Revue de presse du 23 mai 2024

Tchad: Mamahat Déby, l’ex-chef de la junte élu président, a prêté serment
Le général Mahamat Idriss Déby Itno, chef de la junte militaire depuis trois ans au Tchad avant d’être élu Président dans un scrutin boycotté par l’opposition, a prêté serment jeudi pour un mandat de cinq ans, renouvelable une seule fois…L’élection de ce général de 40 ans, dans un scrutin jugé peu « crédible » par des ONG internationales, marque aussi la fin d’une transition marquée par une répression féroce, parfois dans le sang, d’une opposition qui appelle à mettre fin à 34 années de « dynastie Déby ». L’ex-opposant Succès Masra, que Déby avait nommé Premier ministre il y a quatre mois…a présenté sa démission mercredi et était absent à l’investiture. La cérémonie était aussi l’occasion, en jaugeant le nombre de chefs d’Etat présents, de voir si la communauté internationale soutient toujours celui qu’elle avait adoubé sans barguigner en 2021, alors qu’elle vilipendait et sanctionnait partout ailleurs en Afrique les militaires putschistes. Au final huit chefs d’Etat, tous africains, ont fait le déplacement à N’Djamena. Quelques autres ont dépêché des ministres, le reste leurs ambassadeurs. Le Français Emmanuel Macron, l’un des rares chefs d’Etat occidentaux à avoir publiquement « félicité » M. Déby pour son élection, a dépêché à l’investiture son ministre délégué chargé notamment du Commerce extérieur et de la Francophonie, Franck Riester. AFP

Niger: une vingtaine de civils tués en début de semaine près du Mali
Une vingtaine de personnes ont été tuées dans une attaque de « bandits armés » en début de semaine dans un village de la région de Tillabéri, au Niger, pays sahélien régulièrement ciblé par les groupes jihadistes…La radio ne précise pas les circonstances du massacre, mais indique qu’il est survenu dans le village de Djambala, sur la route nationale numéro 1, à une trentaine de kilomètres de Tillabéri, la grande ville du sud-est nigérien, elle-même située à 100 km de la capitale Niamey. Parmi les victimes figurent des femmes et des enfants, selon des informations diffusées sur les réseaux sociaux par des ressortissants de la zone. Le Niger est la cible d’attaques jihadistes régulières depuis près de dix ans, dans plusieurs pans de son territoire…Tillabéri est une immense et instable région d’une superficie de 100.000 km2, située dans la zone dite « des trois frontières » entre le Niger, le Burkina Faso et le Mali. Considérée comme un repaire de groupes jihadistes armés agissant dans les trois pays, cette région est le théâtre depuis 2017 d’actions sanglantes de ces groupes liés à Al-Qaïda et à l’Etat islamique: elle est placée sous état d’urgence depuis…Les attaques continuent malgré le déploiement massif de forces anti-jihadistes nationales. AFP

Un an de prison pour deux chroniqueurs tunisiens ayant critiqué le pouvoir
Deux chroniqueurs connus en Tunisie, qui étaient poursuivis en vertu d’une loi sur les « fausses informations » pour avoir critiqué le pouvoir du président Kais Saied, ont été condamnés mercredi à un an de prison chacun. Borhen Bssais, un présentateur célèbre de médias privés, et Mourad Zeghidi, un commentateur politique, ont écopé de six mois pour diffusion de « fausses nouvelles » dans les médias et réseaux sociaux, et six mois supplémentaires pour « de fausses déclarations dans le but de diffamer autrui », a indiqué à l’AFP le porte-parole du tribunal de première instance de Tunis, Mohamed Zitouna. Lors de leur procès dans la journée, ils ont invoqué la liberté d’expression, expliquant n’avoir fait qu’accomplir leur travail, en analysant et commentant l’actualité politique et socio-économique du pays, selon une journaliste de l’AFP présente dans la salle. Ils avaient été interpellés le 11 mai pour des déclarations dans des émissions à la radio et à la télévision ainsi que des publications sur les réseaux sociaux, considérées comme critiques du pouvoir du président Saied. AFP

Tunisie: la militante antiraciste Saadia Mosbah jugée pour blanchiment d’argent
[C’était] le 22 mai que s’ouvre à Tunis le procès de Saadia Mosbah, une des figures de la lutte contre le racisme anti-noirs en Tunisie. À la tête d’une association dénonçant la négrophobie – qu’elle touche les Tunisiens noirs ou les ressortissants de pays d’Afrique de l’Ouest et centrale établis ou de passage en Tunisie -, elle est poursuivie pour blanchiment d’argent. Les défenseurs des droits de l’homme, eux, voient dans ces poursuites une tentative du pouvoir de faire taire cette association jugée dissidente…Cela fait deux semaines déjà que l’égérie de la lutte contre le racisme anti-Noirs est détenue en Tunisie…Des poursuites qui interviennent alors que plusieurs associations tunisiennes d’aide aux migrants sont accusées de faciliter leur établissement en Tunisie. Depuis son arrestation, début mai, Saadia Mosbah, lauréate du Prix du secrétaire d’État américain pour la lutte contre le racisme cet été, a reçu de très nombreux soutiens en provenance de l’étranger, dont la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) à Paris. Des appuis qui, paradoxalement, peuvent fragiliser sa défense alors que la Tunisie baigne dans un climat de complotisme poussé. RFI

Guinée : la junte interdit plusieurs radios et une TV privée
Le gouvernement guinéen dominé par les militaires a interdit quatre radios et une télévision privées très suivies dans le pays, indique un communiqué du ministère de l’Information publié mercredi. Les autorités ont retiré les agréments d’exploitation des radios FIM FM, Radio Espace FM, Sweet FM, Djoma FM et de la télévision Djoma TV, dit cet arrêté. Il invoque un « non-respect du contenu des cahiers des charges », sans plus de précision. Cette interdiction survient dans un contexte de sévères restrictions imposées aux médias par la junte au pouvoir depuis 2021…Quatre stations de radios privées font l’objet d’un brouillage constant depuis novembre 2023, trois chaînes de télévision privées sont quasiment inaccessibles, et au moins trois sites d’information ont été bloqués pendant plusieurs semaines sans explication en 2023, rappelle l’ONG sur son site internet. En outre, les autorités ont également imposé fin 2023 et début 2024 des restrictions d’accès à internet et détenu un responsable syndical de la presse pendant plus d’un mois, à l’origine d’une grève générale. Le pays est classé 78e sur 180 pays, selon le classement 2024 de RSF pour la liberté de la presse. AFP

Le pouvoir de Paul Biya a orchestré « la faillite des médias indépendants » au Cameroun, selon Haman Mana
Journaliste et patron de presse, Haman Mana a choisi le chemin de l’exil après l’affaire Martinez Zogo, en 2023. Depuis les États-Unis, il raconte le lent déclin de la presse camerounaise, paupérisée et muselée par une « dérive autoritaire » du pouvoir…Son ouvrage, J’aime l’odeur de l’encre au petit matin sur le papier, a été publié le 4 avril dernier aux Éditions du Schabel, qu’il dirige…Pourquoi maintenant ? L’affaire Martinez Zogo a sans doute été l’élément déclencheur. Haman Mana a été le dernier journalistes à qui Martinez Zogo, dont il était proche, a parlé avant d’être assassiné. Il assure aussi avoir ressenti au plus profond de lui le « climat de terreur » au Cameroun, s’estimant être le prochain sur une liste de reporters à neutraliser. La raison de son exil actuel aux États-Unis…Son témoignage met aussi en lumière les limites des médias camerounais, entre précarité et répression…« On a basculé dans une dérive autoritaire », où seule la presse alignée sur les points de vue du pouvoir a les moyens de « respirer » et de dire ce qui est « bon », regrette Haman Mana. Il déplore l’essor d’une « presse à gage », dont il attribue la paternité à Jean-Pierre Amougou Belinga, homme d’affaires et de médias, aujourd’hui détenu à la prison principale de Kondengui, dans le cadre de l’affaire Martinez Zogo. Jeune Afrique

Au Sénégal, le parti de Macky Sall se cherche un avenir après l’échec de la présidentielle
Fragilisé par sa défaite, divisé autour de la personnalité d’Amadou Ba et de sa capacité à incarner une relève, l’ancien parti au pouvoir doit aujourd’hui apprendre à devenir une formation d’opposition, une situation nouvelle qu’il appréhende avec la crainte de subir le sort de ses prédécesseurs. Au Sénégal, le Parti socialiste (PS) des présidents Léopold Sedar Senghor et Abdou Diouf, et le Parti démocratique sénégalais (PDS) d’Abdoulaye Wade n’ont jamais retrouvé leur influence après la perte du pouvoir…Pour s’éviter un tel destin, l’APR a commencé une « tournée nationale » afin de remobiliser ses militants. A Kaffrine, début mai, la réunion a même vu la participation à distance de Macky Sall, depuis Marrakech. Les prochaines étapes se feront dans les semaines à venir à Sédhiou, Kolda, Ziguinchor, Kaolack, Fatick et Diourbel…Au sein de l’APR, quelques quadragénaires tentent aujourd’hui d’impulser une nouvelle dynamique pour relancer le parti. « Il faut une réorganisation, un changement de nom, de nos profils, de nos postures et de nos discours politiques sinon nous disparaîtrons », estime un jeune cadre qui souhaite garder l’anonymat mais pour qui « le bilan élogieux et le culte de la personnalité du président ne suffisent plus pour convaincre les électeurs ». « En gardant le même appareil politique avec le personnel vieillissant de l’ancien régime, nous allons paraître comme un parti passéiste qui n’est pas adapté aux préoccupations du moment », dit-il. Le Monde

Sénégal: polémique après l’arrestation d’opposants accusés de diffamation
L’activiste Ba Diakhaté et le prêcheur Cheikh Ahmed Tidiane sont toujours en détention après avoir attaqué le Premier ministre sur les réseaux sociaux et ses récents propos sur l’homosexualité…Leur arrestation fait polémique. Atteinte à la liberté d’expression pour les uns. Intervention salutaire de la justice face à des propos très diffamatoires, pour les autres. Cette double arrestation suite à des déclarations publiques d’opposants – la première depuis qu’une nouvelle équipe a été élue à la tête du pays – divise les Sénégalais. Interpellé dès lundi par la division des investigations criminelles, l’activiste Ba Diakhaté s’est attaqué à Ousmane Sonko dans une vidéo. Dans des termes injurieux, il l’accuse notamment d’être homosexuel. Le prêcheur Cheikh Ahmed Tidiane Ndao, qui lui a été placé en garde à vue mardi, est également accusé de diffusion de fausse nouvelle et d’offense à l’encontre du Premier ministre, après la publication d’une autre vidéo dans laquelle il reproche à Ousmane Sonko d’être complaisant vis-à-vis de l’homosexualité…Au Sénégal, la diffamation et la diffusion de fausses nouvelles sont passibles de peines de prison. Dans les rangs de l’opposition, nombreux sont ceux qui dénoncent cette arrestation et plaident pour préserver la liberté d’un débat démocratique. RFI

Comment des milliers de migrants ont été abandonnés en plein désert avec le soutien de l’Europe
Pour éviter qu’ils n’arrivent en Europe, des dizaines de milliers de migrants africains sont arbitrairement arrêtés, puis abandonnés des centaines de kilomètres plus loin, au péril de leur vie. Documentées au Maroc, en Tunisie et en Mauritanie, ces arrestations sont menées grâce au soutien financier de l’Europe et de ses États membres. Dans ces trois pays nord-africains, le même processus, ou presque. Des forces de police ciblent et arrêtent collectivement des migrants, la plupart du temps d’origine subsaharienne, qui tentent de rejoindre la Méditerranée ou les Canaries, puis l’Europe. Une fois rassemblés, ils sont ensuite conduits vers des zones désertiques, à la frontière libyenne ou malienne. Commence alors une lutte pour la survie, dans des conditions de vie extrêmement éprouvantes, avec peu d’eau et de nourriture. Depuis 2015, ces trois Etats africains ont pourtant perçu plus de 400 millions d’euros de la part de l’Union européenne pour la gestion de leurs frontières, par l’entremise du fonds fiduciaire d’urgence, lancé par l’Union européenne lors du sommet sur la migration de La Valette, à Malte, en 2015. Le Monde

Gabon: ce que l’on sait de la visite officielle du président Brice Oligui Nguema en France
Le président gabonais effectuera son premier voyage officiel en France du 28 mai au 2 juin. Brice Clotaire Oligui Nguema se rendra à Paris avec plusieurs ministres, notamment celui de l’Économie. Une visite de travail durant laquelle il sera reçu par le président Emmanuel Macron à l’Élysée…Pour Libreville, cette visite de travail doit notamment servir à se démarquer des pays du Sahel comme le Mali, le Burkina et le Niger, secoués par des coups d’État et le rejet des intérêts français…Brice Clotaire Oligui Nguema sera reçu à l’Élysée par son homologue Emmanuel Macron le vendredi 31 mai. Or certains voient dans ce déplacement une volonté du chef de l’État gabonais de chercher une légitimité auprès de la France…Sous l’ancien président Ali Bongo, la relation franco-gabonaise avait connu des périodes de froid…Mais le putsch d’août dernier n’a pas aggravé le refroidissement des relations. Au contraire, les deux pays ont visiblement maintenu des liens étroits. Le 31 août dernier, lendemain du putsch, Brice Clotaire Oligui Nguema avait reçu l’ambassadeur français Alexis Lamek et le chef de poste de la DGSE, en signe de bonne entente. La transition avec rétabli les signaux de France 24 et RFI interrompus par l’ancien pouvoir le jour du vote, le 26 août. Dans le même temps, la société française Eramet avait repris ses activités d’extraction de manganèse dans la mine de Moanda. RFI