Revue de presse du 25 octobre 2022

La diplomatie chinoise dans la Corne de l’Afrique – La médiation des conflits comme politique de pouvoir
La Chine a lancé les « Perspectives de paix et de développement dans la Corne de l’Afrique » en mars 2022 afin de faciliter un processus de paix mené par la Chine en Éthiopie et dans la Corne de l’Afrique. Depuis lors, l’envoyé spécial de la Chine dans la Corne de l’Afrique, Xue Bing, a effectué une série de visites éclair dans la région. La multiplication des activités diplomatiques de la Chine dans la Corne de l’Afrique a toutefois suscité des froncements de sourcils et un nombre croissant de préoccupations dans la région. Premièrement, il y a eu apparemment peu de coordination avec les initiatives de médiation existantes dirigées par des Africains. Il s’agit notamment du Bureau d’Olusegun Obasanjo, le Haut Représentant de l’Union africaine (UA) pour la Corne de l’Afrique, et d’institutions africaines telles que le Groupe des Sages, qui assure la médiation au nom du Conseil de paix et de sécurité de l’UA. On ne sait pas non plus comment la nouvelle initiative s’aligne sur l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), l’UA et les acteurs internationaux comme les Nations unies. Le lancement de l’initiative chinoise a donc déclenché une intense spéculation et une grande confusion dans la région. L’initiative est en outre considérée comme favorable au gouvernement éthiopien. Cela s’inscrit dans le cadre des objectifs de la Chine visant à renforcer les liens avec les dirigeants en place dans la région, dont beaucoup sont soumis à des pressions croissantes pour qu’ils démissionnent après avoir exercé plusieurs mandats extraconstitutionnels. Centre d’études stratégiques de l’Afrique

Un an après le coup d’Etat militaire au Soudan, le pays dans l’impasse
Il prétendait « rectifier le cours de la révolution ». Mais un an après le coup d’Etat du 25 octobre 2021 qui a fait dérailler la transition démocratique amorcée en 2019 après la chute de la dictature d’Omar Al-Bachir, le général Abdel Fattah Al-Bourhane n’est pas parvenu à consolider son pouvoir. Contestés dans la rue, les militaires, qui attribuaient, en 2021, la responsabilité de la détérioration de la situation au gouvernement mené par Abdallah Hamdok, doivent faire face à une profonde crise sociale. Le robinet de l’aide internationale s’est tari au lendemain du putsch. Plus de 4,6 milliards de dollars (4,7 milliards d’euros), prévus pour des projets dans l’énergie, l’agriculture ou la santé ainsi qu’un programme de soutien aux familles les plus pauvres, ont été gelés. Pour se financer, les autorités ont décidé d’augmenter drastiquement les taxes. Une hausse du coût de la vie aggravé par la flambée mondiale des prix alimentaires et de l’énergie provoquée par la guerre en Ukraine. Le Monde

Des milliers de Soudanais dans la rue pour le 1er anniversaire du putsch
Des milliers de Soudanais sont descendus dans la rue mardi pour marquer le 1er anniversaire du putsch et réclamer un gouvernement civil, bravant la coupure d’internet et un déploiement militaire massif. « Les militaires à la caserne », a crié la foule à Khartoum et dans ses banlieues, où toutes les routes ont été bloquées. Car dès l’aube, les deux camps se sont activés: les manifestants ont érigé des barricades pour ralentir l’avancée des forces de sécurité, et celles-ci ont bloqué ponts et avenues pour empêcher un déferlement de protestataires vers le palais présidentiel où siège le général Abdel Fattah al-Burhane, l’auteur du coup d’Etat du 25 octobre 2021. Depuis ce jour, manifestants et militants répètent le même mot d’ordre: « pas de négociation ni de partenariat avec les putschistes » et retour au pouvoir des civils, condition sine qua non pour la reprise de l’aide internationale interrompue en rétorsion au putsch. AFP

Forum de Dakar : l’Afrique face aux défis de stabilité et souveraineté
Depuis la crise de la pandémie de Covid-19, et surtout le choc de la guerre russe en Ukraine, le monde entier est confronté à la question de la souveraineté, cependant, l’Afrique est peut-être le continent où les débats sur cette question ont été le plus pressants, notamment en ce qui concerne la dépendance dans laquelle se trouve le continent africain vis-à-vis des questions alimentaires, sanitaires ou énergétiques. Mais la question de la souveraineté du continent se pose également au niveau politique et sécuritaire. Dans ce sillage, les organisateurs du Forum international de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique qui s’ouvre dans la capitale sénégalaise ce lundi 24 octobre ont décidé de placer au cœur de leurs échanges cette thématique dont les dirigeants se sont emparés avec force ces dernières années. L’édition 2022 du forum a pour thème « l’Afrique à l’épreuve des chocs exogènes : défis de stabilité et de souveraineté ». Le Point avec AFP

Manifestations au Tchad: la communauté d’Afrique centrale se retrouve à Kinshasa
Alors que le Tchad se récupère de la répression meurtrière des manifestations, Kinshasa accueille mardi 25 octobre un sommet de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) sur la situation politique dans le pays. 11 pays seront représentés à ces assises en présentiel convoquées par Félix Tshisekedi, actuel président l’organisation. Alors que Ndjamena veut obtenir le soutien de la CEEAC, celle-ci cherche surtout à désigner un médiateur pour la crise. … Les débats seront alimentés par le rapport de mission du président de la Commission de la CEEAC, l’Angolais Gilberto da Piedade Verissimo, qui a été dépêché à Ndjamena au cours du week-end, pour constater ce qui s’est passé et écouter certains acteurs. À Kinshasa, il sera ainsi question d’analyser le rapport de la mission pour avoir une vue globale de la situation avant d’agir. D’ores et déjà, dans son communiqué du 21 octobre, Gilberto da Piedade Verissimo a appelé les acteurs politiques et sociaux tchadiens à faire preuve de la plus grande retenue et de privilégier les modes pacifiques de résolution des différends politiques. RFI

Tchad: les proches des manifestants décédés attendent toujours leurs dépouilles
Au Tchad, l’heure est au deuil après la répression sanglante des manifestations de jeudi 20 octobre. Officiellement, les événements ont fait une cinquantaine de morts, et plus de 300 blessés. Quelque part dans le 7e arrondissement, au quartier Chagua, le quotidien bat son plein, les gens s’affairent, tout paraît normal. Mais derrière une barrière en tôle, une famille est affligée, pleurant son fils. L’ingénieur en bâtiment de 27 ans était sorti à 5h du matin le 20 octobre. Il n’est plus jamais revenu, raconte son oncle à notre envoyé spécial à Ndjamena, Yves-Laurent Goma : « Il est parti pour le travail, ce n’est pas un manifestant. Il a reçu une balle dans la poitrine. À l’hôpital, il était très difficile d’identifier le corps. Il a laissé deux femmes et trois enfants. » Inconsolable, sa tante qui l’a élevé s’adresse directement au gouvernement : « Je suis une personne fatiguée, j’attendais tout de cet enfant et je me retrouve avec trois orphelins. Qu’est-ce que je vais devenir ? J’attends la réponse du gouvernement. » Dans le quartier, beaucoup de familles vivent le même drame. RFI

Des écoles transformées en camp de détention et de torture au Tchad
Au Tchad, quatre jours après les violentes manifestations ayant causé la mort d’une soixantaine de personnes, les écoles sont toujours fermées. Certains établissements scolaires seraient transformés en lieux de détention et de torture pour les nombreux manifestants arrêtés par les forces de l’ordre. Certains témoignages évoquent des exécutions et des corps transportés. Nous sommes au quartier Habbena, près de l’école officielle située à quelques encablures du siège du parti Les Transformateurs de l’opposant Succès Masra, un des initiateurs de la manifestation du 20 octobre dernier. La cour de cet établissement ressemble à un camp militaire où sont garés plusieurs véhicules de l’armée. Les élèves qui se rendaient dans cet établissement scolaire ce lundi [24.10.22] ont été contraints de faire demi-tour. Ils ont même été menacés, raconte Evelyne, élève de cet établissement qui déclare à la DW : ‘’Ce matin, je me suis habillée pour venir à l’école et arrivée là, j’ai vu beaucoup de militaires dans notre école. Ils étaient tout prêts de me taper, donc j’ai été obligée de retourner à la maison. Il parait qu’ils ont gardé là les manifestants arrêtés ». DW

Burkina Faso: au moins dix soldats tués lors d’une nouvelle attaque terroriste à Djibo
C’est la base du 14ème régiment interarmes qui a été visée par des groupes armés terroristes. « C’était une attaque complexe. Il y a eu des tris à l’arme lourde sur le camp », souligne une source sécuritaire. L’état-major général des armées précise que les assaillants sont arrivés « en nombre important ». Selon nos informations, il y avait environ 500 combattants. L’armée de l’air a dû intervenir pour soutenir la riposte des soldats au sol. Durant les combats, une cinquantaine de soldats burkinabè ont été également blessés. Plusieurs ont été transférés à Ouagadougou pour être soignés. Les assaillants avaient aussi lancé un assaut contre la station de traitement d’eau potable de la ville de Djibo, selon des sources locales, mais ils ont été repoussés par les soldats chargés de la sécurisation des lieux. « Ils voulaient assoiffer les populations qui sont déjà affamées », explique un habitant. RFI

Éthiopie: les négociations entre le pouvoir et les Tigréens s’ouvrent dans un climat tendu
Lundi 24 octobre devaient s’ouvrir en Afrique du Sud des pourparlers très attendus sur la guerre en Éthiopie, avec des délégations du Tigré et du gouvernement central éthiopien à Johannesburg depuis dimanche dans un contexte très tendu. L’armée fédérale gagne du terrain au Tigré et la communauté internationale ne cesse d’appeler à un cessez-le-feu. Très peu d’informations ont pour l’instant filtré sur ces négociations, mais la perspective de ce dialogue n’a en rien apaisé les tensions. RFI

La tension remonte d’un cran entre Kinshasa et Kigali
La République démocratique du Congo (RDC) est sur « la voie de l’escalade militaire continue » dans l’est du pays, ont accusé lundi les autorités rwandaises. Des tensions sont régulièrement enregistrées entre la RDC et le Rwanda. Leurs relations s’étaient normalisées avec l’arrivée du président Félix Tshisekedi à la tête de la RDC en 2019, jusqu’à la résurgence en novembre 2021 de la rébellion du M23 (Mouvement du 23 mars), qui avait été défaite en 2013. Kinshasa accuse Kigali de soutenir activement le M23, ce que les autorités rwandaises démentent. AFP

Mozambique: nouvelles attaques jihadistes, nouveaux déplacés
Sa grande fatigue après 40 km de marche n’estompe en rien le choc: Maria Lourenço reste sidérée, deux jours après, d’avoir vu les têtes de deux hommes de son village décapitées et posées dans une bassine. Après l’attaque des groupes armés jihadistes, qui a commencé le week-end dernier, cette femme de 60 ans, avec ses huit filles et plusieurs petits-enfants, a fui son village du nord du Mozambique, en proie à ces violences récurrentes depuis cinq ans, pour rejoindre la ville proche de Chiure. « Ils ont décapité deux hommes », raconte-t-elle à l’AFP, peu après son arrivée à Chiure. « Puis ils ont remis les têtes à la femme d’une des victimes pour qu’elle les présente aux autorités ». « J’ai vu leurs têtes », insiste ce petit bout de femme potelée, fichu rose sur la tête, jupe et tongs, appuyée sur un baton qui lui sert de canne sur la place principale de cette ville de près de 100.000 habitants. Elle attend que sa belle-fille l’emmène à Pemba, capitale de la province du Cabo Delgado. AFP

Un journaliste pakistanais réfugié au Kenya tué par la police
Un présentateur vedette de la télévision pakistanaise a été tué par balle dimanche 23 octobre par la police kényane. La police kényane dit « regretter » un « malheureux incident ». Ashrad Sharif a été « mortellement blessé par un officier de police » après que son véhicule aurait « foncé sur un barrage routier » à environ 40 km de la capitale, indique un communiqué de la police kényane cité par notre correspondante à Nairobi, Florence Morice. Au moment des faits, la police recherchait une voiture volée et une personne qui venait d’être enlevée, précise un rapport de police, sans toutefois établir clairement un lien entre les deux événements. L’association de la presse étrangère installée au Kenya juge « particulièrement inquiétantes les circonstances » de la mort d’Ashrad Sharif et exhorte le gouvernement kényan à mener une enquête approfondie, afin d’assurer les « journalistes étrangers » installés ou de passage au Kenya qu’ils « s’y trouvent en sécurité ». RFI

Face aux pires inondations de la décennie, l’entraide s’organise au Nigeria
L’autoroute est dévorée par les eaux sombres. Impossible d’avancer. Alors, dans un vacarme propre à l’urgence, des dizaines de Nigérians chargent des embarcations pleines de vivres pour porter assistance aux sinistrés. De l’autre côté, une fois passé les nombreux camions à moitié submergés, un véhicule est rempli de « garri » (farine de manioc), de riz et de nouilles sous les yeux de Bolaji Philips. « Avec ma femme, on a dépensé toutes nos économies, le peu qu’on a, pour aider », assure le quadragénaire, chapeau sur la tête. Un véritable travail de fourmi se met en place sur le principal axe routier, en partie impraticable, qui relie les Etats de Rivers et de Bayelsa, dans le sud-est du Nigeria, parmi les plus ravagés par les pires inondations de la décennie dans le pays le plus peuplé d’Afrique. En tout, elles ont fait plus de 600 morts et affecté près de 3 millions de personnes dans le pays, selon le dernier bilan des autorités. Beaucoup ont fui, notamment dans des camps de déplacés surpeuplés. Les autres, complètement coupés du monde, sont restés dans leurs communautés avalées par les flots. Près de la ville d’Ahoada, le travail des bénévoles et des ONG est vital, le temps que l’aide officielle parvienne aux plus démunis. Le Monde avec AFP

Soudan : dans les quartiers marginalisés de Khartoum, on ne se révolte pas, on survit
Depuis le putsch du 25 octobre 2021 mené par le général Abdel Fattah Al-Bourhane, le Soudan s’enfonce dans une crise économique sans précédent. Le coup de force militaire a fait dérailler la transition démocratique amorcée à la chute d’Omar Al-Bachir, en avril 2019, et a douché les espoirs d’ouverture du pays après trente ans d’isolement. Au lendemain du coup d’Etat, le robinet des aides internationales s’est tari. Plus de 4,6 milliards de dollars prévus pour des projets dans l’énergie, l’agriculture, la santé et un programme de soutien aux familles les plus pauvres ont été gelés. Pour se financer, les autorités ont décidé d’augmenter les taxes tous azimuts. Une hausse des coûts qui s’ajoute à la flambée mondiale des prix alimentaires et de l’énergie provoquée par la guerre en Ukraine. Le Monde