Revue de presse du 17 mai 2024

Tchad : le général Mahamat Idriss Déby Itno officiellement élu président
Le général Mahamat Idriss Déby Itno, chef de la junte militaire au pouvoir depuis la mort de son père Idriss Déby en avril 2021, a été élu président du Tchad avec 61 % des voix le 6 mai, selon les résultats officiels et définitifs proclamés jeudi 16 mai par le Conseil constitutionnel. La requête en annulation du scrutin déposée par son Premier ministre et rival à l’élection, Succès Masra, qui avait revendiqué la victoire il y a une semaine et dont le parti avait qualifié le scrutin de « mascarade », a été rejetée par la juridiction suprême…La question se pose désormais de savoir si Succès Masra va rester Premier ministre. L’opposition l’avait qualifié de « traître » après qu’il eut signé un « accord de réconciliation » avec le général Déby, qui l’a nommé Premier ministre le 1er janvier. L’opposition, qui avait appelé à boycotter un « scrutin joué d’avance » pour « perpétuer une dynastie Déby », avait aussi accusé Masra d’être candidat pour donner un « vernis démocratique » au scrutin et poursuivre ensuite son tandem au pouvoir avec le jeune général. Mais l’économiste Masra a surpris tout le monde en rassemblant des foules considérables durant sa campagne, au point de s’enhardir et se dire capable de l’emporter, sinon de pousser le général jusqu’à un second tour. France24

Présidentielle au Tchad: le général-président Mahamat Déby dans les pas de son père
Le jeune général Mahamat Idriss Déby Itno, le regard fuyant, paraissait bien timoré ce 20 avril 2021 quand l’armée le proclamait, à la télévision, président de transition à la mort de son père Idriss Déby, maître absolu du Tchad depuis 30 ans, tué par des rebelles en se rendant au front. Trois ans plus tard, à 40 ans, il a fait légitimer par les urnes – dans un scrutin jugé « truqué » par l’opposition et des ONG internationales – une magistrature suprême qu’il semblait avoir fini par apprivoiser ces derniers temps, souvent en mimant, maladroitement, la gestuelle de son père, chef autoritaire et politicien madré…Sa junte a aussi écarté politiquement ou physiquement tout rival présidentiel, et l’opposition l’accuse de vouloir perpétuer « la dynastie Déby ». Avec la publication jeudi des résultats définitifs de la présidentielle, Mahamat Déby a achevé de placer ses pas dans ceux de son père, pour un long règne…Mais sa légitimité et sa popularité, déjà fragiles au sein même de la famille Déby et de son ethnie zaghawa, qui régissent le pays depuis 33 ans, vacillent un peu plus depuis que les militaires ont tué, il y a deux mois, son cousin Yaya Dillo Djérou. Ce dernier était son plus sérieux rival pour la présidentielle, dans l’assaut du siège de son parti d’opposition…Sur le plan intérieur, Mahamat Déby n’a jamais laissé la moindre opposition, la moindre dissidence prendre corps. Il alterne la répression meurtrière (une manifestation pacifique matée dans le sang le 20 octobre 2022, l’assaut contre le parti de M. Dillo…), et la séduction, voire le braconnage, dans l’opposition politique et armée. TV5 avec AFP

Sénégal : le premier ministre, Ousmane Sonko, s’en prend à la France et à la présidence Macron
Devant des centaines d’étudiants galvanisés, le premier ministre sénégalais, Ousmane Sonko, s’en est pris durement, jeudi 16 mai, à l’attitude de Paris lors de la répression contre son camp sous l’ancien président Macky Sall. Il a ainsi accusé la présidence Macron d’avoir incité à la « persécution ». Chantre d’un souverainisme et panafricanisme social, M. Sonko a délivré dans un hémicycle de l’université de Dakar et sous les acclamations répétées son discours le plus long et le plus politique depuis sa nomination, en avril, après la victoire tonitruante des siens à la présidentielle. Il a précisé s’exprimer en tant que chef de parti et non du gouvernement, à l’occasion d’une conférence sur les relations entre l’Afrique et l’Europe avec Jean-Luc Mélenchon, lui aussi virulent contempteur du président français…Devant M. Mélenchon dont il a salué le soutien constant, il est revenu sur le bras de fer que lui et son parti ont livré au pouvoir de 2021 à 2024 et qui a causé des dizaines de morts et des centaines d’arrestations. « Vous n’avez jamais entendu le gouvernement français dénoncer ce qui s’est passé », a déclaré M. Sonko. Il a accusé Emmanuel Macron d’avoir accueilli et « félicité » son homologue sénégalais « au pire [moment] » de la répression. « C’est une incitation à la répression, une incitation à la persécution et à l’exécution de Sénégalais qui n’avaient [commis d’autre] crime que d’avoir un projet politique », a-t-il déclaré. Beaucoup de gouvernements européens sont restés dans un « mutisme approbateur », a-t-il dit. Le Monde avec AFP

Le président sénégalais en visite au Nigeria pour évoquer la démocratie en Afrique de l’Ouest
Le Nigeria et le Sénégal se sont engagés à promouvoir la démocratie en Afrique de l’Ouest, théâtre de nombreux coups d’Etat, lors de la première visite officielle au Nigeria du nouveau président sénégalais, Bassirou Diomaye Faye, a annoncé la présidence nigériane. Les deux pays ont « un intérêt commun pour la démocratie », a assuré le président nigérian, Bola Tinubu, cité jeudi 16 mai dans un communiqué de la présidence. Il a exhorté son homologue sénégalais à faire « revenir au bercail » les pays ouest-africains « frères » touchés par des « renversements anticonstitutionnels de gouvernement ». Il faisait référence au Niger, au Burkina Faso et au Mali, pays dirigés par des militaires à la suite de putschs, qui ont annoncé au début de l’année leur décision de quitter la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao). Selon le communiqué nigérian, Bassirou Diomaye Faye a dit espérer convaincre, au côté du Nigeria, d’autres pays de « revenir et de partager nos valeurs démocratiques communes et ce que nous représentons ». La Cedeao, que préside M. Tinubu, « traverse une période difficile, mais tout n’est pas perdu », a ajouté M. Faye, selon le communiqué. Les deux dirigeants ont aussi dit vouloir s’attaquer à des défis communs, tels la traite des êtres humains et le trafic de migrants. Le Monde avec AFP

Soudan : le chef des droits de l’homme de l’ONU horrifié par l’escalade des violences au Darfour
Alors que les combats au Soudan impactent terriblement des millions de civils et que la famine menace de nombreuses localités, le chef des droits de l’homme de l’ONU s’est dit, vendredi, horrifié par l’escalade de la violence à El Fasher, au Darfour, où les hostilités entre les forces armées soudanaises et les paramilitaires des forces de soutien rapide ont des effets dévastateurs sur les civils. Selon le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), au moins 58 civils auraient été tués et 213 autres blessés à El Fasher depuis l’escalade des combats dans cette ville du Nord-Darfour la semaine dernière. Le Bureau des droits de l’homme des Nations Unies indique que le Haut-Commissaire Volker Türk a téléphoné mardi au général de corps d’armée Abdel Fattah Al-Burhan, commandant des forces armées soudanaises, et au général Mohamed Hamdan Dagalo, qui dirige les forces rivales des paramilitaires. M. Türk les a exhortés à agir immédiatement – et publiquement – pour désamorcer la situation. « Il a averti aux deux commandants que les combats à El-Fasher, où plus de 1,8 million de résidents et de personnes déplacées sont actuellement encerclés et exposés à un risque imminent de famine, auraient un impact catastrophique sur les civils et aggraveraient le conflit intercommunautaire, avec des conséquences humanitaires désastreuses », a déclaré Ravina Shamdasani, porte-parole du HCDH. ONU Info

Plus de 500 migrants interceptés par la Marine sénégalaise depuis début mai
Les forces armées du Sénégal ont intercepté plus de 500 migrants en mer au cours du mois de mai lors de quatre opérations distinctes mettant en lumière la poursuite du flux des départs vers l’Europe. La Marine nationale a intercepté quatre embarcations transportant un total de 554 migrants entre le 7 mai et mercredi dans les eaux territoriales au large de la capitale Dakar et de Saint-Louis (nord-ouest), indiquent ses messages postés sur X. Les occupants étaient originaires du Sénégal ou de la sous-région. L’une des pirogues au moins est partie de Gambie, voisine du Sénégal, selon la Marine. La Marine avait intercepté 269 migrants entre début décembre et fin avril, après un pic d’un millier pour le seul mois de novembre, selon les chiffres qu’elle a publiés et qu’a additionnés l’AFP. L’AFP ignore si toutes les interceptions ont fait l’objet d’une communication. AFP

Huit jihadistes tués par l’armée dans le nord du Bénin
Huit jihadistes présumés ont été tués par l’armée béninoise dans le nord du pays mardi, a appris jeudi l’AFP de sources militaires, alors que le pays fait face comme ses voisins à une menace croissante d’attaques jihadistes. Deux sources militaires ont affirmé à l’AFP avoir « neutralisé » huit « terroristes » dans la commune de Karimama, au nord-est du Bénin, à la frontière avec le Niger, « mardi vers 1H30 » locales. Les régions septentrionales du Bénin, du Togo et du Ghana subissent depuis quelques années des attaques et incursions de combattants du groupe Etat islamique (EI) et d’Al-Qaïda qui prospèrent au Sahel et cherchent à descendre vers le sud…Selon une note interne de l’armée dont l’AFP s’est procuré une copie, l’armée aurait récupéré « beaucoup de matériel de guerre ». « Ce succès a été suivi le lendemain mercredi par le démantèlement d’un de leurs réseaux logistiques » au cours duquel « des dizaines de motos et une grosse quantité de carburant ont été récupérées lors de cette opération », précise la note…La région frontalière avec le Burkina Faso, dans le Nord, reste l’épicentre des attaques au Bénin. AFP

Tunisie : L’ONU dénonce le régime répressif du président Kaïs Saïed
Le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme a vivement condamné vendredi ce qu’il décrit comme « l’intimidation et le harcèlement » subis par les avocats et les membres des médias critiques en Tunisie, en particulier à l’égard de leur opposition aux politiques migratoires gouvernementales. Ravina Shamdasani, porte-parole du Haut-Commissariat, a dénoncé lors d’une conférence de presse à Genève les perquisitions récentes menées contre l’Ordre des avocats en Tunisie, les qualifiant de violation de l’État de droit et des normes internationales protégeant l’indépendance et le rôle des avocats. Elle a souligné que de tels actes constituent une forme d’intimidation et de harcèlement. Mme Shamdasani a également rappelé l’appel du Haut-Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme, Volker Türk, aux autorités tunisiennes pour qu’elles respectent et protègent les libertés fondamentales d’expression, d’association et de rassemblement pacifique, telles que garanties par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. En outre, elle a déploré l’augmentation de l’usage d’une rhétorique déshumanisante et raciste à l’encontre des migrants noirs et des Tunisiens noirs. Sahel Intelligence

Kenya: le déploiement de policiers en Haïti visé par un nouveau recours en justice
Un nouveau recours a été déposé ce 16 mai 2024 devant la justice du Kenya pour s’opposer au déploiement de policiers kényans en Haïti. C’est encore le parti d’opposition Alliance troisième voix qui est à la manœuvre. Le 26 janvier, la justice kényane avait jugé inconstitutionnel ce déploiement dans le cadre d’une force multinationale sous égide de l’ONU. Mais le président kényan, William Ruto, entend bien mener à bien cette mission. Dans sa plainte, Alliance troisième voix estime que les policiers kényans peuvent être déployés à tout moment et au plus tard, le 23 mai, date de la visite de William Ruto à Washington. Pour Ekuru Aukot, président du parti, les autorités se rendent coupables d’outrage au tribunal : « Après le jugement du 26 janvier, l’ancien Premier ministre haïtien Ariel Henri est venu au Kenya pour signer un accord officiel. Le jugement est très clair : la demande d’une intervention kényane en Haïti doit être faite selon la Constitution kényane par un président démocratiquement élu. Ariel Henry n’a jamais été élu et sa nomination aurait dû être approuvée par le Parlement…Or, en ce moment, il n’y a pas de Parlement en Haïti. Donc, il s’est maintenu au pouvoir illégalement pendant trois ans. Le gouvernement kényan quant à lui ne respecte pas la loi, poursuit ce déploiement et tout cela est chorégraphié en raison de la visite de William Ruto aux États-Unis »…Selon l’ONG Global Initiative, les policiers choisis proviennent de la Force de déploiement rapide et du Groupe d’opérations spéciales. Ce dernier combat notamment les islamistes al-Shebab le long de la frontière avec la Somalie. RFI

Une colonne de véhicules militaires sème le trouble à la frontière entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso
La frontière entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso est devenue une zone sensible. Pas seulement à cause de la menace sécuritaire que font peser les groupes djihadistes actifs côté burkinabé et accusés d’avoir installé des bases arrière côté ivoirien, mais aussi en raison des différends politiques entre Abidjan et Ouagadougou. Depuis jeudi 16 mai, la circulation d’une vidéo sur les réseaux sociaux renforce les tensions. Filmées au téléphone, les images sont légendées ainsi : « Violation de frontière du Burkina par les forces de l’ordre ivoiriennes ». Elles montrent une file de véhicules militaires (légers, blindés, ambulance) qui s’avance sur une route non goudronnée, passant devant un drapeau burkinabé fiché au sol. Un petit groupe d’hommes en tenue civile mais armés, qui semblent être des Volontaires pour la défense de la patrie (VDP), ces supplétifs recrutés par les autorités burkinabées pour appuyer l’armée, les observent, passifs…Les relations diplomatiques entre la Côte d’Ivoire et le Burkina Faso, autrefois cordiales, n’ont cessé de se tendre depuis l’arrivée au pouvoir du capitaine Ibrahim Traoré à Ouagadougou, en 2022. Les réseaux sociaux sont désormais prompts à s’enflammer à chaque incartade réelle ou supposée de l’une des deux armées, la junte d’Ibrahim Traoré soupçonnant son voisin d’œuvrer à la déstabilisation de son pouvoir. Le Monde

En Côte d’Ivoire, les accusés de l’attentat de Grand-Bassam de retour devant le tribunal
Huit ans après les faits et un an et demi après leur procès en première instance, les accusés de l’attentat terroriste de Grand-Bassam sont de retour devant la justice ivoirienne. Du moins en partie. Comme lors du premier jugement en 2022, quatre hommes sont attendus, vendredi 17 mai, sur les bancs de la cour d’appel : Hantao Ag Mohamed Cissé, Sidi Mohamed Kounta, Mohamed Cissé et Hassan Barry. Les quatorze autres inculpés sont détenus au Mali ou en cavale. L’attaque, qui avait fait 19 morts (dont sept civils ivoiriens et quatre français) et 33 blessés dans la station balnéaire de Grand-Bassam le 13 mars 2016, avait été revendiquée par Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI). Une tuerie présentée comme un acte de représailles contre les opérations antidjihadistes françaises « Serval » au Mali et « Barkhane » au Sahel, mais aussi contre la Côte d’Ivoire, accusée d’avoir livré des membres d’AQMI aux autorités maliennes…Le cerveau de l’attaque, le Malien Kounta Abdallah dit « Kounta Dallah », est toujours en fuite. Et, plaide la défense, les accusés présents n’ont été que les « petites mains » du commando. Mohamed Cissé est poursuivi pour avoir servi de chauffeur à Kounta Dallah, Sidi Mohamed Kounta pour l’avoir hébergé à Abidjan. Hantao Ag Mohamed Cissé aurait effectué des repérages sur la plage de Grand-Bassam en amont de l’attentat ; une excursion qu’il ne nie pas mais qu’il présente comme un simple séjour touristique. Le dernier accusé, Hassan Barry, a convoyé des armes par voie routière depuis le Mali…Le tribunal criminel d’Abidjan avait renvoyé une première fois l’audience, initialement programmée le 25 avril, faute d’avocats pour défendre les prévenus à cause d’un conflit entre le barreau et le ministère de la justice autour de la rémunération des commissions d’office. Si la question n’est pas résolue d’ici à vendredi, le procès risque d’être encore reporté. Le Monde

En Tunisie, inquiétude des avocats après les arrestations de deux des leurs et des soupçons de « torture »
La colère gronde parmi les avocats tunisiens, qui ont manifesté en robe noire, jeudi 16 mai à Tunis, pour protester contre les arrestations de leurs confrères Sonia Dahmani et Mehdi Zagrouba. Ce dernier aurait également subi des violences physiques de la part des forces de l’ordre lors de son arrestation, lundi 13 mai, au siège de l’Ordre national des avocats tunisiens, où il s’était réfugié. Ses avocats évoquent des « actes de torture graves »…L’affaire a pris une tournure plus grave lorsque Mehdi Zagrouba s’est présenté devant le juge d’instruction mercredi, à l’issue de sa garde à vue, dans un état de santé fortement détérioré, selon Bassem Trifti, le président de la Ligue tunisienne des droits de l’homme…A la suite de son coup de force du 25 juillet 2021 qui lui a permis de se doter des pleins pouvoirs, Kaïs Saïed est parvenu à affaiblir l’ensemble des corps intermédiaires, partis politiques, syndicats, organisations de la société civile et médias, accusés de collusion avec des puissances étrangères. En outre, plus d’une vingtaine d’avocats ont été « pris pour cible » par les autorités tunisiennes depuis janvier 2023, selon l’organisation Amnesty International, qui a dénoncé fin mars un « harcèlement judiciaire et une intimidation croissante » à leur encontre. Le Monde