Lors des crises politiques précédentes en RDC, les acteurs internationaux et africains ont parfois été d’influence modérée et dans d’autres cas ont intensifié le problème. Quel est actuellement leur rôle ?
Le 19 décembre 2016 aurait dû être le dernier jour de Joseph Kabila au pouvoir en République démocratique du Congo, dans le cadre du premier transfert de pouvoir démocratique du pays depuis son indépendance en 1960. Le lendemain, alors qu’il refusait de quitter le pouvoir, au moins 34 protestataires ont été tués par les forces de sécurité. Le 26 décembre, des civiles ont trouvé la mort dans un massacre de la province est du Nord Kivu, faisant craindre que la crise pourrait encore aggraver la situation d’insécurité.
Redoutant de voir se propager violence et instabilité suite au refus de Kabila de quitter ses fonctions, la Conférence des évêques catholiques de RDC a conclu un accord le 31 décembre pour établir un gouvernement de transition, dirigé par un premier ministre à nommer par l’opposition. Conformément à cet accord, Joseph Kabila resterait président jusqu’aux élections de fin 2017. Il ne serait pas autorisé à se présenter pour un troisième mandat. L’accord restaurait aussi au premier ministre les pouvoirs accordés par la Constitution de 2006 – un contrôle important sur le pouvoir présidentiel. Kabila n’a pas encore signé l’accord et ne l’a pas mentionné dans son discours du Nouvel an. Compte tenu des manœuvres utilisées par Kabila pour prolonger son mandat, le scepticisme règne sur ses intentions de signer l’accord. Le premier ministre en poste actuellement, Samy Badibanga, a publiquement rejeté l’accord et l’a jugé « inapte ».
Les actions des acteurs africains et internationaux seront essentielles afin que les parties tiennent leurs engagements en vertu du nouvel accord. Les expériences antérieures ont prouvé qu’un engagement externe, à la fois ponctuel et coordonné, avait eu un effet modérateur et posé les bases de négociations. Par contraste, une participation internationale non coordonnée ou détachée a engendré de nouvelles escalades. La leçon est absolument vitale, compte tenu de la difficulté inhérente à mettre en place des accords de paix dans un environnement de méfiance entre les parties.
Des antécédents d’engagements mitigés
Les élections démocratiques multipartites de la RDC de 2006 – les premières depuis le régime autoritaire de Mobutu Sese Seko – ont marqué le point culminant dans l’engagement étranger dans les affaires du pays. L’Afrique du Sud, en tant que médiateur du Dialogue inter-congolais qui a amené une transition démocratique après deux guerres civiles dévastatrices, a dirigé une robuste initiative africaine de créer un climat électoral propice, prêtant notamment son équipement électoral à l’organe congolais de gestion des élections. La Communauté de développement d’Afrique australe (CDAA), l’Union africaine (UA), l’Union européenne (UE) et les Nations Unies (NU) ont œuvré de manière organisée pour soutenir le processus. La gestion des aspects techniques et logistiques du vote, la fourniture de sécurité aux bureaux de vote et la médiation de conflits sur les élections ont nécessité des interventions clés.
Par contraste, l’engagement externe dans les élections chaotiques, violentes et entachées de fraude de 2011 a été minime. Selon le chercheur congolais Mvemba Dizolele, cette approche « de non-intervention » et « ad-hoc » était menée par une étroite concentration sur la stabilité et la sécurité au dépend d’une concentration plus avertie et à plus long terme sur la stabilité obtenue par des politiques intrusives, comme l’exige le droit congolais, et par divers instruments de l’UA, tels que la Charte sur la démocratie, les élections et la gouvernance. La crise actuelle est l’héritage du processus de 2011. Dans le processus, la légitimité de Joseph Kabila a été fortement affaiblie, le consensus politique s’est dissipé et les opposants ont fui en exile.
La Communauté de développement d’Afrique australe
L’influence de la CDAA sur la RDC découle de plusieurs décennies d’engagement en matière de sécurité et de diplomatie régionale. À deux reprises, la CDAA est intervenue à des fins de stabilisation. La première fois en 1998, lorsqu’elle a invoqué la sécurité collective en autorisant l’intervention par l’Angola, la Namibie et le Zimbabwe pour combattre une invasion rwandaise et ougandaise qui avait atteint Kinshasa. La seconde fois en 2003, lorsque la CDAA a laissé une force résiduelle pour garantir la défense du pays et créer le secteur de la sécurité de la RDC après la guerre. Pour respecter cet engagement, en 2013 la DCAA a déployé la Brigade d’intervention, constituée de troupes du Malawi, d’Afrique du Sud et de Tanzanie, pour neutraliser les rebelles M23 dans l’est de la RDC.
L’efficacité de la SADC dépendra du fait que ses efforts soient employés de manière impartiale et d’une manière qui relie l’intérêt de sécurité de la SADC à la stabilité et à un processus démocratique inclusif.
L’Organe de défense de la politique et de sécurité de la CDAA (Troika), organe chargé de superviser les questions de sécurité en Afrique australe, dirige l’engagement de la CDAA en RDC. Le 28 juin 2016, les chefs d’État de ses membres, à savoir l’Angola, le Botswana, le Mozambique, le Swaziland, l’Afrique du Sud, la Tanzanie et le Zimbabwe, se sont réunis pour s’entretenir de la situation de sécurité dans la région. Des discussions sur la crise en DRC ont suivi début octobre puis une équipe ministérielle a été déployée pour accélérer l’inscription électorale et renforcer la médiation de l’UA. Ces initiatives n’ont cependant donné aucun résultat. Le 18 octobre, l’UA a négocié une entente sur un gouvernement transitoire et un nouvel agenda pour des élections en 2018, sans inclure la principale coalition d’opposition, le Rassemblement. L’Église catholique s’est retirée des négociations, citant l’exclusion du Rassemblement et pour protester contre les violentes répressions du gouvernement envers les activistes politiques ayant causé la mort de 50 personnes en septembre. La CDAA a été critiquée pour son soutien à cette entente partielle, une décision qui, selon certains, était contraire à sa réputation d’institution impartiale et d’acteur fortement influant remontant à sa gestion du Dialogue inter-congolais.
L’Union africaine et la Conférence internationale sur la Région des Grands Lacs
At the DRC’s request, the AU, in January 2016, dispatched ex-Togolese Prime Minister Edem Kodjo to mediate the crisis, with the backing of SADC and the International Conference on the Great Lakes Region (IGCLR). The EU deployed a support team to work with Kodjo, as did the international body, la Francophonie. The AU and IGCLR joined SADC in endorsing the deal reached in October that excluded most of the opposition, while the EU released a statement criticizing the process. The rift among key African and international actors has undermined efforts to present a united front necessary for an inclusive settlement. Ultimately, the endorsement by the AU, SADC, and IGCLR secured regional backing for Kabila, thus giving him no incentive to abide by the Constitution’s term limits and step down.
Les Nations Unies et l’Union européenne
Le mandat de la mission de maintien de la paix de l’ONU, la MONUSCO, a été renouvelé jusqu’en mars 2017 afin de protéger les civiles et créer un environnement propice aux élections. La mission offre un support technique et logistique en révisant le registre électoral et en soutenant les initiatives africaines et internationales. Côté diplomatie, les représentants spéciaux de l’ONU, Maman Sambo Sidikou et Sambo Sidikou, coordonnent les efforts multilatéraux. Toutes ces initiatives sont menées dans un climat de méfiance grandissante. Le Gouvernement de RDC a insisté pour que soit réduit de moitié la force de 20 000 éléments de la MONUSCO, prétextant son opposition à l’influence du calendrier électoral par des forces externes. Ceci remet aussi en question l’avenir des opérations conjointes actuelles par l’ONU et des forces congolaises dans la région est volatile de la RDC, et amoindrit l’efficacité d’une intervention internationale coordonnée.
L’importante pression morale et l’influence politique de l’Église catholique en RDC ont été primordiales pour amener Kabila et les principaux groupes d’opposition à la discussion, et seront essentielles pour leur faire respecter leur engagement. Compte tenu de cette unique position d’influence, le soutien africain et international concerté aux efforts de l’Église pourraient créer les possibilités pour une avancée. Les leçons tirées de l’engagement africain et international au cours des élections de 2006 montrent que l’unité de ces efforts peut aider à concrétiser une issue démocratique. Il convient pour cela que l’UA, la DCAA, la CIRGLE, l’UN et l’UE œuvrent conjointement pour assurer l’engagement des parties.
Recalibrer l’engagement externe
L’importante pression morale et l’influence politique de l’Église catholique en RDC ont été primordiales pour amener Kabila et les principaux groupes d’opposition à la discussion, et seront essentielles pour leur faire respecter leur engagement. Compte tenu de cette unique position d’influence, le soutien africain et international concerté aux efforts de l’Église pourraient créer les possibilités pour une avancée. Les leçons tirées de l’engagement africain et international au cours des élections de 2006 montrent que l’unité de ces efforts peut aider à concrétiser une issue démocratique. Il convient pour cela que l’UA, la DCAA, la CIRGLE, l’UN et l’UE œuvrent conjointement pour assurer l’engagement des parties.
Le rôle de la DCAA est critique, compte tenu de sa mémoire institutionnelle, son influence auprès du gouvernement congolais et son rôle auprès de la RDC. La Tanzanie, en tant que président de la Troika de la DCAA, et l’Angola, en sa capacité de président de la CIRGLE, peuvent stimuler le soutien coordonné à la médiation par l’Église. Toutefois, l’efficacité de la DCAA dépendra de plusieurs facteurs : si les efforts sont employés équitablement et de manière à ce que les solides intérêts de sécurité en matière de stabilité de la DCAA soient liés au processus démocratique inclusif.
Le rôle des acteurs régionaux et internationaux en matière d’atténuation de l’embrasement régional sera également vital, étant donné les antécédents de crises transfrontalières de la région. En 2013, l’UA a négocié un pacte de sécurité entre la RDC et ses voisins comprenant des engagements contre l’introduction de forces hostiles ou le soutien de mandataires en RDC. Ce pacte devrait être invoqué alors que les Congolais continuent de traverser la crise politique actuelle.
Cet article est le cinquième d’une série qui analyse les défis en cours auxquels se trouve confronté le processus démocratique en République démocratique du Congo, et comment les divers acteurs et institutions structureront l’issue finale.
1ère Partie: Drame en perspective en République démocratique du Congo
2ème Partie: Les institutions de contrôle de la RDC : Quel degré d’indépendance ?
3ème Partie: Le rôle de la société civile dans la prévention de l’instabilité en RDC
4ème Partie: Les institutions du secteur de la sécurité et la crise politique de la RDC
5ème Partie: Le rôle des acteurs externes dans la crise de la RDC
Experts du CESA
- Dorina Bekoe, Professeure associée Spécialisée dans la prévention, l’atténuation et la résolution des conflits
- Joseph Siegle, Directeur de la recherche
- Godfrey Musila, Chercheur
En plus: Coopération régionale et internationale en matière de sécurité gouvernance République démocratique du Congo