Seychelles : Une démocratie résiliente avance le progrès économique et la sécurité


Élections présidentielles et legislatives
27 septembre


Le président Wavel Ramkalawan, du parti Linyon Demokratik Seselwa (LDS), briguera un second mandat lors des élections de 2025 dans cet archipel de 115 îles situé dans l’océan Indien occidental. La victoire de M. Ramkalawan, un ancien prêtre anglican, aux élections de 2020 (lors de sa sixième tentative à la présidence) a marqué un tournant pour ce pays de 122 000 habitants. Le parti United Seychelles et son prédécesseur, le Front progressiste populaire des Seychelles, dominaient les institutions politiques des Seychelles depuis le coup d’État d’Albert René en 1977 (un an après l’indépendance du Royaume Uni). Alors que le multipartisme a été introduit au début des années 1990, le United Seychelles avaient conservé la majorité à l’Assemblée nationale jusqu’en 2016 et à la présidence jusqu’en 2020.

President Wavel Ramkalawan (R) looks during his inauguration on October 26, 2020. (Photo: AFP/Rassin Vannier)

Le président Wavel Ramkalawan (à droite) lors de son investiture le 26 octobre 2020. (Photo : AFP/Rassin Vannier)

M. Ramkalawan sera confronté au Dr Patrick Herminie, porte-drapeau de l’organisation United Seychelles. Herminie a été président de l’Assemblée nationale de 2007 à 2016. Il était auparavant directeur général des soins de santé primaires au ministère de la Santé.

Les deux candidats s’attacheront à réduire le taux de pauvreté de 23 % et à développer la classe moyenne dans un pays où le revenu par habitant dépasse 17 000 dollars, soit le plus élevé d’Afrique.

Après la mort de René en 2019, les Seychelles continuent de se débattre avec les répercussions de sa longue mainmise sur le pouvoir. Les crimes commis sous l’ère René, notamment le favoritisme et la torture, ont été rendus publics dans le cadre d’un processus de vérité et de réconciliation lancé en 2018 et qui a abouti à la publication d’un rapport final en 2023. Le rapport avait exigé des réparations pour les victimes, y compris des excuses et des compensations financières.

En 2021, les enquêtes sur l’ère René avaient abouti à des arrestations pour des allégations de blanchiment d’argent d’une valeur de 50 millions de dollars, impliquant un homme d’affaires seychellois et le gouvernement des Émirats arabes unis. Les perquisitions effectuées dans le cadre de cette affaire avaient permis de découvrir une cache d’armes, ce qui avait entraîné d’autres arrestations, notamment celle d’un ancien officier supérieur des forces de défense des Seychelles et de Sarah Zarqhani René, l’épouse de l’ancien président. Ces affaires continuent de suivre leur cours dans le système judiciaire et constituent une toile de fond supplémentaire pour les élections de 2025.

Les deux candidats s’attacheront à réduire le taux de pauvreté de 23 % du pays.

Elles reflètent également les efforts en cours pour démanteler le copinage qui s’est développé au sein des institutions de l’État pendant la longue période durant laquelle le pays était gouverné par un parti unique. Il s’agit notamment d’élever les normes de transparence. L’Assemblée nationale a adopté une loi anticorruption en 2016 qui a permis de créer la Commission anticorruption des Seychelles (ACCS). La loi a été modifiée en 2019 afin d’augmenter le nombre de membres de la commission de l’ACCS et de renforcer ses pouvoirs d’enquête et les dispositions relatives à l’application de la loi. Les Seychelles ont été retirées de la liste des paradis fiscaux étrangers de l’Union européenne en 2021, et le pays se classe désormais au 20e rang sur 180 pays dans l’indice de perception de la corruption de Transparency International, le plus élevé de tous les pays africains, et une amélioration de huit places par rapport à 2018.

Les Seychelles ont également fait des progrès dans la mise en place de médias indépendants. Il existe plusieurs journaux en plus du quotidien d’État. Une chaîne de télévision privée et deux stations de radio diffusent des programmes aux côtés de la chaîne de radio d’État. Afin d’atténuer la polarisation politique ou communautaire, le pays interdit aux partis politiques et aux organisations religieuses de diffuser des émissions radio sur les chaînes publiques. Afin d’offrir des garanties supplémentaires aux médias indépendants, l’Assemblée nationale a dépénalisé la diffamation en 2021, citant les réformes entreprises, et a renforcé la formation des journalistes. Les Seychelles occupent la première place en Afrique dans le classement mondial de la liberté de la presse établi par Varieties of Democracy.

Voters queue at a polling station on the main Island of the Seychelles, on October 24, 2020, during the presidential and legislative elections. (Photo: AFP/Rassin Vannier)

Des électeurs font la queue dans un bureau de vote sur l’île principale des Seychelles, le 24 octobre 2020, lors des élections présidentielles et législatives. (Photo : AFP/Rassin Vannier)

Les autorités civiles exercent un contrôle efficace sur une force de sécurité peu nombreuse, mais bien formée et professionnelle. Les forces de défense des Seychelles (FDS) sont composées d’une force de garde-côtes de 300 personnes, dont une escadre aérienne de 80 personnes. En juin 2022, l’Assemblée nationale a accordé aux FDS le droit de faire respecter la loi nationale, supprimant ainsi la séparation entre la police et l’armée. Cette loi a fait l’objet d’une requête auprès de la Cour constitutionnelle par des groupes de défense des droits humains en raison de la menace qu’elle fait peser sur l’État de droit et la régularité des procédures. Cette requête demeure en cours d’examen.

La priorité de la FDS est de lutter contre la piraterie, les réseaux de trafic illicite et la pêche non autorisée dans la zone économique exclusive des Seychelles, qui s’étend sur un million de km2. Les Seychelles sont un acteur régional important dans la lutte contre la piraterie au large de l’Afrique de l’Est. Depuis 2009, elles ont organisé plus de 17 procès contre 142 pirates présumés.

Les Seychelles jouent un rôle essentiel dans le maintien des voies maritimes ouvertes et la protection de l’environnement marin. Ce rôle les place au cœur des intérêts géostratégiques concurrents de la Chine et de l’Inde.

Compte tenu de leur situation dans l’océan Indien occidental, les Seychelles jouent un rôle essentiel dans le maintien de voies maritimes ouvertes et dans la protection de l’environnement marin. Cette situation les place également au cœur des intérêts géostratégiques concurrents de la Chine et de l’Inde. L’Inde avait négocié un accord avec le précédent gouvernement en vue d’établir une base navale sur l’île seychelloise de l’Assomption. Le gouvernement Ramkalawan a suspendu cet accord pour éviter d’être entraîné dans des rivalités géostratégiques et pour en examiner les incidences potentielles sur l’environnement. La Chine, quant à elle, a intensifié ses relations diplomatiques avec chacune des nations insulaires de la région : les Comores, Madagascar, les Maldives, l’île Maurice et les Seychelles.

Le dynamisme économique des Seychelles reste étroitement lié à la stabilité de l’économie bleue (maritime). Environ 45 % du produit intérieur brut du pays est lié au tourisme. Elle est donc vulnérable aux chocs extérieurs comme la pandémie du COVID qui a réduit les voyages internationaux. Le secteur de la pêche est un deuxième pilier de l’économie qui dépend fortement du maintien de la santé et de la biodiversité de l’écosystème maritime. Les Seychelles se concentrent également sur l’atténuation des risques climatiques qui peuvent déclencher des cyclones dévastateurs, des pluies de mousson, des inondations, des glissements de terrain et l’élévation du niveau de la mer.

Alors que les Seychelles se préparent à une élection très disputée en 2025, la manière dont le pays poursuivra son effort de transparence, étendra les avantages à tous les citoyens et gérera l’évolution des menaces à la sécurité sera un élément clé à surveiller.


Hany Wahila est assistante de recherche au Centre d’études stratégiques de l’Afrique.

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