C’est encore une année record en matière de déplacement de force en Afrique. Cette tendance à la hausse persiste depuis 2011. S’ils étaient 29 millions l’année dernière, aujourd’hui plus de 32 millions d’Africains sont soit déplacés en interne, refugiés ou demandeurs d’asyle.
En Afrique, les sources de ces déplacements de population sont très concentrées. Dix pays africains sont à l’origine de 88 % (28 millions) des déplacements forcés sur le continent. Tous ces dix pays d’origine sont en conflit. La répression, la violence des groupes extrémistes violents et la militarisation de la politique se conjuguent pour causer ces conflits. Sept sur dix ont des gouvernements à tendance autoritaire.
Sur ces 32 millions de déplacés de force, les trois quarts, soit 24 millions, le sont à l’intérieur de leur pays. Cela signifie que la plupart des africains déplacés ont fui pour la destination sûre la plus proche. Si cela implique parfois de traverser une frontière, ce n’est pas le cas pour la plupart d’entre eux. Ce détail est important puisque des dispositions légales supplémentaires s’appliquent quand une personne déplacée de force se trouve hors de son pays d’origine (comme par exemple la Convention de 1951 de l’ONU relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967, ou la Convention de l’OUA régissant les aspects propres aux problèmes des réfugiés en Afrique de 1969). Tant qu’une personne se trouve à l’intérieur de son propre pays, son droit à la protection est régi par son gouvernement, qui peut ou non adhérer à ces conventions qu’il aurait signées (comme la Convention de Kampala).
Points saillants
- Avec 6 millions de personnes déplacées de force, la RDC a au moins un tiers de plus de personnes déplacées que tout autre pays d’Afrique.
- Le Soudan du Sud a presque 4 millions de personnes déplacées de forces, sur une population de 11 millions, en faisant le pays d’Afrique avec la plus grande part de population déplacée de force. Le Soudan du Sud se distingue aussi par le fait que la majorité de ces personnes déplacées de force sont des réfugiés et des demandeurs d’asyle qui vivent en majorité en Ouganda, au Soudan et en Éthiopie.
- L’Éthiopie a connu l’augmentation la plus importante de personnes déplacées de force au cours de la dernière année : environ 1,8 million de personnes ont été déplacées par le conflit au Tigrai. En même temps, l’Éthiopie accueille 800 000 réfugiés de pays voisins.
- Le Nigeria fait face à diverses menaces déstabilisatrices. Dans la région du Nord-Est, des attaques violentes perpétrées par Boko Haram et l’État islamique en Afrique de l’Ouest ont entrainé le déplacement de 2,5 millions de nigérians. Les enlèvements, l’extorsion et des attaque de bandes criminelles organisées dans le Nord-Ouest ont déplacé 800 000 personnes supplémentaires.
- Le Soudan, avec ses 2,5 millions de personnes déplacées en interne, accueille par ailleurs 1,1 million de réfugiés, la plupart du Soudan du Sud et de l’Érythrée.
- Le Burkina Faso a subi une explosion dans sa crise de déplacement force suite à la violence perpétrée par un groupe islamiste militant originaire du Mali. Par conséquent, ses 1,2 million de personnes déplacées de force représentent une augmentation par neuf par rapport au niveau de 2019.
- Le Mozambique est le seul pays d’Afrique australe qui fait face à une crise importante de déplacement, voyant sa population déplacée tripler. Une insurrection dans le Nord par Ahlu Sunnah wa Jama’a (ASWJ) a entrainé le nombre de personnes déplacées de passer de 211 000 à 668,000 people au cours de l’année écoulée.
Ressources complémentaires
- Mark Duerksen, « Les diverses menaces envers la sécurité du Nigeria », Éclairage, Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 14 avril 2021.
- « Aggravation de la crise alimentaire sur le continent africain », Infographie, Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 1er mars 2021.
- Olajumoke (Jumo) Ayandele, « Affronter la crise du Kaduna au Nigeria », Éclairage, Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 18 février 2021.
- « La flambée de violence islamiste en Afrique souligne un changement du paysage sécuritaire », Infographie, Centre d’études stratégiques de l’Afrique, 26 février 2021.
- Daniel Eizenga et Wendy Williams, « Le puzzle forme par le JNIM et les groupes islamistes militants au Sahel », Bulletin de la sécurité africaine No. 38, Centre d’études stratégiques de l’Afrique, janvier 2021.
- Wendy Williams, « Frontières en évolution : La crise des déplacements de population en Afrique et ses conséquences sur la sécurité », Rapport d’analyse No. 8, janvier 2020.
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