérieur au niveau enregistré pour la formation nationale). Les répondants d’Afrique de l’Ouest et centrale ont également indiqué clairement l’impact de la formation internationale sur le façonnement de l’identité, bien au-delà de la formation nationale. Le soutien en Afrique australe était plus modeste : 33 % des membres des services de sécurité ont déclaré que la formation internationale était une expérience formatrice essentielle. Ceci est à peu près comparable à la valeur de la formation nationale.

Troubles civils. Les répondants d’Afrique centrale expriment beaucoup plus de préoccupations devant les troubles civils que ceux d’autres régions. 48 % déclarent que les troubles civils étaient une source de grave préoccupation, soit le double du taux observé ailleurs sur le continent. En revanche, 50 % des membres des services de sécurité d’Afrique de l’Est et australe considèrent les troubles civils comme une menace faible. Les répondants centrafricains étaient également plus susceptibles de considérer le risque de crise politique comme un défi. 56 % des membres des services de sécurité de cette région estiment que les crises politiques constituent une menace élevée (contre 24 % globalement). De même, l’Afrique centrale se distingue par le fait qu’elle considère la violence ethnique comme une menace élevée (40 %). En revanche, seulement 7 % des répondants d’Afrique australe étaient de cet avis et 19 % globalement.

[1] Tous les résultats comparatifs mis en évidence dans la section d’analyse sont statistiquement significatifs dans les tests du chi-carré de Pearson des variables catégorielles, généralement égal ou supérieur à un intervalle de confiance de 90 %. Les résultats significatifs spécifiques sont rapportés dans chaque figure.


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