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Une mosaïque de groupes armés tire parti des effets de la crise au Congo

La crise politique en RDC a galvanisé et ressuscité bon nombre des 70 groupes armés actuellement actifs dans le pays, faisant du lien entre violence politique et sectaire par les milices armées un élément clé de l’instabilité politique de la RDC.


A militia patrol in the DRC.

Une patrouille de miliciens en RDC.

La légitimité du gouvernement de la République démocratique du Congo (RDC) dans ses régions périphériques a toujours été précaire.  Durant toute l’histoire du pays, l’opposition la plus véhémente à Kinshasa est souvent venue de ses provinces les plus éloignées, telles que le Kasaï, le Katanga et les Kivus. Aujourd’hui, cette ligne de fracture est exacerbée par la décision du président Joseph Kabila de suspendre les élections et de rester en fonction après la fin de son deuxième et dernier mandat en décembre 2016, une limite pourtant imposée par la constitution.

En plus des protestations déclenchées dans de nombreuses villes, la crise politique a ressuscité et galvanisé des milices et des groupes armés dans des régions qui entretiennent depuis longtemps des griefs à l’encontre du gouvernement central. Quelques insurgés ont ouvertement appelé le président à se retirer, même si leurs activités restent locales. D’autres ont élargi leurs attaques à des zones situées en dehors de leurs secteurs traditionnels d’activité dans le but évident d’exploiter l’aggravation des griefs.  D’autres ont concentré leurs attaques sur les installations et les employés du gouvernement, dont les bureaux des commissions électorales, déclarant que les préparations en vue de nouvelles élections sont dénuées de sens tant que Joseph Kabila demeure un éventuel candidat.

Au Congo, le lien entre violence sectaire et politique par les milices armées est un élément essentiel de l’instabilité politique. Tout cela se déroule dans un climat de corruption endémique, d’institutions faibles ou non-existantes et d’un manque de confiance entre les citoyens et le gouvernement. Les personnages animés de mauvais sentiments prospèrent dans un tel contexte. Cette étude expose certains types de violence pratiqués par les quelques 70 groupes armés actifs en RDC, au moment où l’incertitude et l’angoisse à propos des intentions de Joseph Kabila s’intensifient.

Kasaï

La région centre sud du Kasaï (d’une taille à peu près égale à celle de l’Allemagne) est un fief traditionnel de l’opposition et le lieu de résidence d’Étienne Tshisekedi, l’ancien chef de l’opposition aujourd’hui disparu, plus populairement connu sous le nom de « père de la démocratie congolaise ». C’est aussi, à bien des égards, un microcosme des conflits centre-périphérie qui ont empoisonné la RDC depuis son indépendance.

En l’absence d’autorité centrale, les chefs traditionnels ont joué un rôle vital dans l’histoire tumultueuse du Congo en arbitrant les conflits locaux, en maintenant la loi et l’ordre et en répartissant les ressources, terres comprises.  Ils exercent aussi des fonctions spirituelles. Les chefs traditionnels sont nommés selon les coutumes locales, puis reconnus par l’État. Pour conserver leur autorité, ils s’alignent souvent sur le régime, ce que Jean-Pierre Mpandi, toujours très critique à l’égard du parti au pouvoir, a refusé de faire.

Jean-Pierre Mpandi a été tué en août 2016 au cours d’un accrochage avec les forces de sécurité. Ses partisans ont lancé l’insurrection de Kamwina Nsapu en novembre.

En 2016, le gouvernement a refusé de le reconnaître comme le traditionnellement nommé Kamwina Nsapu – un titre accordé au chef héréditaire d’une chefferie qui couvre de grandes parties du Kasaï central et s’étend jusqu’en Angola – l’accusant de maintenir des liens étroits avec l’Union pour la démocratie et le progrès social d’Étienne Tshisekedi. Il a été tué en août 2016 au cours d’un accrochage avec les forces de sécurité. En novembre de la même année, ses partisans répondirent en lançant une insurrection appelée Kamwina Nsapu.  Ils rassemblèrent des sympathisants dans le but de débarrasser le Kasaï de tous les représentants du gouvernement central, une cause autrefois soutenue par le leader tué.  Ils se livrèrent à des attaques coordonnées et individuelles sur les commissariats de police, les installations militaires et les bureaux locaux de la Commission électorale indépendante (CENI).

Comme les autres groupes armés de la RDC, les combattants du Kamwina Nsapu accomplirent des rituels spirituels et prêtèrent serment pour forger la cohésion et décourager les défections.  Sans leader identifiable, leurs exigences demeurent ambigües. Toutefois, les rebelles ont exploité avec beaucoup d’astuce la crise politique actuelle pour susciter la fidélité. En février 2017, plusieurs combattants ont annoncé que la mise en œuvre de l’accord négocié entre l’opposition et le gouvernement par l’Église catholique était une revendication essentielle.

Toutefois, ils ont ensuite élargi leurs attaques aux églises et institutions catholiques. Ils ont également incendié 600 écoles et recruté de force des centaines d’enfants comme des boucliers humains. L’épisode de violence le plus meurtrier a eu lieu à la fin du mois de mars 2017 lorsque des rebelles du Kamwina Nsapu ont tendu une embuscade à un convoi de police et décapité une quarantaine de policiers. À la mi-mai, l’insurrection s’était étendue aux provinces voisines du Kasaï : Le Kasaï oriental, le Lomami et le Tanganyika.

Le gouvernement a établi une nouvelle zone militaire dans ces régions, mais ces soldats – qui sont mal payés, dirigés et formés – ont été accusés de faire usage d’une force disproportionnée. De plus, le gouvernement a fait venir la milice ethnique rivale Bana Mura pour appuyer les opérations de contre-insurrection du gouvernement. Bana Mura a été, à son tour, accusé de « détruire des villages entiers, de brûler, fusiller et tuer à l’arme blanche des villageois, dont des bébés et des jeunes enfants ». Selon les archives de l’Église catholique, plus de 3 000 civils ont été tués au Kasaï depuis le début de l’insurrection. Les Nations Unies ont fait état de 38 fosses communes et de violence généralisée contre les civils.

UN peacekeepers patrolling Tshimbulu, Kasaï-Central, on February 20, 2017, to promote dialogue in the region. Photo: Biliaminou Alao.

Des gardiens de la paix de l’ONU patrouillent à Tshimbulu, Kasaï-Central, el 20 fevrier 2017 pour promouvoir le dialogue dans la région. Photo: Biliaminou Alao.

Les combattants de la milice Bana Mura ont concentré leurs attaques principalement sur la communauté Lulua-Luba, qu’ils accusent de soutenir le Kamwina Nsapu. Les rebelles, pour leur part, ont aussi commis des atrocités innommables contre les civils perçus comme favorables au gouvernement central, un élément supplémentaire à ajouter au chaudron de la violence sectaire. Réagissant à la dégradation de la situation Zeid Ra’ad Al Hussein, le Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, a appelé la région du Kasaï « un paysage d’horreur ».

L’utilisation par le gouvernement de milices au Kasaï et dans d’autres points chauds pour étendre son influence contribue au cycle de la violence. Par ailleurs, cette tactique sape la légitimité du secteur de la sécurité et le respect pour l’état de droit.  De même, le soutien apporté aux rebelles par certains politiciens et hommes d’affaires locaux témoigne du mécontentement plus général de la région à l’égard du gouvernement central.

Katanga

Le manque de confiance entre Kinshasa et les régions éloignées est un facteur essentiel du conflit au Katanga, en RDC du sud, un autre fief important de l’opposition. Il s’agit de la plus riche province de la RDC, assurant 71 % des revenus du pays et 95 % de ses exportations. Peu après l’indépendance, le Katanga a été le lieu d’une campagne sécessionniste vigoureuse, mais finalement infructueuse, et fut plus tard le théâtre principal de la révolte qui aboutit au renversement de Mobutu Sese Seko. Les insurgés qui délogèrent Mobutu étaient dirigés par Laurent Kabila, le père katangais de l’actuel président. Une fois que Joseph Kabila prit les rênes du pouvoir, la région devint un bastion majeur du régime et l’intermédiaire essentiel pour obtenir une faveur.

 Le manque de confiance entre Kinshasa et les régions éloignées est un facteur essentiel du conflit au Katanga, en RDC du sud. 

Tout changea en 2015 lorsque, en plein milieu de la chute des exportations de minerai, les anciens fidèles de Kabila dans la région commencèrent à dénoncer les manœuvres du présidents pour empêcher la tenue des élections.  Le gouvernement réagit en implémentant soudainement un découpage— une politique en place depuis longtemps, mais jamais mise en œuvre — dont l’objectif était de faire passer le nombre de province de 11 à 26. Le Katanga fut divisé en quatre provinces, une décision hâtive et mal planifiée que les élites katangaises considérèrent comme une stratégie du diviser pour mieux régner. Le découpage aboutit au résultat contraire de celui prévu par Joseph Kabila. Loin de démolir l’opposition, il eut pour effet d’accélérer l’éloignement du Katanga de Kinshasa.

Au fur et à mesure que le mécontentement se propageait, les craintes d’un retour de la violence, qui avait dévasté la région les années précédentes, redoublaient. L’un des groupes armés les plus susceptibles d’exploiter les tensions latentes est Maï Maï Kata Katanga (« séparons le Katanga »). Il s’intéresse ouvertement aux problèmes d’identité katangaise, notamment le sentiment profond d’aliénation à l’égard de l’administration centrale. Il est lié à des organisations sécessionnistes de moindre envergure, dont Maï Maï Gédéon (nommé d’après Gédéon Kyungu, qui commande également Maï Maï Kata Katanga) et Corak Kata Katanga (« Coordination pour une référendum sur l’autodétermination du Katanga »).

The "Triangle of Death" in Katanga province, DRC. Map data © 2017 Google.

Le «Triangle de la Mort» dans la province du Katanga, en RDC. Carte  données © 2017 Google.

Maï Maï Kata Katanga a acquis une certaine notoriété en 2013 lorsque les combattants prirent d’assaut Lubumbashi, la capitale du Katanga, et l’occupèrent pendant plusieurs heures avant de se rendre à une base de l’ONU.  Cette même année, l’ONU signalait que les violences entre Maï Maï Kata Katanga et les forces du gouvernement s’étaient étendues aux 22 territoires du Katanga et avaient provoqué le déplacement d’un demi-million de personnes. Au plus fort des combats vers la fin de 2013, les combattants du groupe restaient concentrés dans les parties nord du Katanga appelées le « triangle de la mort », où bon nombre d’entre eux se trouvent encore aujourd’hui, même si la violence a diminué. D’autres sont regroupés autour de Sakania, sur la frontière avec la Zambie. Même si les sécessionnistes du Katanga prétendent lutter contre l’exploitation de la région par Kinshasa, les enquêteurs de l’ONU ont découvert que certains d’entre eux sont en fait liés à des politiciens connus dont les positions sont alignées sur celles du gouvernement. De même qu’au Kasaï, le gouvernement se sert des milices dans sa campagne contre les opposants armés.

North and South Kivu, DRCEastern DRC

Les deux principales guerres du Congo (1996-1997 et 1998-2003) commencèrent dans l’est. La région abrite la vaste majorité des 70 groupes armés du pays qui poursuivent tous des objectifs nationaux et locaux variables.  La plupart d’entre eux sont de petite taille, comprenant moins de 200 combattants. Toutefois les ravages qu’ils ont causés pendant des décennies, particulièrement dans le Nord- et Sud-Kivu, ont fait du Congo oriental l’épicentre de la violence meurtrière et des crises humanitaires. Les Kivus, qui couvrent 67 000 km2 et ont des frontières communes avec le Burundi, le Rwanda, la Tanzanie et l’Ouganda, sont aussi des hauts lieux de l’activisme et du ressentiment antigouvernemental (le Nord-Kivu seul est quatre fois la taille de la Belgique).  La violence dans cette vaste région a pour origine un sentiment de marginalisation causé par l’attitude de Kinshasa (situé à plus de 1 500 km) à l’égard d’un certain nombre de griefs concernant l’attribution des ressources locales comme les terres, la représentation du gouvernement central et la fourniture de services sociaux.

Ces griefs ont des connotations ethniques profondes que les politiciens et les chefs de guerre manipulent pour servir leurs intérêts. Citons, par exemple, la citoyenneté des Banyamulenge (« le peuple de Mulenge ») qui a provoqué les violences les plus meurtrières en RDC.  Les Banyamulenge étaient à l’origine des éleveurs de bétail Tutsi qui émigrèrent vers la ville congolaise de Mulenge, il y a plus d’un siècle. Pendant les périodes d’instabilité extrême, les autorités congolaises ont remis en cause leur statut de citoyen et soutenu les milices locales contre eux. Les Banyamulenge et leurs alliés ethniques locaux ont à leur tour lancé plusieurs insurrections, dont l’une soutenue par le Rwanda, l’Ouganda et le Burundi, a plongé tout le pays dans une crise qui aboutit au renversement du gouvernement Mobutu en 1998.

Eastern DRC. Map © Google 2017.

La frontière orientale de la RDC. Carte © Google 2017.

Dernièrement, une série de tentatives ratées ayant pour but l’intégration des rebelles dans l’armée nationale a alimenté une nouvelle vague de violences. Elle commença par une mutinerie d’officiers Banyamulenge, en majorité, qui avaient auparavant lutté contre le gouvernement. Ce groupe – le M23 (Mouvement du 23 mars) – s’empara de Goma, la capitale du Nord-Kivu en novembre 2012 et progressa rapidement avant d’être finalement battu par l’armée congolaise et la brigade d’intervention de la force de l’ONU en novembre 2013.

Depuis cette date, le M23 a commencé à se regrouper et à se réorganiser, tirant parfois parti de la colère publique à l’encontre du gouvernement central. En juin 2016, des combats éclatèrent dans la ville de Kamina, située au centre sud, lorsque les forces de sécurité tentèrent d’empêcher d’anciens combattants du M23 de quitter un camp réservé aux combattants démobilisés.

Au même moment où ces affrontements avaient lieu, des milliers de personnes envahirent les rues manifestant dans tout le pays contre Joseph Kabila, y compris à Goma et Bukavu, la capitale du Sud-Kivu,  une autre poudrière d’activité rebelle. En juillet 2017, des affrontements éclatèrent dans les deux capitales provinciales entre les manifestants et la police. Les manifestants exigèrent que Joseph Kabila quitte ses fonctions et organisent des élections conformément à l’accord de décembre 2016 négocié par l’Église catholique.

Bien qu’il n’y ait pas de lien connu entre les militants politiques et les rebelles l’augmentation des manifestations dans ces foyers de ressentiment contre le gouvernement a créé une brèche qui a pu être exploitée par les groupes armées, comme le M23, qui cherchaient à se réinventer.

Nina Wilén de l’Université libre de Bruxelles explique, « Même si les anciens rebelles du M23 n’ont aucun motif avoué de réformer leur groupe, le fait que Kabila reste accroché au pouvoir facilite pour eux le recrutement de nouveaux membres au Congo et légitime leur existence ».

Le retour du M23 pourrait engendrer de nouvelles violences sectaires et provoquer plus de divisions dans un environnement politique déjà tendu. Le mouvement dirigé par les Tutsi est actuellement en direct conflit avec les milices régionales et locales Hutu, dont la plus puissante se trouve être les Forces démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR). Composées de 1 000 à 1 500 personnes, les FDLR ont été créées par d’anciens membres de l’Interahamwe et des forces armées rwandaises responsables du génocide de 1994 contre les Tutsi rwandais. Ses attaques couvrent une grande partie des Nord- et Sud-Kivus.   En outre, le groupe est lié à d’autres milices Hutu et à des agents de l’administration locale.  Le M23 et les FDLR ont été accusés de crimes de guerre généralisés en RDC, y compris de massacres ciblant des groupes ethniques rivaux, de viols collectifs et de recrutement forcé des enfants. Jean Bosco Ntaganda, l’ancien commandant du M23, est actuellement jugé par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre. La CPI a délivré un mandat d’arrêt contre Sylvestre Mudacumura, commandant des FDLR, sur la base d’accusations similaires.

Milices Maï Maï

Un nombre significatif de groupes armés congolais se sont organisés dans tout le pays sous l’appellation de Maï Maï, un terme qui signifie « résistance contre tout programme extérieur », considéré comme une entrave au bon fonctionnement des communautés indigènes. Mais le concept prend souvent des significations politiques et culturelles différentes en fonction des contextes locaux et nationaux. Pendant la Seconde guerre congolaise, les milices locales ont été déployées dans l’est pour combattre les incursions des troupes ougandaises, burundiennes et rwandaises qui s’identifiaient en tant que nationalistes congolais Maï Maï.

Même si de nombreux groupes Maï Maï conservent une identité nationaliste – le plus souvent en opposition aux communautés immigrantes et aux Rwandais ethniques – la vaste majorité fonctionne comme des franchises avec des programmes allant du contrôle des ressources à l’extorsion, en passant par l’imposition illégale et le banditisme. Certains même fonctionnent comme des sectes religieuses, tandis que d’autres opèrent comme des milices privées servant des intérêts politiques et commerciaux. D’autres encore s’attachent à protéger leurs territoires des Maï Maï rivaux.

Female fighters from a Mai Mai group in North Kivu, DRC. Photo: Matchbox Media Collective.

Des combattantes d’un groupe Mai Mai au Nord Kivu, en RDC. Photo: Matchbox Media Collective.

Certains des groupes Maï Maï plus importants se situent dans une perspective explicitement politique, et sont par conséquent plus susceptibles d’exploiter la crise entre Joseph Kabila et ses opposants pour attiser davantage de violence. Les Patriotes résistants congolais (PARECO-Mai Mai) et l’Alliance des patriotes pour un Congo libre et souverain (Maï Maï APCLS) se sont efforcés de devenir des parties politiques, mais ont finalement abandonné leurs tentatives. De même, Maï Maï Kifuafua a abandonné tout effort d’intégration dans l’armée et est revenu à ses positions au Nord-Kivu, où il opère depuis 2009.

Maï Maï Nyatura (« frappe-les fort ») cible les communautés Tutsi au Nord-Kivu en coordination avec les FDLR. En réponse, les communautés Tutsi et leurs alliés ethniques ont formé le Raia Mutomboki (« citoyens indignés ») en tant qu’unité d’autodéfense. En 2014, Raia Mutomboki s’était transformé en une série de milices déployées sur une bande de territoire de la taille de la Belgique aux Nord- et Sud-Kivus et dans des parties du district d’Ituri au nord-est.

Bunia, la capitale du district d’Ituri, a assisté aux scènes de violence les plus meurtrières qui soient pendant la Deuxième guerre du Congo, opposant les bergers Hema aux fermiers Lendu.  L’opération Artémis de l’Union européenne, une opération d’imposition de la paix, a étouffé la violence, entraînant le démantèlement de l’Union des patriotes congolais dominée par les Hema et le Front des nationalistes et intégrationnistes dominé par les Lendu. Les deux groupes ont ensuite adhéré au processus politique. Toutefois, la Résistance patriotique dominée par les Lendu d’Ituri a rejeté l’intégration et reste active. Bunia est maintenant l’épicentre des protestations contre le report des élections présidentielles. En janvier 2017, la Résistance patriotique a lancé une série d’attaques contre les installations de la CENI et  a intensifié son processus de recrutement à Bunia et dans les environs.

Bunia, Ituri province, DRC. Photo: Dans.

Bunia, province de l’Ituri, RDC. Photo: Dans.

Effondrement

Au Congo, le cercle vicieux de mauvaise gestion politique, de griefs généralisés et de violence sectaire menace une nouvelle fois de déchirer le pays. Sans accord politique en vue, l’incertitude crée des conditions favorables à la croissance et à l’expansion de nouvelles insurrections et redonne vie aux anciennes insurrections.

L’utilisation des milices par le gouvernement pour attaquer les insurgés semble créer un chaos plus profond, tout en affaiblissant la crédibilité gouvernementale.

Inactif pendant des décennies, le mouvement sécessionniste cultiste Bundu Dia Kongo a refait surface au début de 2017. En mai, il attaqua la prison de haute sécurité de Kinshasa et libéra 4 200 détenus, dont des criminels endurcis et des personnes suspectées de crimes de guerre. Il libéra également leur leader incarcéré et mis le feu à certaines parties de la prison, dans ce qui est considéré comme l’attaque de prison la plus importante et la plus hardie de toute l’histoire de la RDC. Comme le Kamwina Nsapu, il est un mélange de mysticisme et de populisme avec un puissant message politique anti-Kabila.

Certains de ces groupes armés ciblent leurs attaques sur l’infrastructure électorale – communément perçue comme une manifestation de colère au refus de Kabila de mettre en œuvre l’accord politique de décembre 2016. Au Sud-Kivu, les groupes armés, dont Raia Mutomboki et Nyatura, ont attaqué les centres d’inscription des électeurs. En janvier 2017, les combattants de Maï Maï Gédéon ont attaqué des sympathisants présumés des FDLR pour les empêcher de s’inscrire sur les listes électorales. Ils ont également enlevé les agents de la CENI. Des violences ciblées contre les inscriptions d’électeurs se sont également produites dans les régions d’Ituri, du Nord-Kivu et du Tanganyika.

L’utilisation des milices par le gouvernement pour attaquer les insurgés semble créer un chaos plus profond, tout en affaiblissant la crédibilité gouvernementale. En conséquence, le renforcement de la légitimité politique et l’adhésion à la constitution sont essentiels pour tenter de reconquérir le soutien de la périphérie et convaincre les groupes armés de déposer les armes.