
National Defence University–Kenya. (Photo : NDU-K)
Depuis l’indépendance, le Kenya s’est employé à créer une culture de professionnalisme militaire au sein de ses forces armées. Ce processus s’est accompagné d’efforts continus pour améliorer son système d’éducation militaire professionnelle. Il a également été soutenu par l’engagement actif du Parlement kenyan et par les dispositions adoptées dans la Constitution du Kenya de 2010.
Si la voie suivie par chaque pays pour établir le professionnalisme militaire est unique, les efforts déployés par le Kenya pour inculquer et renforcer une culture du professionnalisme militaire sont riches d’enseignements qui pourraient être appliqués dans d’autres pays.
Pour mieux comprendre l’expérience du Kenya, le Centre d’études stratégiques de l’Afrique s’est entretenu avec plusieurs officiers kenyans, anciens et actuels, afin de connaître leur point de vue sur l’évolution de la culture du professionnalisme militaire au sein des forces de défense kenyanes :
- Général (à la retraite) Robert Kibochi, ancien chef des forces de défense (mai 2020 – avril 2023)
- Lieutenant général (à la retraite) Njuki Mwaniki, ancien chef de l’armée (novembre 2010 – juillet 2011)
- Colonel James Kirumba, ancien stagiaire à la National Defense University à Washington, DC (août 2023 — juin 2024)
Le texte qui suit est une synthèse de ces conversations.
L’émergence d’une culture deu professionnalisme militaire au Kenya
L’instauration d’une culture de professionnalisme militaire est un objectif prioritaire depuis l’indépendance du Kenya du Royaume-Uni en 1963.

Des soldats de l’armee de l’air du Kenya discutent lors d’une formation. (Photo : DVIDS)
« La Force de défense du Kenya (KDF) a développé cette culture du professionnalisme dès le lendemain de l’indépendance », a expliqué le général Kibochi. « Nous avons bénéficié d’un solide héritage institutionnel qui nous a permis de créer les Forces armées du Kenya (KAF). De nombreux jeunes officiers en devenir ont été formés dans des établissements d’enseignement militaire professionnel à l’étranger. Et cette fondation a facilité la transmission, de génération en génération, de cette culture du professionnalisme militaire ».
Le général Mwaniki s’est fait l’écho de ce point de vue, notant que « la culture du professionnalisme militaire au Kenya a émergé parallèlement à celle de notre république », de la période précoloniale à l’ère coloniale, puis à l’indépendance. Depuis l’indépendance, a-t-il indiqué, l’histoire de la KAF peut être divisée en deux périodes, la première de 1963 à 2010, et la seconde lorsqu’une nouvelle constitution a été adoptée et que la KAF est devenue la KDF.
Le général Kibochi a mis l’accent sur la culture de la KDF qui consiste à transmettre la valeur du leadership d’une génération à l’autre. « Tout est basé sur le leadership. La formation au leadership a été le fondement de cette culture professionnelle au sein de la KDF. Chaque génération de dirigeants augmente le niveau de professionnalisme qu’elle avait au départ. Nous appelons cela un héritage partagé – un héritage partagé selon lequel ce qui a été commencé par mon prédécesseur, je le développe et, lorsque je quitte mon poste, quelqu’un d’autre le reprend et continue ».
Les généraux Mwaniki et Kibochi ont tout particulièrement salué les réformes et l’héritage du général Daudi Tonje, qui a occupé le poste de chef des forces de défense de 1996 à 2000. Le général Tonje a créé l’École d’état-major de la défense ainsi que le régime d’assurance médicale des forces armées. Il est également à l’origine de l’obligation faite aux élèves de l’académie militaire d’obtenir un diplôme universitaire avant de recevoir leur commission. Enfin, le général Tonje est l’initiateur du processus d’intégration des femmes dans les forces armées.
Les piliers du professionnalisme militaire au Kenya
Le professionnalisme militaire au sein de la KDF repose sur trois piliers, selon le général Mwaniki. « Le premier est le développement du caractère, le deuxième est la puissance de combat et le dernier est la formation militaire professionnelle.
Le développement du caractère est le fondement de tout ce qu’une armée professionnelle cherche à accomplir.
« Le développement du caractère est le fondement de tout ce qu’une armée professionnelle cherche à accomplir. C’est le pilier moral et éthique du professionnalisme. C’est la capacité de faire ce qui est juste en tant qu’individu et en tant que groupe. Il est correctement décrit par le mot « intégrité ». L’intégrité a deux significations. Le premier sens est le sens moral : faire la différence entre le bien et le mal. Pour nous, dans l’armée kényane, ce qui est bien, c’est ce qui figure dans la constitution du Kenya. Ce qui mal, c’est d’agir en dehors de l’autorité constitutionnelle.
Le deuxième sens du mot « intégrité » est dérivé du mot « intéger », c’est-à-dire ce qui entier ou la totalité. L’unité, la camaraderie, la communion, l’esprit de corps et la fraternité sont indispensables à une force nationale. La transparence, l’honnêteté et le sérieux dont vous faites preuve l’un envers l’autre catalysent la confiance mutuelle. Par conséquent, le premier sens du mot « intégrité » détermine le deuxième. Plus nous sommes honnêtes les uns envers les autres, plus la camaraderie est grande et plus le moral de l’unité est élevé. Notre unité opérationnelle découle également de cette notion d’« intégrité ». La capacité à faire ce qui est bien en tant qu’individu et en tant que groupe est ancrée dans le respect de la nation et de ses lois. Il s’agit de la structure fondamentale de la profession.
« Le deuxième pilier est la puissance de combat, c’est-à-dire le besoin et la capacité de combattre. Elle comprend, entre autres, la main-d’œuvre, la formation, la performance collective et la durabilité ».
Le troisième pilier, la formation professionnelle, nourrit le cadre de pensée dans lequel vous travaillez. Ce point est important, car il fournit la justification théorique de la pertinence et de l’emploi des forces. Le pilier éducatif donne aux commandants la capacité de comprendre le contexte et la vision du monde dans lesquels ils opèrent, et sert de base à l’exercice de la créativité, de l’ingéniosité et de l’initiative dans des situations complexes ».
Contrôle démocratique de l’armée
La Constitution de 2010 a défini les citoyens kényans comme l’autorité souveraine où repose tout le pouvoir.
Les officiers ont tous souligné l’importance de la Constitution de 2010, qui définit les citoyens kényans comme l’autorité souveraine sur laquelle reposent tous les pouvoirs. À cet égard, la Constitution définit le rôle de la KDF et le cadre du contrôle démocratique du secteur de la sécurité. Ils ont souligné la nécessité de veiller à ce que l’ensemble des forces armées comprennent ce que ce rôle signifie dans la pratique, ainsi que les conséquences du non-respect des valeurs et des normes inscrites dans la Constitution.
« L’allégeance à la constitution, la subordination à l’autorité civile démocratique, la neutralité politique et le respect de l’État de droit ont été inculqués au point d’être visibles à tous égards », a expliqué le général Kibochi. « Lorsque l’on parle de respect de l’État de droit, c’est quelque chose qui est bien compris par les forces armées. Si quelqu’un va à l’encontre de cela, il doit payer de lourdes sanctions. L’apolitisme, par exemple, est une chose très importante. Et si quelqu’un manque ce train, vous perdez votre commission ou vous êtes licencié avec effet immédiat. Cela permet de conserver la neutralité qui est si importante dans un environnement démocratique ».
Le rôle de l’éducation militaire professionnelle dans la transmission des valeurs
Les officiers ont tous souligné le rôle des institutions de formation militaire professionnelle dans la transmission et le maintien de ces valeurs. Selon le général Kibochi, ces écoles sont « la base de l’inculcation des valeurs du professionnalisme militaire, notamment en termes de subordination à l’autorité civile démocratiquement élue et d’allégeance à la constitution ». Quand nous parlons d’un sous-officier, d’un soldat ou d’un officier qui a prêté allégeance à la Constitution, c’est d’une importance critique. Comment expliquez-vous cela ? Vous l’expliquez par le biais d’institutions de formation afin qu’ils puissent comprendre ce qu’est exactement cette constitution. « Et comment puis-je la respecter, la défendre, la protéger ? Et pourquoi devons-nous nous subordonner à l’autorité civile démocratique ? » Tout cela émane de la constitution. La neutralité politique — l’apolitisme — est l’une des valeurs les plus importantes de la KDF.
Le respect de l’État de droit est d’une importance capitale. Si vous le manquez à ce niveau initial, vous ne serez pas en mesure de vous rattraper dans les cours de développement à l’avenir.
« Ce respect doit être enseigné dans ces institutions de formation militaire professionnelle. Le respect de l’État de droit est d’une importance capitale. Les gens doivent le comprendre dès le départ. Surtout quand on pense aux recrues que nous recevons, des personnes en cours de conversion à la vie civile, venant de tout le pays, d’horizons différents. Vous devez essayer de les réunir en une entité cohésive capable de respecter ces valeurs. Ces institutions de formation constituent, à juste titre, la base de ce processus. C’est là que ces valeurs doivent être inculquées, depuis les élèves de l’académie militaire du Kenya jusqu’aux recrues enrôlées dans les écoles de formation. Si vous ratez cette étape à ce stade initial, vous ne serez pas en mesure de la rattraper lors des cours de perfectionnement à venir. »
Le colonel Kirumba a souligné que « ces valeurs sont enseignées de manière active et ne sont pas considérées comme acquises ». Cette inculcation des valeurs se poursuit tout au long de la carrière du soldat. Au sein de la KDF, les officiers supérieurs s’engagent régulièrement dans des programmes de développement professionnel qui inculquent les valeurs du professionnalisme militaire et créent des opportunités de développement du leadership parmi leurs subordonnés ».
Composition de la KDF et professionnalisme militaire
Tous les officiers se sont accordés à dire que la composition de la KDF est cruciale pour son professionnalisme. Le maintien de l’équilibre régional au sein des forces armées par le biais du principe d’inclusivité est exigé par la Constitution de 2010, depuis les niveaux les plus bas jusqu’aux chefs des différents services. Le général Mwaniki a d’ailleurs précisé : « Vous devez être très sensibles à l’arc-en-ciel, car nous sommes une nation arc-en-ciel. Vous devez promouvoir l’unité nationale et la protéger ».
« Le colonel Kirumba a expliqué que le recrutement s’étendait à toutes les tribus, à toutes les ethnies et à tous les sexes, mais qu’en mettant en œuvre des pratiques de recrutement et de promotion fondées sur le mérite, les Forces de défense du Kenya bénéficiaient d’un professionnalisme, d’une intégrité et d’une efficacité accrus. Cette approche a permis d’établir un leadership militaire responsable, compétent et en phase avec les valeurs de toute la population qu’il sert ». À cette fin, la KDF a mis l’accent sur l’importance de normes de promotion claires afin que son professionnalisme s’améliore son au fil des ans.

Une ingénieure de l’armée kényane négocie avec des acteurs des forces militaires étrangères lors d’un exercice de formation aux affaires civiles sur le terrain.
Il existe également des quotas stricts fixant les ratios entre sous-officiers et soldats et entre officiers etsous-officiers. Le nombre d’officiers généraux au sein de la KDF est également limité. Ces lignes directrices permettent aux forces armées de rester peu nombreuses et efficaces. Le général Kibochi a également souligné l’importance de veiller à ce que les femmes soient dûment intégrées dans les forces armées, comme l’exige la Constitution.
Les institutions de formation militaire professionnelle et la National Defence University — Kenya
Les multiples institutions de formation militaire professionnelle du Kenya jouent un rôle essentiel dans le développement du professionnalisme des forces armées. Les premiers chefs militaires du pays ont joué un rôle clé dans la mise en place de ces institutions au Kenya. Il s’agit notamment d’obtenir les installations, telles que les terrains et les casernes, et de s’assurer qu’elles fonctionneront correctement et pourront éventuellement être agrandies. Ce processus a commencé avec le Armed Forces Training College en 1964 (qui est aujourd’hui l’Académie militaire du Kenya). Le Command Staff College (École d’état-major du Kenya) a ensuite été créé en 1982, le National Defence College (NDC) en 1997 et enfin la National Defence University (Université de la défense nationale du Kenya), qui a reçu sa charte en mai 2021 en tant qu’université spécialisée dans la formation, l’enseignement du commandement et la recherche en matière de sécurité et de stratégie de sécurité nationale.
La décision de créer une université de défense nationale au Kenya (NDU-K) a été prise en 2010/2011, et son ouverture officielle a eu lieu en 2022. Selon le général Kibochi, chef des forces de défense (CFD) lors de son ouverture, « la NDU-K affirme que la planification stratégique et la pensée critique sont la marque distinctive de l’art opératif et de la diplomatie », notamment grâce à la création de son Centre d’études stratégiques.
Alors que le Kenya avait depuis longtemps ouvert ses institutions de formation militaire professionnelle à des partenaires régionaux, notamment au sein de la Communauté d’Afrique de l’Est, le rôle croissant du Kenya dans les opérations internationales de soutien de la paix dans la région et sur le continent a servi de catalyseur pour rassembler ces institutions sous l’égide de la NDU.
L’école est devenue une exportatrice majeure de professionnalisme dans les missions de maintien de la paix à travers le continent.
Cela a permis de promouvoir le professionnalisme et les relations pacifiques, tant au niveau national qu’à l’échelle africaine. Le général Kibochi se souvient que, l’un de ses camarades de classe de l’École de défense ayant lui aussi accédé au poste de chef des forces de défense de son pays, leur relation collégiale a permis de relever les défis transfrontaliers de manière pacifique et professionnelle lorsqu’ils se sont présentés.
Compte tenu du rôle croissant du Kenya dans le maintien de la paix, la création du Centre international d’entraînement au soutien de la paix était essentielle pour la professionnalisation du maintien de la paix. Comme l’explique le général Kibochi, « le général Tonje estimait qu’on ne pouvait pas se réveiller un beau matin et envoyer un groupe de soldats assurer le maintien de la paix sans qu’ils aient suivi une formation professionnelle. Aujourd’hui, nous disposons de l’une des plus grandes institutions de formation au maintien de la paix du continent, qui forme non seulement l’armée, mais aussi la police et les civils. Elle est devenue une exportatrice majeure de professionnalisme dans les missions de maintien de la paix à travers le continent ».
Le rôle des écoles de sous-officiers
Selon le général Kibochi, « la marque de fabrique de toutes forces armées est le cadre des sous-officiers. C’est pourquoi la KDF a créé une académie de sous-officiers en étroite collaboration avec l’armée américaine. Si l’on développe la formation des officiers au détriment des sous-officiers, on se retrouve avec un déficit de connaissances. Étant donné que tous les officiers doivent obtenir un diplôme de l’Académie militaire du Kenya, si les sous-officiers n’obtiennent pas eux aussi un diplôme, il y a un déficit. Et ce déficit crée de nombreux défis lorsqu’il s’agit de comprendre un environnement opérationnel en pleine évolution ».
Soutenir les normes et les valeurs du professionnalisme
L’inculcation de normes se fait par le biais du leadership à tous les niveaux des forces armées. Le général Kibochi a déclaré : « Si l’on ne dispose pas d’un leadership adéquat à tous les niveaux — pas seulement au niveau supérieur, mais à tous les niveaux — il est très difficile de se professionnaliser. Parce que la professionnalisation implique que chaque leader, à tous les niveaux, doit être capable de perfectionner ses subordonnés. Ainsi, au fur et à mesure que les leaders se retirent, de nouveaux leaders ont été préparés pour combler le vide. Le leadership est la force qui assure la cohésion. Je pense que les défis commencent probablement par la formation de base que reçoivent les jeunes leaders, qu’il s’agisse d’élèves officiers ou d’élèves soldats ».
Selon le colonel Kirumba, un aspect important du professionnalisme de la KDF est son système de justice militaire robuste, car il est « chargé de garantir la discipline, la responsabilité et le respect des normes juridiques au sein du personnel militaire. » En s’attaquant aux comportements contraires à l’éthique et en appliquant les conséquences des actes répréhensibles, le système de justice militaire contribue à dissuader les futurs comportements répréhensibles et à maintenir des normes élevées de professionnalisme au sein des forces armées ».
Une surveillance civile efficace
Le général Mwaniki a fait remarquer que « le facteur le plus important [pour le professionnalisme] est l’équilibre des pouvoirs », notamment entre le parlement, la société civile et le secteur privé. « Les deux derniers sont particulièrement importants, car si le parlement représente le peuple, la société civile et le secteur privé sont composés des citoyens eux-mêmes, et leur rôle est donc crucial en termes de pertinence. »
Le général Kibochi a ajouté que « la surveillance parlementaire sur les questions de défense, y compris les besoins budgétaires, le recrutement et l’intégration des femmes dans les forces armées, est effectuée régulièrement ».

Formation des ingénieurs de combat des Forces de défense du Kenya. (Photo : DVIDS)
Outre l’organisation de programmes au NDC pour les parlementaires siégeant dans les commissions qui traitent de la défense et des relations extérieures, une autre façon de garantir une interaction étroite entre les officiers militaires en uniforme et les civils, selon le général Kibochi, est « de faire participer des civils aux institutions de formation militaire professionnelle, soit en tant que conférenciers invités qui viennent aborder les questions de démocratie et d’État de droit, soit en étant eux-mêmes aussi stagiaires dans ces institutions ». Au National Defence College, on se forme non seulement avec des officiers de la KDF, mais aussi avec des officiers de la police nationale, ainsi qu’avec des fonctionnaires de différents ministères.
« Lorsque vous vous entraînez ensemble, notamment en participant à des exercices au cours desquels les fonctionnaires s’exercent à la mise en œuvre de la stratégie de sécurité nationale, il est très facile de commencer à créer une culture de hauts responsables dans des environnements différents qui peuvent, ensemble, considérer l’intérêt national plutôt que l’intérêt institutionnel. Cela a très bien fonctionné puisqu’un certain nombre de professionnels civils ont suivi une formation au National Defence College ».
Le professionnalisme militaire facilite les approches pangouvernementales
« L’autre chose dont nous nous sommes rendu compte », a expliqué le général Kibochi, « c’est qu’en raison de l’évolution de l’environnement de la menace, la coopération interministérielle, cette approche pangouvernementale [est de plus en plus essentielle]. Une menace asymétrique ne peut jamais être combattue par une seule institution. Alors, comment institutionnaliser la coopération entre plusieurs ministères ? Au fil du temps, nous avons dû développer une stratégie interministérielle avec des approches bien définies pour entreprendre des opérations interministérielles. Nous disposons désormais d’une stratégie nationale de sécurité qui organise véritablement l’ensemble de ces stratégies et politiques. »
Mesurer le succès
Selon le général Kibochi, « le succès des forces de défense se mesure à l’aune de leurs leaders. Cela est d’autant plus vrai aujourd’hui que l’environnement opérationnel est très décentralisé. Quand on parle de guerre asymétrique, on ne parle pas d’une brigade qui doit partir se battre, on parle d’un jeune lieutenant qui est envoyé avec sa trentaine d’hommes et de femmes pour exécuter une tâche. Le succès de toute opération dépend du leadership au niveau le plus bas. Si ces jeunes soldats à ce niveau n’ont pas de caractère, il est évident que vous ne pourrez pas mener à bien votre mission.
Le succès de toute opération dépend de la direction du leadership au niveau le plus bas.
« Le professionnalisme militaire concerne les normes d’exécution des missions et des tâches confiées. Il est donc essentiel que nous formions des leaders de caractère depuis le niveau le plus bas jusqu’au niveau le plus élevé. Lorsque nous menions des opérations dans des pays comme la Somalie, j’ai visité certaines des bases d’opérations avancées pendant mon mandat de CFD. Et je trouvais un jeune commandant d’à peine 35 ans à la tête d’environ 200 hommes et femmes. Après les avoir écoutés, on sort de là très satisfait de savoir que, quoi qu’il arrive, ce jeune leader sera capable de mener à bien sa mission. Et grâce à la formation qu’il a reçue, il est sûr de pouvoir obtenir les résultats escomptés sans hésitation ».
Le colonel Kirumba a déclaré que « le fait que de nombreux pays envoient leurs militaires se former au Kenya est également un indicateur de réussite. Cette action et le fait que les diplômés des institutions de formation militaire professionnelle réussissent par la suite dans leur emploi sont de solides marqueurs de progrès ». Il a ajouté que « le fait que l’armée kényane ait été chargée de diriger d’importantes missions internationales, telles que la force régionale de la Communauté d’Afrique de l’Est en République démocratique du Congo et la Mission des Nations Unies en Haïti, constitue une reconnaissance supplémentaire de ce professionnalisme croissant ». Bien qu’il s’agisse encore d’un processus en évolution, la prochaine génération de leaders militaires du Kenya espère s’appuyer sur ces leçons pour améliorer encore l’efficacité de la KDF en tant que force professionnelle.
Ressources complémentaires
- Centre d’études stratégiques de l’Afrique, « La formation d’une culture de professionnalisme militaire au Sénégal », Éclairage, 6 décembre 2023.
- Dan Kuwali, « Améliorer la gouvernance du secteur de la sécurité en Afrique par le contrôle et la redevabilité », Bulletin de sécurité africaine n° 42, Centre d’études stratégiques de l’Afrique, septembre 2023.
- Centre d’études stratégiques de l’Afrique, « Le rôle des commissions parlementaires de défense et de sécurité dans la construction de secteurs de la sécurité redevables, professionnels et soutenables en Afrique », Éclairage, 3 avril 2023.
- Centre d’études stratégiques de l’Afrique, « Renforcer la culture du professionnalisme militaire en Afrique », Éclairage, 21 décembre 2022.
- Centre d’études stratégiques de l’Afrique, « Les établissements d’enseignement professionnel militaire en Afrique », Infographie, 11 mars 2022.
- Kwesi Aning et Joseph Siegle, « Évaluation des attitudes de la prochaine génération de professionnels du secteur de la sécurité en Afrique », Rapport d’analyse n° 7 du Centre d’études stratégiques de l’Afrique, mai 2019.
- Émile Ouédraogo, « Renforcer le professionnalisme militaire en Afrique », Rapport d’analyse n° 6 du Centre d’études stratégiques de l’Afrique, juillet 2014
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