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Ouganda : bataille avec pour enjeu l’âme de la nation

La nouvelle génération d’Ougandais, en faveur d’un pluralisme politique accru, rejette le monopole du pouvoir formé par l’ancienne garde du Mouvement de résistance nationale (le NRM). Il en ressort des visions extrêmement différentes pour l’avenir du pays, qui se manifesteront lors des élections prévues pour janvier 2021.


Ugandan opposition leader Bobi Wine being arrested earlier this year by various security forces.

Arrestation du chef de l’opposition ougandaise Bobi Wine au début de l’année. (Image : VOA/Screen capture)

Le début de la saison des élections ougandaises de 2021, en novembre, a été marqué par l’arrestation de l’un des principaux candidats de l’opposition après que la police a ouvert le feu sur lui et ses sympathisants, l’avancement de la date des élections de deux mois, au 14 janvier, et les tirs de la police ougandaise contre les soutiens de l’opposition qui s’étaient réunis pour manifester, et qui ont finalement fui par les marécages de Kampala pour éviter le massacre. Plus de 50 personnes y ont trouvé la mort.

Ce n’est pas ce à quoi s’attendaient le président Yoweri Museveni et le Mouvement de la résistance nationale (NRM) pour leur campagne. Au pouvoir depuis 1986 et cherchant à briguer un 6ème mandat après avoir réussi à contourner les limites de mandats et les limites d’âge, Museveni, âgé de 76 ans, s’attendait à un renouvellement sans heurt de son mandat.

Il a en fait face à lui une jeunesse très motivée qui appelle de ses vœux un changement, une transition vers une véritable démocratie. L’opposition est menée par un chanteur devenu député, Robert Kyagulanyi Sentamu, connu sous le nom de Bobi Wine, et son Mouvement populaire (People Power movement).

« [Museveni] a face à lui une jeunesse très motivée qui appelle de ses vœux un changement, une transition vers une véritable démocratie ».

Ce jeune homme de 38 ans, devenu célèbre en composant des chansons critiquant les injustices politiques, a recueilli dans ce contexte un florilège de griefs de la jeunesse s’irritant du NRM et de sa prétention à s’arroger un droit perpétuel. Bien que Wine soit celui qui ait le plus retenu l’attention, 11 autres candidats de l’opposition se présentent également au premier tour des présidentielles.

Le NRM tente, par une série de mesures restrictives, de tuer dans l’œuf le terrain gagné par l’opposition. Wine a été arrêté à plusieurs reprises ces dernières années, et il aurait été frappé et torturé dans le cadre d’une loi datant de l’époque coloniale, la Habitual Criminals (Preventive Detention) Act de 1951, qui permet d’incarcérer une personne soupçonnée de projeter la commission d’un crime. La loi a été utilisée pour placer Wine en détention seulement quelques minutes après que sa candidature à la présidentielle ait été retenue par Commission électorale le 3 novembre. Selon la police, il aurait prévu d’organiser un « rassemblement illégal » sans permission préalable, ce qui aurait menacé l’ordre public.

Le NRM a également invoqué la loi Communications Act, qui censure les propos critiques et qui peut être utilisée pour interdire de diffuser sur les quelque 200 stations de radio privées que compte l’Uganda. Une loi antiterroriste autorise par ailleurs d’intercepter les communications privées sans justification. Une autre oblige les fournisseurs d’accès Internet à garantir la capacité de leur système à intercepter des communications sans que l’utilisateur le sache. En 2019, des millions de personnes ont quitté les réseaux sociaux après l’application d’une taxe visant à « encadrer les vains bavardages » échangés sur 60 plateformes telles que Facebook et WhatsApp.

La loi Public Order Management Act de 2013 interdit les rassemblements publics non autorisés par la police. En 2020, la Cour constitutionnelle a invalidé un article jugé illégal, mais non pas la loi dans son intégralité. Les Stage Play and Public Entertainment Rules de 2019 imposent aux musiciens, artistes et comédiens de soumettre le contenu de leur prestation au gouvernement pour approbation avant toute représentation publique.

Uganda police arresting a protester

Arrestation d’un manifestant par la police ougandaise. (Photo : VOA)

Tels sont les obstacles systémiques qui freinent la capacité de l’Ouganda à organiser des élections véritablement démocratiques. Le recours non dissimulé à la violence et sa justification par le NRM à l’encontre de ses opposants politiques lève tout doute quant à la possibilité d’un pluralisme politique permettant l’échange libre et juste des idées.

Peu disposée à apporter son crédit à cette tendance, l’Union européenne a refusé d’envoyer des observateurs pour suivre le déroulement des élections. Elle a indiqué qu’aucune des 30 recommandations qu’elle avait formulées pour pallier les lacunes observées lors des élections de 2016 n’avait été mise en œuvre. Ces recommandations proposaient des réformes juridiques, un accès équitable aux médias, une participation du public à la désignation des commissaires siégeant à la Commission électorale et une garantie d’indépendance de cette commission par rapport au pouvoir exécutif. Une coalition de députés indépendants avait également soumis en 2019 une proposition de loi comportant des réformes globales. Celle-ci fut toutefois bloquée par la majorité qualifiée des députés NRM, qui détiennent 393 sièges sur 426.

L’Ouganda s’apprête ainsi à vivre de nouvelles élections marquées par une série de facteurs structurels dont la vocation est de produire un résultat prédéterminé. Le débat idéologique qui commence à émerger dans ce pays y fait toutefois entrevoir, au-delà du cadre des élections, un horizon propice à de nouvelles conceptions quant à l’avenir du pays.

Le fossé intergénérationnel et l’aggravation des guerres culturelles

Le NRM est allé très loin dans la suppression du Mouvement populaire et de son aile politique, la National Unity Platform. Cela met en évidence le fossé intergénérationnel entre l’ancienne génération de l’après-indépendance et ceux nés après l’accession au pouvoir du NRM en 1986 qui constituent l’écrasante majorité des électeurs. Contrairement à la génération des « anciens », ils ne montrent pas la même déférence à l’égard de la légitimité revendiquée par le NRM dans le cadre de sa lutte armée.

« Le Mouvement populaire rejette le NRM qui constitue selon lui « l’ordre ancien », déconnecté des nouvelles réalités, fondamentalement corrompu, violent et brutal ».

En janvier 2020, Museveni entame, entièrement revêtu d’un uniforme, une marche de 195 kilomètres sous le nom de code « Afrika Kwetu »  (Notre Afrique) jusqu’à Luweero, le fief historique depuis lequel le NRM a lancé l’offensive. Il a ainsi cherché à se donner une nouvelle légitimité et à « éduquer la jeunesse à ne pas prendre ses libertés pour acquises ». Dans les années 1990, la jeunesse ougandaise avait globalement bien accueilli les précédentes marches. La jeunesse d’aujourd’hui n’est plus aussi réceptive au message délivré par le NRM. En novembre, la campagne du Mouvement populaire a attiré à Luweero des foules plus nombreuses que le NRM et ce, en dépit du couvre-feu imposé en journée afin de maintenir à l’écart les partisans de Wine.

L’Ouganda est l’un des pays les plus jeunes au monde : 78 % de sa population est âgée de moins de 35 ans, et huit millions d’habitants sont âgés de 15 à 30 ans. Il enregistre aussi malheureusement le taux de chômage le plus élevé chez les jeunes, qui est à mettre sur le compte de la corruption des pouvoirs publics. Une grande partie de ces jeunes vivent dans les bidonvilles des zones urbaines et périurbaines et sont congédiés car considérés comme des « bayaaye » (des voyous rebelles). Conscients que leur poids politique va s’agrandissant, ces jeunes ont récupéré ce terme péjoratif pour en faire leur identité politique, se décrivant comme des « sales jeunes du ghetto ». Ils font partie des soutiens ralliés à Wine.

Yoweri Museveni

Yoweri Museveni lors d’un rassemblement militaire. (Image : Screen capture)

En se faisant le porte-parole de ce sentiment d’aliénation, le Mouvement populaire a gagné beaucoup de terrain auprès des jeunes, y compris parmi les nantis. Les « bayaaye » sont donc passés de la frange vers le cœur et sont à même de remodeler les questions et les débats qui doivent avoir cours en Ouganda. Le Mouvement populaire rejette le NRM qui constitue selon lui « l’ordre ancien », déconnecté des nouvelles réalités, fondamentalement corrompu, violent et brutal ».

Lors de manifestations, les activistes de ce mouvement populaire se sont montrés moins craintifs face à la coercition étatique et font preuve à l’égard des autorités de plus de méfiance que les anciens. Cette tendance est d’abord apparue lors des élections de 2011 et s’est durcie avec le temps. Wine, qui fut lui-même sans-abri et a souffert du chômage, porte en lui cette dynamique. C’est dans les bidonvilles de Kampala qu’il a été reconnu en tant qu’artiste reggae, un genre qui plaît à un large public et qui a longtemps suscité la défiance en raison des thèmes qu’il affectionne, à savoir les classes populaires et la haine du système. Depuis 2016, le gouvernement ougandais a annulé plus de 100 concerts de Wine ainsi que d’autres artistes reggae. Par provocation, ils sont partis à l’étranger afin d’attirer l’attention de la communauté internationale sur leur sort.

En septembre 2018, Steven Marley, fils du regretté Bob Marley, qui a lui-même composé de nombreux morceaux en hommage aux mouvements anticoloniaux et anti-apartheid, et Morgan Heritage, lauréat d’un Grammy Award, ont composé une chanson dédiée à Bobi Wine, alors en détention pour faits de trahison. Elle est devenue virale en Ouganda et en Afrique de l’Est. Wine avait rendu visite à la famille Marley en Jamaïque en 2019 et en 2020, pays où il fut également reçu par Julius Garvey, fils du révéré fondateur du panafricanisme, le grand Marcus Garvey, et par le Premier ministre Andrew Holnes.

En mai 2020, un contemporain de Wine et de Marley, Buju Banton, a organisé un concert au Kenya afin de susciter chez les jeunes ougandais et les jeunes d’Afrique de l’Est l’envie de « reconquérir et redéfinir » la libération panafricaine et de se libérer des « traîtres » qui s’accrochent au pouvoir.

Bobi Wine and Buju Banton

Bobi Wine et Buju Banton en concert au Kenya en 2020. (Image : Buju Banton/Screen capture)

Museveni, patron officiel du panafricanisme et un temps disciple de Marcus Garvey, s’est retrouvé dans une situation embarrassante. Il a tenté de redorer son blason auprès des « bazukulu » (petits-enfants), un thème devenu récurrent dans ses apparitions publiques. « Personne n’a de leçon à me donner concernant les jeunes »,  dit-il souvent. Wine a contrattaqué par une série de messages. Pour lui, le président n’a pas l’autorité morale qui lui permettrait de se présenter comme un « grand-père » attentif, rappelant que selon la culture africaine il est tabou pour les grands-parents de faire du mal à leurs petits-enfants. Il fait ainsi directement référence au modus operandi des forces de sécurité de Museveni à l’égard des partisans du Mouvement populaire.

Pour redistribuer les cartes, Museveni a alors désigné un artiste reggae, ancien associé de Wine, comme conseiller présidentiel sur les « affaires du ghetto ». Il a ensuite recruté et soutenu de nombreux musiciens locaux, notamment les anciens amis de Wine, afin qu’ils composent des chants visant à louer et à mobiliser la jeunesse autour du NRM. Enfin, il est même allé jusqu’à sortir son propre single afin d’adresser un message à la jeunesse.

Mais la coercition n’a jamais été bien loin. Wine et les artistes africains sympathisants du Mouvement populaire sont interdits de concert en Ouganda. En décembre 2019, les autorités ougandaises ont expulsé une icône culturelle anti-apartheid sud-africaine et ambassadrice de bonne volonté de l’Union africaine, Yvonne Chaka Chaka, ce qui a suscité la consternation en Afrique du Sud et dans des cercles africains plus larges.

En 2018, elle a joint sa voix à celles d’autres Africains et Jamaïcains pour demander la libération de Bobi Wine et l’abandon des charges de trahison pesant sur lui. Elle l’a comparé à un « jeune Nelson Mandela » et a déclaré que les sud-Africains admiraient cette étoile montante. Lors de sa visite en Ouganda en décembre 2019, elle a renouvelé ses éloges à Wine, soutenant que « la vieille garde faisait erreur de bout en bout et qu’il ne fallait pas tromper la jeunesse ougandaise ». Elle fut expulsée le jour suivant.

Ralliement croissant des forces de sécurité

En tant que mouvement de libération nationale, l’armée ougandaise (People’s Defense Force (UPDF)) adopte des pratiques révolutionnaires qui brouillent les frontières entre le domaine civil et le domaine militaire. Elle se félicite néanmoins d’avoir atteint un certain niveau de professionnalisation dans sa transition vers une armée gouvernementale. L’espace politique s’étant restreint en Ouganda, la ligne est toutefois devenue également plus ténue entre l’ordre militaire et l’ordre politique. L’UPDF était restée quelque peu en retrait lors des élections de 1996. Cette situation a changé en 2001 lorsque le NRM a fait face à des dissensions internes dues au colonel en fonction Kizza Besigye. Le scrutin fut entaché par les démêlés entre la police et l’UPDF et ses partisans et les choses s’aggravèrent lorsqu’il fut accusé de fomenter une rébellion armée. Les tensions se sont intensifiées en 2006 et 2011 avec la désertion hors du NRM d’un nombre plus important de soldats et de civils de haut rang et l’influence grandissante de l’opposition.

En 2016, l’UPDF était largement utilisée comme le bras armé du NRM censé disperser les rassemblements, effectuer des descentes dans les bureaux de l’opposition et surveiller les candidats rivaux. Les déclarations politiques émanant de militaires ont toutefois rapidement été dénoncées par l’état-major, et le Chef des armées, le Général Katumba Wamala, avait d’ailleurs émis des consignes explicites à ce sujet, indiquant que « l’ensemble des soldats devraient s’abstenir de toute incursion politique ».

« J’ai entendu des personnes dire « on va manifester » … On va négocier, on va vous écraser ».

President Yoweri Museveni, July 2020

Lors des élections de 2020, des hauts gradés en plus grand nombre ont déclaré qu’ils n’obéiraient pas à des personnes extérieures au NRM. Bien que le porte-parole de l’armée ait réitéré la consigne d’une position apolitique de l’armée, les déclarations partisanes n’ont pas cessé. En août 2019, le général Kahinda Otafiire, ministre de la Justice et membre du haut commandement historique de l’UPDF, annonçait en effet que le slogan « le pouvoir du peuple » appartenait au NRM et qu’il le défendrait « en recourant à l’armée du peuple et à l’armée de l’air ».  Cette phrase fait écho à celle du général Peter Elwelu qui dirige les forces terrestres de l’UPDF et fait partie de l’état-major de l’armée, et qui a déclaré que si Wine et ses alliés parlementaires osaient entrer en guerre, l’armée n’hésiterait pas à donner l’assaut et à les « écraser sur-le-champ ». En décembre 2019,  le colonel en retraite Shaban Bantariza, à l’époque porte-parole adjoint du gouvernement, déclare de son côté : « Je plains les personnes qui pensent que le gouvernement NRM serait disposé à abandonner le pouvoir ». Peu après, le brigadier général Deus Mande, commandant de l’École des blindés, promit que l’UPDF ne permettrait jamais que Wine soit à sa tête. Cette promesse a été réitérée en janvier 2020 par le capitaine Sula Serunjogi, un ancien combattant titulaire de nombreuses décorations qui s’est adressé aux soldats lors de la marche africaine de Kwetu.

Après les manifestations de novembre 2020, le ministre de la Sécurité Elly Tumwine, membre du Conseil de la sécurité nationale et ancien commandant, a mis en garde : « la police est en droit de tirer sur les citoyens et de les tuer au-delà d’un certain niveau de décence ». Ces déclarations sont à l’image de certains messages de Museveni lui-même. En juillet 2020, il déclarait : « J’ai entendu des personnes dire « On va manifester ». … On vous attend, on va négocier, on va vous écraser ». Au mois d’août, il a traité d’idiots les partisans de Bobi Wine, leur interdisant de l’insulter. « Ils verront bientôt ce que veut dire NRM ; nous allons nous débarrasser de ces criminels et les policiers qui se montreraient indulgents [à leur égard] seront priés de trouver une nouvelle occupation ».

En réponse, le Mouvement populaire a fait circuler sur les réseaux sociaux une chanson de Bobi Wine adressée aux « Afande » (officiers) : « Vous nous combattez mais nous combattons pour vous … vous faites ces choses parce qu’on vous y oblige, mais vous restez humains. Toute situation qui nous oppresse vous oppresse aussi ».

Des institutions compromises

Entrance to Uganda's Electoral Commission

Entrée de la Commission électorale ougandaise.
(Photo : Uganda Electoral Commission)

La Commission électorale ougandaise, le seul organe autorisé par la loi à annoncer les résultats des élections, est largement perçue comme partisane. Le président de la cette commission, Simon Byabakama, a longtemps été un agent du NRM et représenta le ministère public dans l’affaire de viol de Kiiza Besigye en 2001, où les charges contre lui furent abandonnées par la justice. En 2020, Byabakama a refusé l’accès au vote à un million de nouveaux électeurs (des jeunes pour la plupart), mettant cette décision sur le compte d’un manque de temps ou de moyens pour les enregistrer, ce qui a suscité des critiques y compris au sein du parlement pourtant dominé par le NRM, qui y a vu un « horrible précédent ». La Commission n’a toutefois pas levé le petit doigt.

Le système judiciaire autrefois respecté de ce pays n’a cessé de reculer sous la pression de l’exécutif. Les tribunaux ont soutenu Museveni dans toutes les contestations sur la validité des opérations électorales depuis 2001, même si dans certains cas les motivations étaient des plus minces. La réputation de ce système fut encore davantage ternie en 2018 lorsque la Cour constitutionnelle approuva la suppression d’un âge limite pour les présidents, le dernier rempart contre ce que d’aucuns appellent une « présidence à vie ».

L’exécutif contrôle notamment la Judicial Service Commission (censément indépendante), l’ensemble des nominations des juges et le budget affecté au pouvoir judiciaire. En 2019, Museveni a désigné plus de juges qu’il ne l’avait fait depuis 1986. Sa longévité lui a permis de nommer l’ensemble des juges en poste en Ouganda.

Et après ?

Lorsqu’il prit ses fonctions en 1986, Museveni déclarait que les problèmes en Afrique venaient de ces dirigeants qui se cramponnent au pouvoir. Des années plus tard, son incapacité à quitter le pouvoir a semé l’instabilité dans un pays qu’il souhaitait pourtant libérer. Le processus de transition prévu dans la constitution de 1995 a été gelé, et la génération des dirigeants actuels semble déconnectée de son électorat.

Le processus électoral de 2021 est ainsi marqué par deux visions divergentes de l’avenir de l’Ouganda. Le NRM continue d’exercer un contrôle étroit sur les institutions en place, notamment sur les services de sécurité et sur le pouvoir judiciaire. Un nombre croissant d’Ougandais s’élèvent aujourd’hui contre la frustration ressentie, notamment chez les jeunes qui aspirent à un processus politique plus participatif, et s’expriment de plus en plus sur la corruption de l’État, sentant qu’ils ont peu à perdre. Le fait de s’opposer au NRM continue toutefois à être extrêmement risqué pour la sécurité physique et la santé mentale des dissidents, car le NRM en est venu à associer opposition politique, d’une part, et criminalité et instabilité, d’autre part.

Pour désamorcer ces tensions, il faudra des interlocuteurs indépendants de confiance, dans le pays et à l’étranger, susceptibles d’aider l’Ouganda à jeter les bases d’un nouveau départ. Pendant près de deux décennies, la société civile, les voix de l’opposition et les partenaires internationaux ont formulé des recommandations englobant un programme de réformes complet. Ces propositions fournissent un point de départ à partir duquel entamer un dialogue fécond et lancer un processus en faveur d’un pluralisme politique, sans perdre de vue la nécessité de combler le fossé intergénérationnel.


Ressources complémentaires