Rapport d'analyse N° 7 : Évaluation des attitudes de la prochaine génération de professionnels du secteur de la sécurité en Afrique

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Conclusion

Par Kwesi Aning et Joseph Siegle

19 août 2019


L’étude avait pour objectif d’évaluer les différences d’attitudes, de motivations et de valeurs de la génération émergente des professionnels du secteur de la sécurité en Afrique. Elle a permis de trouver un large éventail de points de vue sur lesquels les membres plus jeunes des services divergent de leurs collègues plus âgés. Bon nombre de ces différences sont probablement liées au fait que la plus jeune cohorte de professionnels du secteur de la sécurité est nettement plus éduquée et entre en service à un âge plus élevé que les générations précédentes. Néanmoins, il convient de noter que le niveau d’éducation des policiers au début de leur entrée en fonction semble être à la traîne par rapport aux autres services. C’est donc un secteur où une amélioration devrait être envisagée.

La plus jeune cohorte de professionnels du secteur de la sécurité africains interrogée se distingue également par une très forte motivation à servir son pays. De même, cette cohorte et les membres féminins des services de sécurité semblent faire preuve de plus de scepticisme à l’égard des valeurs institutionnelles telles que le mérite, le service au public, l’honnêteté et le professionnalisme, que leurs institutions devraient refléter dans la pratique.

Ces sentiments suggèrent une volonté de définir un niveau plus élevé de valeurs professionnelles pour leurs services de sécurité. Ils impliquent également une plus grande propension à la réforme institutionnelle chez les jeunes professionnels du secteur de la sécurité afin de mieux faire correspondre les idéaux institutionnels à la réalité. Cela montre une plus grande propension à la réforme des jeunes générations, combinée à une ouverture au renforcement des capacités internationales. Nous avons ici un sujet pouvant conduire à de futurs partenariats internationaux.

Cependant, ces résultats offrent également une mise en garde. Les divergences par rapport aux générations plus anciennes en ce qui concerne les valeurs institutionnelles soulèvent la question de savoir si le lien fort que crée la fierté en l’institution sera maintenu par les jeunes générations, ce qui pourrait avoir des conséquences sur le professionnalisme et l’attrait d’une carrière dans le secteur de la sécurité. Cette préoccupation a été mise en évidence lors des entretiens qualitatifs. Les jeunes membres des services ont été félicités pour leur capacité à absorber de nouvelles informations et à s’adapter aux technologies. Cependant, en même temps, ils étaient également perçus comme faisant preuve de moins de camaraderie et de cohésion que les tranches les plus âgées, « préférant se retirer dans la solitude munis de leurs téléphones », comme l’a déclaré l’un des répondants.

L’importance du soutien aux opportunités de formation internationale est une autre conclusion forte de cette étude. Les possibilités de formation internationale se sont révélées inestimables pour les raisons suivantes :

  • Expériences formatrices
  • Base pour le développement d’une identité institutionnelle
  • Accès à de nouvelles approches et technologies
  • Élargissement des perspectives
  • Stimulation de la pensée critique
  • Renforcement dès les liens avec les partenaires régionaux

Bien que cette étude n’ait pas pour objectif explicite d’explorer la pertinence de la formation militaire professionnelle, les résultats de cette étude semblent soutenir de manière retentissante son efficacité aux yeux des participants. Les personnes interrogées ayant participé à des formations à long terme ont été les plus enthousiastes quant aux avantages d’une telle expérience. L’étude n’ayant pas essayé de faire la distinction entre différents types de formation internationale, il n’est pas possible d’en décrire les avantages relatifs perçus dans le présent rapport. La délimitation et l’évaluation des futures sessions de formation internationale pour optimiser leurs bénéfices devraient faire l’objet d’une enquête séparée dans un proche avenir.

Bien qu’il ne s’agisse pas de l’objectif de cette étude, les résultats du sondage ont révélé que 84 % des participants ont eu la possibilité d’améliorer leurs qualifications au cours de leur carrière dans un service de sécurité. Près des deux tiers d’entre eux ont obtenu un autre diplôme, les autres ont obtenu un certificat professionnel ou technique. Cette découverte suggère que les services de sécurité africains sont une source précieuse de développement de capital humain pour leurs sociétés, et plus particulièrement le personnel de leurs services de sécurité. Cette observation ne fait pas l’objet d’une reconnaissance au sens large et soulève d’autres considérations concernant le développement institutionnel ainsi que pour le recrutement et la rétention des jeunes membres des services de sécurité.

Les résultats du sondage montrent également un niveau élevé de satisfaction quant à la satisfaction de leurs attentes. 92 % des participants étaient d’accord ou fortement d’accord avec cela, y compris 89 % de la tranche la plus jeune. C’est un signe encourageant que la grande majorité des professionnels du secteur de la sécurité ont bénéficié de parcours de carrière enrichissants dans leurs services de sécurité. Une meilleure compréhension des facteurs qui contribuent à ce résultat permettrait de mieux former le personnel et de renforcer les institutions

Le sondage a également révélé des niveaux élevés de soutien du public selon les membres des services de sécurité. En moyenne, 87 % des membres des services de sécurité ont indiqué que le public avait une opinion positive de leurs services. Cette perception positive est similaire quel que soit le service de sécurité avec un niveau plus élevé pour les militaires et plus faible pour la police. Ces résultats contrastent quelque peu avec les sondages d’opinion réalisés en Afrique, qui montrent un soutien plus modeste au secteur de la sécurité. Par exemple, un sondage d’Afrobaromètre mené dans 36 pays indique que seulement 51 % de la population fait un peu ou très confiance à la police.

De tels écarts dans les perceptions des citoyens et des membres des services de la sécurité représentent des opportunités de découverte potentielle. Sensibiliser le personnel des services aux raisons des divergences peut permettre de réformer certains aspects de la relation citoyen-sécurité. Une telle initiative pourrait également faciliter un dialogue accru avec les citoyens afin de réduire les écarts de perception.


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