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Cette étude s’est appuyée sur des approches quantitatives et qualitatives pour sa conception, la collecte de données et l’analyse afin de mieux comprendre les motivations, les attentes et les expériences de professionnels du secteur de la sécurité africains ainsi que pour en dégager les tendances générales. Le processus s’est également inspiré des nombreuses histoires orales rassemblées par les auteurs et leurs institutions respectives.
Le KAIPTC (Kofi Annan International Peacekeeping Training Center) et le CESA (Centre d’études stratégiques de l’Afrique) organisent régulièrement des formations et d’autres programmes académiques. Ils recrutent donc en permanence des professionnels civils ou militaires du secteur de la sécurité en Afrique de niveau subalterne, intermédiaire et supérieur. En raison de leur longue existence et présence, les deux centres ont également pu s’appuyer sur leurs réseaux de relations au sein de la communauté de sécurité africaine pour alimenter cette recherche.
Cette étude comprend trois parties. Tout d’abord, un examen d’anciens documents d’études, de rapports et d’analyses relatifs à l’évolution des attitudes, des motivations et des normes des professionnels de la sécurité africains. Compte tenu de la dimension temporelle sous-jacente de cette étude, qui examine les différences entre la dernière génération de professionnels de la sécurité et leurs aînés, cette analyse a impliqué des évaluations à la fois historiques, contemporaines et comparatives.
Deuxièmement, il a été procédé à un sondage anonyme de grande envergure auprès de professionnels du secteur de la sécurité en Afrique, qui a servi de base statistique pour la généralisation et l’analyse comparative des éléments clés du sujet de recherche. À travers une série de 23 questions à choix multiples (comprenant à la fois des options de type « Une seule réponse » et « Toutes les réponses applicables »), le sondage a été structuré afin de recueillir des informations sur quatre domaines principaux: les motivations de l’engagement dans un service, les valeurs perçues et l’identité des branches de service respectives, les formations et les opinions concernant les partenariats internationaux en matière de formation.
Ces domaines d’intérêt ont été complétés par des informations démographiques servant de base pour une analyse comparative des réponses. La recherche visait en particulier à évaluer les différences entre cinq grandes catégories analytiques (variables indépendantes) y compris le type de service (militaire, police et gendarmerie), la région géographique, le quartile d’âge, le sexe et le type de régime politique dont était issu les répondants (voir le tableau 1 ci-dessous).
Après avoir testé l’outil, un lien vers le sondage a été diffusé électroniquement à plus de 4 500 professionnels de la sécurité africains issus des bases de données du CESA et du KAIPTC. Le sondage a également été diffusé à un réseau d’établissements de formation militaire professionnel participant au Programme de formation militaire africaine (AMEP), ainsi que par le bouche à oreille. Le sondage a été disponible pendant trois semaines, du 1er au 21 avril 2017. Le sondage était disponible en anglais, en français et en portugais afin d’y permettre un accès aussi large que possible sur le continent et d’améliorer l’exactitude des réponses.
Le sondage a été administré à l’aide de la plateforme SurveyMonkey afin de garantir l’anonymat des répondants. Les réponses ont été vérifiées pour assurer leur validité, leur intégrité et leur exhaustivité. Un logiciel statistique a ensuite été utilisé pour filtrer, coder et analyser les données reçues.
Ensuite, une série d’entretiens individuels et des petits groupes de discussion ont été organisés avec 35 policiers et officiers en service actif afin de comprendre la logique derrière les valeurs et perceptions respectives des professionnels du secteur de la sécurité en Afrique. Les groupes de discussion comprenaient entre trois et cinq participants. Les entretiens ont eu lieu dans plusieurs établissements de formation militaire en Afrique de l’Ouest et à Washington DC, et se sont déroulés selon une politique de non attribution. Tout en laissant de la place aux questions et réponses ouvertes, les entretiens ont été semi-structurés de manière à développer les thèmes identifiés dans les questionnaires.
Cette approche qualitative a permis de fournir un supplément d’informations au sondage en décrivant certaines des expériences professionnelles et des circonstances dans lesquelles les valeurs, les attitudes et les motivations citées étaient apparues. De même, les entretiens se sont révèles plus appropriés pour décrire les facteurs contextuels affectant les perspectives des professionnels et pour mieux comprendre pourquoi et comment ces perspectives avaient changé.
Ces informations qualitatives se sont révélées particulièrement pertinentes compte tenu du terrain relativement inexploré des attitudes de la prochaine génération de professionnels du secteur de la sécurité en Afrique. Les entretiens ont ainsi permis de découvrir des idées et des motivations jusque-là ignorées, ainsi que des informations parfois sensibles basées sur des expériences personnelles.
Limites méthodologiques
Afin de mieux apprécier les conclusions de cette recherche, il est important de préciser certaines des limites des méthodes de ce sondage. Premièrement, les résultats quantitatifs ont été extrapolés à partir d’un groupe de 742 répondants. L’échantillon était suffisamment important et diversifié pour en tirer des conclusions significatives pour un bon nombre des cofacteurs évalués par l’analyse. Néanmoins, il faut reconnaître que ce groupe n’était pas un échantillon aléatoire. Un grand nombre des répondants étaient liés au moins indirectement aux réseaux du KAIPTC ou du CESA. Cette réalité augmente la représentation du nombre d’officiers jeunes, compétents et focalisés sur leur carrière dont les antécédents en termes de réussite professionnelle, d’éducation, d’âge et d’exposition à des acteurs internationaux sont probablement plus importants que s’il s’agissait d’un échantillon plus représentatif des différents membres du service.
Alors qu’un nombre disproportionné de répondants étaient membres de la police et de la gendarmerie en Afrique de l’Ouest (reflétant la base des réseaux du KAIPTC), le nombre de militaires et de personnes interrogées provenant d’autres parties du continent était suffisamment élevé pour générer des résultats comparatifs solides. De même, compte tenu de la forte participation de répondants d’Afrique de l’Ouest, le nombre de pays en voie de démocratisation était surreprésenté dans les résultats du sondage. Cependant, encore une fois, cela a été contrebalancé par un nombre suffisant de répondants servant sous d’autres types de régimes pour tirer des observations comparatives statistiquement significatives.
Deuxièmement, alors que des efforts ont été faits pour atteindre toutes les régions du continent, le nombre de répondants au sondage en Afrique du Nord et en Afrique lusophone n’a pas été suffisant pour permettre des comparaisons entre ces régions. Par conséquent, alors que les réponses des individus de ces régions sont considérées comme faisant partie du sondage général, des comparaisons régionales, en particulier avec l’Afrique du Nord, n’ont pas pu être effectuées. De même, bien que des civils faisaient partie des répondants au sondage, leur nombre était trop petit pour permettre des généralisations comparatives statistiquement significatives.
Enfin, comme cette recherche est tirée d’une seule période d’enquête, les comparaisons entre les tranches d’âge sont basées sur leurs réponses au moment où le sondage a eu lieu. Les réponses à des questions telles que les motivations pour rejoindre le service ou les expériences formatrices des tranches plus âgées sont donc tirées d’une base d’expérience plus large que celle des tranches plus jeunes qui entament leurs carrières.