Print Friendly, PDF & Email

Forum 2021 sur la coopération sino-africaine : les prochaines étapes

Pour que les pays africains puissent négocier une participation plus équitable au Forum sur la coopération sino-africaine, il leur faudrait adopter une approche plus stratégique, mais aussi améliorer leur coordination et leur capacité à rendre des comptes aux citoyens.


A meeting between Chinese and Rwandan delegations at FOCAC in 2018.

Réunion entre les délégations chinoise et rwandaise du FCSA en 2018 (photo : Bureau du Président du Rwanda)

Le Sommet du Forum sur la coopération sino-africaine (FCSA), qui se tiendra prochainement à Dakar au Sénégal, éclaire une relation qui, pour être de plus en plus importante, n’en demeure pas moins largement asymétrique. Après 21 ans de sommets organisés tous les trois ans, l’impression commune est que la Chine tire de cette relation plus de profit que ses partenaires africains. L’Afrique n’a pas épuré la dette commerciale annuelle structurelle de plus de 20 milliards de dollars dont elle est redevable à l’égard de la Chine. Avec des activités manufacturières à grande échelle extrêmement limitées, les pays africains en sont réduits à importer des produits finis onéreux depuis la Chine et à y exporter des matières premières à moindre coût. Les pays africains sont dépendants des entreprises et créanciers chinois pour le financement et la construction des infrastructures essentielles à l’exportation. Pour autant, les entreprises africaines se heurtent à de considérables barrières à l’entrée qui les empêchent d’exporter des produits de base vers les marchés de produits chinois à valeur ajoutée.

Autre problème persistant : les élites africaines profitent trop souvent des largesses chinoises sur lesquelles elles s’appuient pour tisser des réseaux clientélistes, renforcer leurs positions politiques et favoriser leur propre enrichissement. Le manque de transparence de ces marchés nuit souvent aux intérêts des citoyens africains. Les principales règles applicables aux taux d’endettement maximums, à l’environnement et au milieu du travail, à la surveillance publique et au transfert de connaissances sont bafouées, ce qui place systématiquement le continent noir dans une position d’infériorité vis-à-vis de la Chine.

« Les réactions négatives de la société civile africaine se multiplient et la relation fait l’objet d’un contrôle accru ».

Dans le même temps, les réactions négatives de la société civile africaine se multiplient et la relation fait l’objet d’un contrôle accru, comme en témoigne le nombre croissant des articles sur ce sujet mais aussi des litiges et des manifestations autour des projets chinois. Le coût représenté par la ligne de chemin de fer reliant Mombasa à Nairobi et construite par les Chinois au Kenya a notamment suscité de vives critiques. En juin 2020, la Cour d’appel kenyane a déclaré ce contrat illégal au motif qu’il n’avait pas été négocié de manière « juste, transparente, équitable, concurrentielle et rentable », avec des répercussions défavorables pour la population. Bien que la réaction populaire n’ait pas suffi à empêcher le Kenya de conclure ce marché polémique, les organisations de la société civile ont réclamé des réponses à leurs questions tout au long de la procédure, exigé davantage de transparence et intenté de multiples actions en justice.

Le FCSA 2021 se déroule ainsi dans un contexte de suspicion grandissante quant à la manière des élites africaines au pouvoir de gérer leur relation à la Chine. Les appels en faveur d’une réorganisation des conditions de ce partenariat et d’une refonte de l’architecture institutionnelle du FCSA se font de plus en plus nombreux.

Le FCSA modelé par quatre thèmes principaux au cours des deux dernières décennies

Un processus plus qu’un simple enchaînement de sommets. Les dirigeants africains sont plus nombreux à participer au FCSA qu’à l’Assemblée générale des Nations unies, le sommet le plus important au monde. En 2018, 51 présidents africains ont assisté au sommet du FCSA contre seulement 27 à l’Assemblée générale deux semaines plus tard. Le focus du FCSA est d’entretenir des partenariats étroits (huǒbàn, 伙伴). Le programme est négocié calmement dans le cadre d’échanges au niveau des ambassades, des directeurs généraux, des hauts responsables et des ministres, les lieux de réunion alternant entre l’Afrique et la Chine. Les priorités stratégiques ont été égrenées à l’occasion de 12 forums politiques (parmi lesquels le Forum sino-africain de défense et de sécurité et le Forum ministériel sur la coopération sino-africaine en matière de santé). Des organes techniques, dont le Forum sino-africain de coopération des administrations locales et le Forum Chine-Afrique des centres de réflexion, proposent des formations à court terme. Des centres de réflexion spécialisés au sein du gouvernement chinois organisent des programmes afin de familiariser les Africains au contexte chinois. Le Centre de presse Chine-Afrique propose par exemple aux journalistes africains des formations financées d’une durée de 10 mois et ce, sous les auspices du ministère des Affaires étrangères chinois.

Priorité accordée à la formation et au développement des compétences en Afrique. Le modèle de formation proposé par le FCSA sur le territoire se décline comme suit :

  1. Programmes pluriannuels destinés aux fonctionnaires publics investis de fonctions de direction et d’élaboration de politiques ;
  2. Programmes de mentorat entre les institutions africaines et chinoises ;
  3. Échanges entre partis politiques ayant pour objet la formation de cadres et la diffusion de normes ;
  4. Ateliers de formations professionnelles.

Environ 50 000 places de formation sont concédées aux membres de l’Union africaine (UA) pour chacune de ces quatre catégories tous les trois ans. 60 000 places servent à former des étudiants dans le secteur civil et militaire, dont plusieurs milliers à des postes à responsabilité. En 2020, la Chine avait proposé plus de formations aux Africains que n’importe quel autre pays, devant l’Inde, l’Allemagne, le Japon et les États-Unis.

A Chinese vocational workshop in Ethiopia.

Atelier de formation organisé par la Chine en Éthiopie. (Image : capture d’écran/Ethio Views)

Certains réclament que les programmes de formation, bien qu’initiés par les institutions chinoises, soient davantage élaborés par les Africains dès lors qu’ils sont destinés à servir leurs intérêts. Des pays tels que l’Afrique du Sud ont mis en place des commissions binationales visant à améliorer le fonctionnement du FCSA et à forger ses institutions.

La présence culturelle de la Chine s’est également accrue en Afrique. En 2000, la Chine ne possédait aucun institut culturel en Afrique et avait formé moins de 2 000 étudiants africains. Aujourd’hui, la Chine lesquels sont présents, respectivement, depuis 1883, 1934 et 1960. Le nombre d’étudiants africains en Chine a progressé pour s’établir à 60 000, ce qui fait de la Chine le premier pays destinataire d’étudiants anglophones.

La Chine étend son influence. En 2009, la Chine prend aux États-Unis la place de principal partenaire commercial de l’Afrique, le total de leurs échanges commerciaux atteignant 200 milliards de dollars en 2020. Les importations chinoises depuis l’Afrique représentent entre 20 et 30 % de ce volume d’échanges et se concentrent sur le pétrole brut et les hydrocarbures, les minéraux, les pierres précieuses et les métaux de base. Les importations africaines depuis la Chine portent sur les machines, les équipements de transport, les produits électroniques, les textiles et les chaussures. Ce schéma d’échanges est biaisé et des appels ont été lancés pour que la Chine retire immédiatement les droits de douane qu’elle applique aux produits à valeur ajoutée africains, ce afin d’améliorer la qualité des échanges entre l’Afrique et la Chine.

Investissements dans les infrastructures et les télécommunications. En 2000, le volume des investissements chinois en Afrique représentait à peine 2 % de celui des États-Unis, de même que le nombre d’entreprises chinoises sur le sol africain restait inférieur à 200. Ces chiffres ont explosé : les investissements chinois représentent 55 % des niveaux américains de 2020 et le nombre d’entreprises chinoises s’établit désormais à plus de 10 000 (environ 10 % d’entreprises publiques). Si l’on prend le seul domaine de la construction, les entreprises publiques chinoises ont généré plus de 40 milliards de dollars de revenus par an depuis 2012 en Afrique. La Chine, grand Manitou des infrastructures africaines, finance un projet sur cinq et participe à la construction dans un cas sur trois. Les infrastructures liées au transport et à l’énergie dominent les investissements directs à l’étranger de la Chine, à côté des services publics, de la technologie et de l’immobilier. Soixante-cinq pour cent des prêts chinois alimentent ces mêmes secteurs, rendant difficile toute distinction nette entre prêts et investissements.

The port of Mombasa, Kenya.

Le port de Mombasa, Kenya.
(Photo : Make It Kenya/Stuart Price)

Entre 2000 and 2020, le portefeuille chinois a alimenté 46 projets portuaires en Afrique subsaharienne, un tiers du réseau électrique africain et des infrastructures énergétiques, 186 bâtiments publics et 14 réseaux de télécommunications inter-gouvernementaux. Il est difficile de dire dans quelle mesure ces infrastructures entrent dans le cadre d’investissements directs à l’étranger ou s’ils sont financés par la dette. Ce que l’on sait toutefois, c’est qu’au cours de cette même période, les pays africains ont souscrit 274 emprunts d’une valeur de 46,6 milliards de dollars pour financer des infrastructures de transport, 174 pour des projets énergétiques d’une valeur de 38 milliards de dollars et 141 dans le secteur des communications et de la sécurité nationale pour un montant de 15,3 milliards de dollars.

De nombreux Africains voient d’un œil inquiet ces emprunts qui, souvent sujets à des clauses de confidentialité interdisant aux emprunteurs d’en divulguer les conditions, risquent d’accroître la spirale des endettements et des défauts de paiement. Pour faire court, les deux dernières décennies de la collaboration avec le FCSA ont certes fait progresser les possibilités de formation et de création d’infrastructures, mais elles ont tendance à être sous la coupe des élites, souvent dans des conditions inégales renforçant la nature asymétrique de la relation et la dépendance de l’Afrique.

Promouvoir l’autonomie africaine

Le modèle de partenariat avec la Chine fait prévaloir la dépendance mutuelle, les gestes réciproques et les réseaux (guānxi, 关系), ce qui signifie que la Chine doit satisfaire ses partenaires, aussi précaires soient-ils, pour atteindre ses objectifs. De nombreuses élites africaines exploitent cette dimension pour servir leurs intérêts personnels. Par exemple, les régimes installés dans des territoires riches en ressources ont longtemps compté sur une stabilité des besoins en approvisionnement de la Chine pour favoriser les transactions avec des acteurs chinois qui ne rechigneraient pas à soutenir les projets personnels de responsables africains en contrepartie d’un accès privilégié à ces ressources et à un milieu influent.

« Les élites africaines profitent trop souvent des largesses chinoises sur lesquelles elles s’appuient pour tisser des réseaux clientélistes, renforcer leurs positions politiques et favoriser leur propre enrichissement ».

Cette situation en a amené certains à réclamer une autonomie plus grande de l’Afrique dans ses relations avec la Chine afin de donner aux intérêts publics tout le poids qu’ils méritent. Citons à titre d’exemple le contrat signé par l’Union africaine et la Chine en 2021 pour aligner la stratégie chinoise de la Nouvelle route de la soie sur le plan directeur africain « Agenda 2063 ». Il s’agit d’une proposition populaire que les centres de réflexion africains ont demandé à l’UA de proposer. Autre initiative ayant favorisé l’autonomie africaine : la création par la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) d’un marché unique vis-à-vis de la Chine en 2008 afin d’étendre l’influence de la CEDEAO.

Il convient de rappeler que l’entreprise du FCSA a elle-même été initiée par les pays africains afin de minimiser le risque de se retrouver exclus par les grandes puissances après la Guerre froide. Cette initiative africaine a joué un rôle décisif en ce qu’elle a transformé une initiative diplomatique en un mécanisme de coopération pour accompagner le développement.

L’autonomie africaine s’impose également dans les relations bilatérales. L’Éthiopie a notamment insisté sur le transfert de technologie et la création d’une main d’œuvre compétente dans le cadre des négociations avec le groupe China Railway Group Limited autour du projet de chemin de fer de 756 kilomètres reliant l’Éthiopie à Djibouti. Il s’agissait notamment de soutenir l’African Railway Center of Excellence, un institut régional dédié à la formation des ingénieurs ferroviaires, jusqu’à un niveau master/doctorat. Le chemin de fer est entièrement électrifié et a coûté quelque 3,4 milliards de dollars. Par comparaison, la ligne de chemin de fer à voie normale reliant Mombasa (Kenya) à Nairobi est revenue à 3,2 milliards de dollars alors qu’elle n’est que partiellement électrifiée et qu’elle couvre 475 kilomètres.

A platform at the Nairobi Terminus of the Standard Gauge Railway

Plateforme du terminal de Nairobi, sur la ligne de chemin de fer à voie normale (photo : Macabe5387)

Les responsables de la société civile kenyane déplorent la corruption et le manque de transparence à propos de l’incapacité du gouvernement à négocier des conditions plus équitables et, pour finir, à rembourser l’emprunt. Le Kenya a annulé le projet en septembre 2020 afin de se conformer à la décision de la Cour d’appel du Kenya, qui a déclaré le projet illégal, et pour éviter toute autre action en justice. Le Kenya a ensuite réclamé la reprise des opérations sur le chemin de fer. L’opérateur chinois a toutefois insisté pour recevoir les 38 milliards de shillings kenyans (soit environ 380 millions de dollars) de factures impayées avant de s’exécuter.

En 2019 en revanche, le gouvernement tanzanien a publié les conditions du projet de méga-port de Bagamoyo, d’une valeur de 10 milliards de dollars, et ces conditions ont été jugées « inacceptables » et « humiliantes », notamment celles prévoyant un bail emphytéotique pour la Chine et l’engagement de la Tanzanie à ne développer aucun autre port. Le partenaire chinois a accusé le gouvernement de « tromper le public » mais a rapidement cherché à sauver la face en acceptant certaines des contrepropositions. Avec l’opinion publique contre elle et une image compromise, la Chine a dû formuler de nouvelles propositions en juin 2021.

Ces exemples montrent que les partenaires africains peuvent agir et façonner leur relation avec la Chine. Afin de relever ces défis, les grands spécialistes africains de la Chine se sont rencontrés à Johannesbourg en novembre 2018 afin de faire pression sur l’Afrique du Sud pour qu’elle use de sa position de co-présidente lors de la prochaine réunion du FCSA afin que soit initié le débat d’une approche commune de l’Afrique à l’égard de la Chine et ainsi donner plus de poids à la première. En 2021, ils ont publié un cadre stratégique sur une position commune destiné à l’UA appelant notamment à une meilleure coordination, à un leadership éthique et à davantage de transparence.

Au sein du FCSA 2021 : les priorités pour l’Afrique

L’accès au vaccin contre la COVID-19 constituera la priorité de l’Union africaine. Elle demande à la Chine de s’engager pour libéraliser les sites de production et ainsi permettre aux pays africains de se procurer le vaccin. L’Afrique souhaite également que la Chine soutienne les efforts de l’UA visant à créer cinq sites de fabrication du vaccin sur l’ensemble du continent africain. En juillet, l’Égypte a commencé à fabriquer les premiers vaccins chinois contre la COVID-19 en Afrique grâce à un partenariat noué avec Sinovac, un modèle que l’UA souhaite intégrer à une stratégie plus vaste afin de régler les problèmes de pénurie.

Toute annulation de la dette sera un vœu pieux. Les créanciers chinois détiennent environ 21 % de la dette africaine et des facilités de crédit étendues à hauteur de 152 milliards de dollars vis-à-vis de 49 pays entre 2000 et 2018. La Chine craint d’instaurer un précédent propre à entraîner une remise de dette générale et devrait s’en tenir à des restructurations de dettes et à un ajournement des remboursements. Au moins 18 pays africains négocient actuellement leur dette auprès d’environ 30 créanciers chinois différents. 12 autres tentent de rééchelonner leurs prêts à hauteur de 12 milliards de dollars. Les cinq pays dont l’endettement est le plus élevé à l’égard de la Chine sont l’Angola (25 milliards de dollars), l’Éthiopie (13,5 milliards de dollars), la Zambie (7,4 milliards de dollars), la République du Congo (7,3 milliards de dollars) et le Soudan (6,4 milliards de dollars).

On ne sait pas encore si la dette restructurée prendra la forme d’infrastructures financées par des ressources ou de créances convertibles en capital. Dans les deux cas, les emprunteurs s’exposent à une perte d’actifs stratégiques susceptible de porter un coup à leur souveraineté. Des observateurs africains font valoir qu’une telle politique serait un désastre pour la Chine en termes de relations publiques.

La négociation d’un nouveau financement d’infrastructure serait compliquée : les prêts de la Chine destinés aux infrastructures et aux investissements directs en Afrique pourraient être freinés à moyen terme en raison de l’incapacité d’un nombre croissant d’emprunteurs à honorer leurs dettes.

Les problèmes de dépendance aux produits de base, de barrières non tarifaires et de déficits commerciaux seront autant de points abordés lors des débats de Dakar. En dépit de son engagement affiché en faveur d’une diversification de ses approvisionnements, les importations de la Chine sont rares au-delà des produits de base et ses marchés demeurent difficiles d’accès pour les produits finis africains, un problème qui nécessite des réformes politiques majeures côté chinois.

Les Africains doivent quant à eux déployer davantage d’efforts pour accroître les possibilités du secteur manufacturier à forte composante technologique. La petite Île Maurice constitue une exception notable. En 2020, elle est devenue le seul pays africain à négocier un accord de libre-échange avec la Chine, par lequel elle jouit d’un accès libre de droits de douane à 8 000 produits à valeur ajoutée. Cet événement change la donne et pourrait, sur l’île, donner un coup de pouce aux industries high-tech, créer des emplois bien rémunérés et servir d’exemple pour d’autres pays. Cette issue a toutefois nécessité des années de négociations âpres et disciplinées de l’Île Maurice, qui négociait dans le même temps un accord similaire avec l’Inde. La Chine a été contrainte de faire des concessions qui avaient résisté à d’autres pays.

« La Chine souhaite étendre, en matière de sécurité, sa stratégie ‘faible coût, faible risque, rendement élevé’ en Afrique ».

Les négociations sur la coopération en matière de sécurité et la coopération militaire devraient poser moins de problèmes. La Chine souhaite étendre, en matière de sécurité, sa stratégie « faible coût, faible risque, rendement élevé » en Afrique, compte tenu des intérêts croissants dans le domaine et des dimensions sécuritaires de la Nouvelle route de la soie. Dans ce contexte, la Chine ne cesse d’accroître sa présence (et son influence) militaire et tient à consolider ses engagements en matière de maintien de la paix, de formation et de professionnalisme militaire, de vente de matériel militaire et d’entraînements militaires. Toutefois, le Fonds pour la sécurité Chine-Afrique, un instrument spécifique créé en 2015 afin de rendre opérationnelles la Force Africaine en Attente, est actuellement débattu et devrait être étendu jusqu’en 2024.

En marge du sommet du FCSA, des voix indépendantes mettent en avant leurs priorités au vu de l’incidence que ces politiques ont sur les citoyens ordinaires, à savoir que :

  1. Les gouvernements africains doivent rendre des comptes aux citoyens au sujet de leurs engagements avec la Chine, notamment sur leurs accords financiers ;
  2. Les inquiétudes publiques doivent être prises en compte dans toutes les négociations, notamment en ce qui concerne les droits environnementaux, la soutenabilité de la dette, le respect des réglementations locales et du droit du travail ;
  3. Les pays africains doivent être plus stratégiques en mettant par exemple en avant leurs engagements avec la Chine pour soutenir six cadres continentaux de l’Union africaine : l’agriculture ; les infrastructures ; les mines ; les sciences, la technologie et l’innovation ; le commerce intra-africain et le développement industriel.

Transformer le FCSA

La Chine considère le continent africain comme une source d’opportunités économiques et géostratégiques en dépit des risques existants et souhaite l’intégrer à sa stratégie mondiale afin de redevenir la « Grande puissance » (shì jiè qiáng guó; 世界强国). Par comparaison, les pays africains n’ont pas élaboré de stratégie claire, c’est pourquoi certains réclament une meilleure coordination basée sur les priorités nationales, régionales et continentales. Le rôle de plus en plus important d’acteurs africains indépendants indique également que les relations sino-africaines ne relèvent pas du domaine exclusif des gouvernements.

Les citoyens africains appellent de leurs vœux une refonte de l’architecture du FCSA par les gouvernements ; il faudrait selon eux élargir les mécanismes existants afin d’y inclure les propositions africaines, faire la place nécessaire à leurs institutions au sein du partenariat et exhorter la Chine à entreprendre des réformes pour rendre cette structure plus équitable.

The 2018 FOCAC summit.

Cérémonie d’ouverture du sommet FCSA 2018. (photo : Présidence de la République du Bénin)

Des voix africaines de plus en plus nombreuses s’élèvent pour une obligation de rendre des comptes, pour plus de transparence et un contrôle accru. Quoique les Africains ne soient pas défavorables à une hausse des investissements chinois et à un renforcement des capacités, ils demeurent préoccupés par le fait que des aspects essentiels de la relation Chine-Afrique restent dans l’ombre, pour le profit de quelques-uns, donnant ainsi prise à la corruption.

Un tango, certes, se danse à deux, mais la population africaine cherche à peser sur ses élus pour leur demander de respecter les règles imposées aux acteurs chinois. Quoique jouissant d’une position nettement plus favorable, la Chine ne peut s’offrir le luxe d’ignorer ces réalités, qui jouent sensiblement sur son image et sur la manière dont ses intentions sont perçues et qualifiées, notamment au sein des pays en développement. Pour que le FCSA ait un impact positif sur la population africaine, il faut que les pouvoirs publics africains et chinois puissent être mis face à leurs responsabilités quant au fait de servir les intérêts des citoyens et soient contraints de démontrer en toute transparence que l’ensemble des accords conclus au FCSA vont dans ce sens.


Ressources complémentaires